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mon bonheur est dans la ville
22 novembre 2020

LA CLE SOUS LE PAILLASSON, de Marcel Aymé

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Une nouvelle faisant partie du recueil « Le Nain »

Un gentleman-cambrioleur décide qu’il est temps de découvrir qui il est, au moins connaître son identité exacte, au lieu d’être « le cambrioleur mondain » - en conséquence, il quitte les pages du roman policier où il figure. Même « mondain » ça ne fait quand même pas de vous un honnête homme, or il a envie de devenir honnête notre cambrioleur.
Il arrive en ville, un soir où a lieu le bal de la sous-préfecture. Toutes les mères de famille conduisant leurs filles au bal enjoignent leur époux de « mettre la clé sous le paillasson », et de ne pas rentrer tard – parties de billard ou de cartes ne doivent pas durer, comme le bal, jusqu’au petit matin.
Le cambrioleur décide de se rendre dans la maison cossue la plus proche du lieu où il se trouve. La clé est bien là, ce qui lui évite de crocheter la serrure, même s’il possède l’attirail du parfait cambrioleur (rossignols et autres petites pinces).

Lorsque rentre le maître des lieux, bien après minuit (surtout ne pas le dire à madame), il reconnaît dans le cambrioleur son fils aîné, disparu depuis 18 années. Son prénom est Rodolphe.
S’en suit une longue conversation entre père et fils, ce dernier commettant l’imprudence de se dire très riche grâce à des biens mal acquis. Mais comme il veut devenir honnête, et qu’il a deux jeunes sœurs à marier, il ne veut pas ternir l’image de la famille, il veut rendre tous ses biens.
Rage du père, qui n’est qu’un petit employé et qui considère que cette soudaine fortune lui appartient !!!!

Rentrent mère et filles – toutes trois ravies de rencontrer Rodolphe. La maman parce que son fils lui manquait, les jeunes sœurs parce qu’elles rencontrent enfin ce frère dont on n’arrêtait pas de parler.
Toutes deux ont rencontré au bal de la sous-préfecture des jeunes gens parfaitement honorables. Hélas, le père ayant décidé de garder les richesses du fils pour la famille, défend à ses filles de s’intéresser à des « minables » alors qu’il peut enfin leur offrir une dot décente et donc briguer de plus importants fiancés.

Rodolphe, puisque Rodolphe il y a, est totalement mortifié. Quoi ! son père est devenu un homme malhonnête, mais surtout va du coup faire le malheur des jeunes filles.
Pris d’un besoin de frère affectueux et protecteur, Rodolphe va prendre une décision, peut-être pas celle qu’il souhaitait, mais le bonheur des jeunes filles avant tout.

Et avec tout ça, il ne connaît toujours pas son patronyme, seulement un prénom. Décidément, la vraie vie n’est pas simple.

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Ce que j’en pense = j’ai adoré - de Marcel Aymé je n’avais lu que « Le Passe-muraille » (il y a fort longtemps), qui m’avait déjà bien amusée. C’est en cherchant une illustration pour mon petit billet sur une fatigue temporaire de l’écriture et de la lecture que j’ai découvert cette courte nouvelle, où l’on a l’impression que l’auteur fait sans arrêt un clin d’œil aux lecteurs.

C’est drôle, d’un rythme rapide, bien écrit, même si parfois d’un style quelque peu vieillot (la nouvelle est parue en 1934), mais c’est une metalepse, et c’est quelque chose que j’aime beaucoup = un personnage s’évadant de son livre, pour être dans la « vraie vie ».
L’auteur aimait à dire que ses écrits étaient des « études sociales », sans toutefois le côté un peu rasoir des essais. Généralement il n’hésitait pas à introduire des mots d’argot ou de patois franche-comtois dans ses histoires, mais ici il n’y en a guère.

Marcel Aymé, avant d’être un écrivain reconnu, fut tour à tour employé de banque, agent d’assurances, et finalement journaliste, qui le mènera à l’écriture. Homme modeste, il ne se trouvait guère de talent.
Voici de manière abrégée ce qu’il disait de lui = petit provincial cornichon, pas doué pour les lettres, n’ayant même jamais été premier en composition française.
Cette modestie ne fait guère honneur à son talent.

Pour ses écrits, on parle du « style Marcel Aymé », à savoir un regard caustique, de l’esprit sur les petits et grands travers de l’homme, dont il lui plaît de dénoncer les défauts = avarice, appât du gain, hypocrisie, mépris et quelques autres.
Néanmoins, il parle aussi d’amitié, de bonté, d’indulgence et dévouement. Dans certains de ses écrits, il introduit du fantastique (comme dans le « Passe-muraille ».
Le père dans cette histoire-ci correspond parfaitement à la description de l'homme d'abord gentil, qui devient soudain âpre au gain lorsqu'il apprend que son fils possède une fortune, même mal acquise.
Quant au fils prodigue, il se meut soudain en frère plein d'affection et d'abnégation, décidé à faire le bonheur des femmes de la maison.

Rien de tel qu’une petite nouvelle bien écrite pour remettre le pied à l’étrier de la lecture.

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Commentaires
S
comme je l'ai dit, je ne connais que "le passe muraille" savoureux à souhait - j'en lirais bien d'autres
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M
J'ai peu lu Marcel Aymé, je le regrette. J'essaie de rattraper, parce que j'ai lu m'a particulièrement réjouie ( dont La traversée de Paris ). Il faudrait vraiment que je lise Le passe-muraille. Déjà Uranus m'attend.
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T
Une petite nouvelle à lire :D , je retiens et la met dans la liseuse.
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