23 PACES TO BAKER STREET, d'Henry Hathaway

Titre français = A vingt-trois pas du mystère

Scénario de Nigel Balchin d’après un roman de Philip Mac Donald

Philip  Hannon, début de la quarantaine,  est devenu aveugle. Ce hanicap l’a rendu particulièrement amer malgré son succès en qualité de dramaturge. 
Malgré son succès aux Etats-Unis,  il est  venu s’installer à Londres. Il y est « couvé » par son majordome Bob Matthews, qui lui sert aussi de secrétaire.
Arrive alors une jeune femme, Jean Lennox.  Quelque temps auparavant, elle était sa secrétaire et fiancée, mais depuis sa cécité, Philip Hannon a rompu tout contact et a préféré s’installer dans un très bel appartement, sur les bords de la Tamise – où il demande régulièrement à son majordome de lui décrire la vue, mais comme il le dit = vous regardez, mais vous ne voyez rien de la beauté du paysage et de l’instant (notamment lorsque le soir tombe et que le soleil couchant change les couleurs).
Hannon est agacé par la présence de Jean (jamais agréable de s'entendre dire qu'on a tort)  et décide d’aller prendre un verre au pub du coin, en face. 

Installé confortablement, il surprend une conversation = un homme à la voix étouffée discute avec une femme, jeune, à propos d’une arrivée prochaine et de l’enlèvement de l’enfant d’un couple très riche. La femme refuse, puis se laisse convaincre par l’argent promis.  Certains éléments de la conversation sont parfois occultés par le bruit du flipper, mais dans l’ensemble la conversation est évidente. On projette bien d’enlever un enfant le 10 de ce mois.

Hannon rentre à l’appartement, enregistre la conversation, pour bien s’en souvenir lorsqu’arrive la police. Inutile de dire que l’inspecteur Grovening  et son adjoint sont totalement sceptiques ; Philip est un dramaturge, il n’est pas impossible qu’il ait « brodé » autour d’une conversation anodine.
Hannon est furieux du manque d’intérêt des policiers ; il décide de mener sa propre enquête, malgré son handicap, avec l’aide de son butler/secrétaire et son ex-fiancée, qui n’a pas l’intention de repartir en Amérique, comme Philip le lui suggère. Leur seul indice est que la jeune femme s’occupe des enfants d’une dame qui doit se rendre à un concert  le soir même de la conversation.
C’est donc elle qu’il faut rechercher et à partir de là, tenter d’arrêter le chef et ses complices.

Si le titre de ce film policier vous fait penser à quelqu’un, vous avez entièrement raison = Hannon explique au téléphone où il habite = à vingt trois pas de Baker Street, c’est vous dire si une fois encore la traduction française du titre laisse à désirer.
Car ce clin d’œil à Baker Street n’est pas totalement anodin  = un critique cinématographique a carrément comparé le tandem formé par le dramaturge et son secrétaire/butler  à Holmes et Watson ; Philip Hannon, le dramaturge aveugle, est méthodique,  utilise une logique de déduction pour arriver à la conclusion de cette sombre affaire d’enlèvement d’enfant – et son secrétaire/butler fait penser au docteur Watson, avec ses quelques  maladresses et déductions erronées qui mettent son patron sur la voie. 

On a comparé ce film à une  réalisation d’Alfred Hitchcock = Fenêtre sur cour (photographe handicapé par une jambe fracturée et surprenant un meurtre en prenant des photos et menant l’enquête avec sa fiancée et sa gouvernante).
Cependant il s’agit d’une histoire originale, écrite par l’écrivain de polars anglais Philip Mac Donald. Celui-ci s’installa aux Etats-Unis, où il écrivit aussi quelques scénarios. Il est entre autres le romancier de « The List of Adrian Messenger ».
Il en  écrivit le scénario  lors de l’adaptation cinématographique (billet ici).
Toutefois, la comparaison hitchcockienne n’est pas fausse dans le suspense qui règne ici. 

Ce film-ci est l’adaptation de son roman = « Warrant for X » (le Nurse qui disparut). Dans son roman, l’enquête est menée par son personnage récurrent, Anthony  Gethryn.
Il est remplacé ici par l’inspecteur du Yard, Grovening (interprété par Maurice Denham dont le rôle est épisodique vu que ce sont des amateurs qui mènent l’enquête à sa place).

Van Johnson est un plausible écrivain aveugle. Il interprète bien un homme que son handicap a rendu amer, qui se réfugie en lui-même, ne permettant plus à personne de vouloir être dans sa vie, comme son ex-fiancée, jouée avec sensibilité par Vera Miles.

Mon préféré dans le film est le majordome  Matthews (le « Watson »  de Hannon), brillamment interprété par Cecil Parker.
Ce comédien de théâtre a interprété de nombreux films, dans lesquels il était « le » britannique aristocrate, jusqu’au bout des ongles. 
J’ai particulièrement apprécié son  flegme face aux caprices de son patron, mais là où il est quasi « délirant », c’est lorsqu’il revient d’avoir suivi le suspect, sous la pluie et qu’il explique, entre deux éternuements, le parcours qu’il a dû effectuer sous  une pluie battante. 

Le réalisateur Henry Hathaway est célèbre pour ses westerns, mais aussi pour l’excellent  « Niagara » où il filme la superbe Marilyn Monroe, en lui offrant un rôle à la hauteur de son réel talent.

Encore une découverte intéressante, pour l’ambiance mystérieuse qui devient angoissante au fil de l’histoire, puisque l’écrivain a été repéré par ceux dont il veut arrêter les noirs desseins et qui ont donc décidé de le supprimer.
Un suspense avec peut-être quelques longueurs, mais dans l’ensemble il fonctionne bien.

 

Comments

[maggie 76]

J'avais beaucoup aimé Niagara de Hataway et comme j'aime beaucoup Sherlock, je note cette équation qui a l'air de fonctionner ! La manière dont tu le racontes rend ce film amusant ( l'est-il ?). en tout cas, un film que j'ai envie de voir ! ( j'en regarde un peu ces derniers temps... Un peu plus de temps...)

[Teki]

Il doit être bien difficile de décrire un paysage pour un aveugle.