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mon bonheur est dans la ville
24 juillet 2009

ANNA BOLEYN, d'Ernst Lubitsch

8266(C'était au temps du cinéma muet !)

Autre titre : DECEPTION

Une nef arrive de France avec à son bord la jeune Ann Boleyn, attendue par Sir Henry Norris qu’elle aime ; celui-ci lui explique que son oncle Norfolk l’attend.

Pendant qu’ils se rendent dans la demeure de l’oncle, la reine Katherine d’Aragon attend le roi Henry VIII qui batifole une fois encore avec une jeune damoiselle peu farouche, après qu’il ait bu et mangé à la suite de son sport préféré : la chasse.

La malheureuse reine se sent humiliée et se retire dans ses appartements où Ann lui est présentée par Norfolk afin d’entrer à son service. Arrive Henry, qui non seulement s’énerve sur son épouse mais de plus s’intéresse de très, vraiment très, près de la jolie Ann, qui l’évite du mieux qu’elle peut.

Mais Norfolk a bien compris tout ce que son ambition à lui peut retirer de la situation et il fait en sorte que sa nièce soit de plus en plus dans les parages du roi.

Au point que la reine comme Norris, et ensuite toute la cour lui tournent le dos. Ann est désespérée par la situation.

Pourtant Henry VIII va divorcer de la reine Katherine en provoquant un schisme religieux, puis épouser Ann et ensuite se fatiguer d’elle parce qu’elle non plus ne lui a pas donné d’héritier mâle. Le poète de cour, Smeaton, amoureux de la reine Ann va la discréditer aux yeux du roi en prétendant qu’elle le trompe avec Henry Norris dont il est jaloux.

Norris meurt dans un tournoi, Ann est emprisonnée pour adultère et condamnée à mort par son oncle Norfolk, pendant qu’Henry batifole déjà avec Lady Jane (Seymour), la prochaine épouse.

Je me suis faite une fois pour toute l’avocate d’Anna Boleyn, surtout après l’image qu’en a donné Philippa Gregory.

Je ne fais pas d’Anne Boleyn une sainte, mais qu’elle ait été une fille sacrifiée sur l’autel des ambitions de son oncle, le duc de Norfolk, et de toute sa famille sans scrupules, est une évidence historique. Comme la plupart des filles de son époque, elle ne devait servir que les intérêts familiaux.

Son plus grand défaut était sa lucidité dans cette situation et sa propre ambition, due à une intelligence et sa vivacité d’esprit. Elle refusait de servir sans broncher, elle s’estimait l’égale d’Henry VIII, c’est ce qui la perdit.

Inutile de dire que lorsque j’ai vu au programme de la cinémathèque (pardon, Cinematek), une version datant du temps du cinéma muet (1920, période allemande de Lubitsch), avec dans le rôle d’Henri VIII le célèbre acteur allemand, Emil Jannings, ma curiosité fut titillée.

Je ne le regrette pas un seul instant, même si bien sûr cette manière de jouer au temps du muet est particulièrement exagérée, mélodramatique et pas très naturelle.

180px_Hans_Holbein_d__J__049Emil Jannings campe un Henry VIII plus vrai que nature ; il fait merveille en roi paillard, coureur de jupons ; costumes et maquillage lui donnaient, en plus, une ressemblance époustouflante avec le portrait d’Henry VIII d’Hans Holbein.

Ce qui me rend cet acteur antipathique c’est qu’il ait viré nazi à partir de 1938, devenant l’un des acteurs « privilégiés » de la propagande nazie réalisée par Goebbels.

Pour Anne Boleyn, Ernst Lubitsch a choisi la version « victime » du personnage ; Ann n’est pas montrée ici comme une intrigante ambitieuse mais comme une jeune fille sacrifiée par tous. Tant par les désirs de gloire de Norfolk que par les désirs d’Henry VIII suborneur de jeunes filles.

ernst2Elle était interprétée par Henny Porten, dont l’allure physique était plutôt celle d’une jeune paysane bavaroise que de l’élégante Boleyn, surtout en chemise de nuit avec ses tresses. Difficile de ne pas attraper le fou-rire ! Surtout lorsqu’elle prenait l’air mélodramatique de la malheureuse séduite et abandonnée, sujettes aux convoitises royales et aux jalousies des courtisans. Ou encore rejetée tant par la reine qu’elle servait que par son ami Norris. J'aurais bien vu l'actrice interpréter Anna de Clèves, une des autres épouses d'Henry VIII.

Le duc de Norfolk était joué par Ludwig Hartau, qui comme tous les « méchants » du muet avait un maquillage accentué aux yeux lui donnant un air fourbe.

Le même maquillage est d’ailleurs donné à Ferdinand von Alten, véritablement ridicule en Mark Smeaton.

Sir Henry Norris était interprété par Paul Hartmann ; la reine Katherine d’Aragon par Hedwig Pauly-Winterstein. Elle était également fort mélodramatique, tout comme d’ailleurs Aud Egede Nissen qui interprète Jane Seymour, rôle particulièrement ingrat puisqu’elle campe une Jane fourbe et intrigante, véritable femme fatale, provocante à souhait, toute prête à prendre la place de la reine Anne.

Une image aux antipodes de celle que l’on montre généralement de Jane Seymour.

Costumes et décors m’ont totalement bluffée par contre ; j’imaginais assez naïvement que tous les films du temps du cinéma muet n’avaient que des décors et des costumes assez peu intéressants et c’est là que je me trompais complètement.

Ici, ils étaient surprenants de diversité, ayant à l’évidence fait l’objet d’une recherche approfondie.

Comme il était de tradition aux temps du cinéma muet, le film était accompagné - tout au long des deux heures – de l’interprétation au piano, et c’est là que je tire mon chapeau à la charmante pianiste qui, comme le veut la tradition, transposait en musique les sentiments mimés à l’écran par le simple jeu des sons graves, lourds ou légers selon qu’ils exprimaient des moments dramatiques, ou plus drôles, ou tendres. Les dialogues (probablement en allemand) étaient « traduits » à l’écran par des panneaux entre les scènes.

N’ayant pas vu de partition sur le piano, j’imagine que la jeune femme improvisait. Je n’ai pas eu l’occasion de lui poser la question et je le regrette car cela m’intrigue particulièrement.

ernstEn tout cas, voilà une expérience que je ne regrette nullement ; le film d’Ernst Lubitsch – qui est, avec cette histoire, dans sa période « personnages historiques » (Mme Du Barry, Carmen, les Yeux de la Momie, la Femme du Pharaon) a duré deux heures mais il m’a semblé plus court que certaines réalisations actuelles.

Ernst_Lubitsch_01Le réalisateur qui, peu après, rejoindra Hollywood à la demande de Mary Pickford va rapidement se faire un nom = la « Lubitsch Touch », c'est-à-dire de la sophistication, de la satire, de l’humour dans les dialogues dès l’apparition du cinéma parlant.

Dès 1935 il réalisera ses films les plus célèbres, faisant tourner des stars comme Gary Cooper, James Stewart, Carol Lombard, Greta Garbo.

Déchu de sa nationalité allemande par le régime nazi dont il se fera un virulent opposant, il réalisera en 1942 le célèbre « To be or not to be » qui met en scène des résistants au nazisme.

Il a travaillé avec les plus grands dialoguistes, comme notamment Billy Wilder qui est considéré comme son « héritier cinématographique ».
Blake Edwards se recommande aussi de Lubitsch, rappelant régulièrement que c’est Ernst Lubitsch qui l’inspira dans toute sa carrière.

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