YOU WILL MEET A TALL BLACK STRANGER, de Woody Allen

Ecrit et réalisé par Woody Allen

Titre français = Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu

A Londres, la jolie Sally a des difficultés à gérer sa vie et celle de sa mère, récemment divorcée, qui débarque toujours sans prévenir, ne parle que d’elle-même et de la voyante qui lui prédit un avenir heureux, et lui pompe un maximum de fric.

Pendant que sa mère est convaincue d’avoir vécu d’autres vies dans d’autres époques, Sally se sent attirée par son patron, le propriétaire d’une élégante galerie d’art. Son père, de son côté, est pris d’une crise de jeunisme et dépense tant et plus pour se redonner un look de jeune homme, y compris s’offrir une bimbo afin d’avoir un fils.

Le mari de Sally, qui non seulement râle sur sa belle-mère (alors qu’elle paie le loyer), commence de son côté à fantasmer sur sa jolie voisine d’en face, qu’il aperçoit jouant du violon pendant qu’il écrit, car Roy l’Américain a abandonné la médecine pour devenir écrivain ; il semble toutefois n’être que l’homme d’un succès littéraire, et un seul. Depuis il est atteint du blocage de la page blanche et râle sur le manuscrit d’un copain, bien plus talentueux que lui.

Bref, ça va bien, ça va mal, les couples se font et se défont, on passe du rire, non pas aux larmes, mais aux constatations amères que la vie n’est pas simple.

Film choral comme je les aime, Woody Allen nous offre une fois encore une galerie de personnages qui ont des difficultés existentielles tournant autour de l’âge, du sexe, de l’argent, des ambitions déçues, des couples et leurs petites trahisons en tous genres. Allen n’aime pas trop les crétins, et il nous le fait régulièrement sentir au travers de ses divers personnages dans tous les films qu’il a tourné.

Ici il fustige les âmes en peine qui se laissent piéger par les gourous new age qui ne sont que trop heureux de leur piquer leurs sous. Ce film est le quatrième qu’Allen a tourné à Londres, mais il ne nous offre pas grand’chose de la ville cette fois-ci. On a plutôt l’impression d’assister à du théâtre filmé, car on fréquente surtout les mêmes lieux = appartements des couples, appartement de la « voyante », boutique « new age » et appartement-galerie de l’employeur de Sally/Naomi Watts.

« You will meet a tall dark stranger » est la phrase ironique avec laquelle Roy, interprété par Josh Brolin se moque ouvertement avec sa belle-mère, avec laquelle il entretient des rapports plus que conflictuels. Josh Brolin est un bon acteur, hélas il n’a, à mes yeux, aucun charisme (il n’a en tout pas hérité de celui de son père, James Brolin, et c’est réellement dommage).

Gemma Jones (que l'on a pu voir dans "Bridget's Jones Diary") est la pathétique Helena, prête à se raccrocher à n’importe quoi que lui dit sa cartomancienne cum voyante extra-lucide, Crital, qui donne le plaisir de retrouver à l’écran la sympathique actrice britannique Pauline Collins.

Anthony Hopkins est l’ex-mari d’Helena, tout aussi pathétique qu’elle à refuser de se voir vieillir, qui traversant une crise majeure face à l’âge, décide de tout balancer = femme, vie précédente et de  s’offrir une vie de « jeune homme » ; dans cette vie, il faut bien sûr une jolie et très jeune femme – il jette son dévolu sur la soi-disant actrice, mais surtout escort girl, Charmaine, au Q.I. inférieur à celui d’un colibri mais à la plastique parfaite, et ayant rapidement compris à quel point elle peut disposer à loisirs de la fortune de son nouveau mari – qu’elle risque de mettre rapidement sur la paille, et sur le flanc aussi d’ailleurs ! Elle est

brillamment jouée par Lucy Punch.

Naomi Watts est l’épouse de Josh Brolin ; elle est très naturelle dans son rôle de femme qui ne sait plus trop où elle en est. Elle fantasme totalement sur son patron, mais comment ne pas la comprendre lorsqu’on sait qu’il est interprété avec charme et ironie par Antonio Banderas.

Freida Pinto est Dia, la jolie dame en rouge sur laquelle fantasme Roy/Brolin. Dans la figuration on rencontre encore Celia Imrie, et le bouquiniste-propriétaire de la boutique new age est joué par Roger Ashton-Griffiths.

Les critiques cinématographiques considèrent ce nouveau Woody Allen,  présenté hors concours au dernier festival de Cannes, comme un « Allen moyen » - moi, qu’il soit moyen ou non, Woody Allen je suis FAN de la première heure et je le resterai jusqu’ au bout. J’ai évidemment beaucoup moins ri qu’avec « Whatever Works », mais j’aime beaucoup cet humour noir, caustique, grinçant, parfois au bord du désespoir. Des crises existentielles nous en traversons tous, et souvent – et vieillir n’est pas la moindre.

Et puis, Woody Allen, je l’aime aussi pour la manière dont il parle de ses acteurs – lorsque récemment un journaliste lui demanda comment il arrivait à toujours faire en sorte que ses comédiens donnent le meilleur d’eux-mêmes, il a répondu avec énormément de gentillesse = « que lui, il n’y était strictement pour rien, il engageait des gens au talent énorme, et ses gens jouaient ce qu’il avait écrit tout simplement. Si le résultat est brillant, c’est grâce aux acteurs. »

Comments

[denis47]

Oui, c'est vrai !!

[niki]

trop d'intellect peut nuire à la perception des choses ;)

[denis47]

Je ne l'ai pas encore lue ta critique car je compe aller le voir d'ici la fin de la semaine. Je sais qu'on le considère comme un "mineur" de Woody Allen mais un mineur d'un cinéaste de talent....! Je reconnais cependant que je n'éprouve plus le même frisson intellectuel que lors de la vision de ses premiers films. L'habitude ..!? ou alors est-il moins corrosif dan son humour....!?