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mon bonheur est dans la ville
15 septembre 2009

NO WAY OUT, de Joseph L. Mankiewicz

200px_No_Way_Out

Le jeune interne noir Luther Brooks vient de brillamment passer ses derniers examens et a obtenu sa licence de médecine ; manquant de confiance en soi, le jeune médecin demande à son supérieur direct de pouvoir encore prester un an dans son département au County Hospital , ce qui lui est accordé.

Ce même soir, on amène deux voleurs, les frères Biddle, blessés par balles aux jambes, suite à un hold-up ; de ce que lui raconte l’un des policiers ayant arrêté les deux frères, Johnny avait un comportement tellement étrange que le docteur Brooks suspecte une tumeur au cerveau.

Malheureusement,  son frère Ray est un raciste convaincu qui ne veut pas être soigné par un Noir (« negro » dans le film). Comme les policiers lui font comprendre que son avis compte pour rien, Brooks fait une ponction lombaire mais Johnny Biddle meurt entretemps. Inutile de dire que Ray Biddle hurle à l’assassinat. Luther Brooks demande une autopsie afin de prouver qu’il a agi dans l’intérêt du patient, mais Ray refuse qu’on charcute son frère.

Le docteur Wharton, supérieur direct de Brooks, et totalement d’accord avec lui, va plaider sa cause auprès du directeur du County, mais ce dernier demande que l’on fasse le moins de vagues possibles, il a déjà bien assez de difficultés à obtenir des subsides et il a déjà eu bien des difficultés à faire accepter un étudiant en médecine, et à présent médecin, de couleur.

Dans les détails concernant la vie privée de Johnny Biddle, il apparaît que ce dernier est marié à une certaine Edie – lorsque Wharton et Brooks lui rendent visite, elle répond qu’elle a divorcé et qu’elle ne veut plus entendre parler des Biddle ; elle a à présent un métier correct de serveuse de restaurant, qui lui a permis de quitter les taudis de Beaver Canal, elle ne veut donc vraiment pas y retourner.

De toute façon, comme tous ceux de Beaver Canal, la jeune femme n’est guère sympathisante à l’égard d’un Noir, fût-il médecin. Toutefois, vu le respect témoigné par les deux médecins, le Blanc et le Noir, elle accepte de rencontrer Ray, espérant le faire changer d’avis.

C’est oublier à quel point Ray Biddle est un manipulateur et il parvient à troubler complètement la jeune femme.

Pendant ce temps, la racaille blanche de Beaver Canal a décidé d’aller se venger sur la communauté noire vivant de l’autre côté du canal - « Niggertown » comme l’appellent les Blancs – seulement cette fois, les Noirs ont décidé de ne pas se laisser faire et ce sont les Blancs qui aboutissent au County Hospital. Là, au moment de soigner un jeune Blanc, blessé, sa mère s’approche du Dr Brooks et lui ordonne « d’enlever ses sales pattes de nègre de son fils », puis lui crache à la figure. C’est plus que Luther Brooks a décidé de supporter et il quitte l’hôpital en rage.

Son épouse arrive un peu plus tard afin de prévenir le dr Wharton que Luther s’est rendu à la police, où il dit penser avoir tué un malade ; ainsi une autopsie  est obligatoire et pourra  (ou non) prouver l’innocence de Luther Brooks = a-t-il ou non eu raison de penser que son patient était atteint d’une tumeur au cerveau.

De son côté, Ray Biddle, grâce à son autre frère le sourd et muet, parvient à échapper à la surveillance de l’hôpital et il a bien l’intention de se venger de Luther Brooks.  Edie, malheureusement a été retenue prisonnière par les amis de Biddle dans les bas-quartiers de Beaver, d’où elle tente de s’échapper, pour tomber de Charybde en Scylla, car Ray Biddle l’attend chez elle, où il se vante qu’il va se venger du sale nègre qui a tué son frère ; il oblige le sourd et muet à garder Edie afin qu’elle ne puisse pas prévenir Luther Brooks.

Inutile de dire que ce film est particulièrement sombre (pas de jeu de mots !) ; il s’agit d’un de ces films noirs des années 50, où il n’y a pas à proprement parlé de « héros », quoique les médecins Daniel Wharton et Luther Brooks soient tout de même des images positives ; le premier est blanc et le second est noir, mais ils sont amis. Nous sommes au début des années 50 et la situation des Afro-Américains est encore très précaire, surtout lorsqu’ils veulent faire des études pour aspirer à d’autres fonctions que portier d’hôtel, facteur, etc.

220px_Joseph_L__MankiewiczIl a fallu à Darryl Zanuck, le producteur, un certain courage pour accepter le sujet de Joe Mankewicz, mais il lui a tout de même ordonné de changer la fin, afin que ce soit plus dans une tradition politiquement correcte.

Poitier_croppedA cette époque, Sidney Poitier était encore un presqu’inconnu au cinéma, le film le catapulta au devant de la scène. Tourner avec Richard Widmark, d’après Sidney Poitier, fut l’un des meilleurs souvenirs de sa vie d’acteur – non seulement, ils devinrent amis pour la vie, mais de plus, Richard Widmark qui était un grand défenseur des droits des Noirs et de la démocratie, passait son temps – entre deux scènes – à s’excuser auprès de Sidney Poitier pour les propos odieux et racistes que son personnage de Ray Biddle tenait à l’encontre du Dr Brooks/Poitier.

280px_Kazan_27s_Panic_in_the_Street_trailer_screenshot__2821_29Dire que Richard Widmark excelle dans le rôle du gangster bourré de haine raciale est peu dire ; l’acteur qui avait pourtant un physique plutôt séduisant, est littéralement laid de haine. J’avoue qu’il m’a donné la chair de poule et plus particulièrement lorsqu’il manipule l’ex-femme de son frère mort.

Je suis toujours épatée par la manière dont quelqu'un de gentil dans la vie parvient à exprimer une ordure à l'écran, quel talent !

darnell1Edie Johnson est interprétée avec beaucoup d’émotion par Linda Darnell, rendue moins séduisante qu’à l’accoutumée, son rôle exigeant qu’elle ait l’air d’une jeune femme paumée, à la limite de l’alcoolisme, mais qui tente de s’en sortir dans la vie et de trouver enfin un peu de dignité loin d’un quartier mal famé qui ne mène qu’au gangstérisme et la prostitution, comme le lui fait comprendre l’odieux tenancier du bistrot où elle s’est rendue pour porter un message au patron.

J’avoue que je n’aimerais guère le retrouver au coin d’une rue celui-là ; il est fort bien joué par Bert Freed. Cet acteur fut le tout premier inspecteur Columbo à la télévision dans des épisodes de 1960, à l’époque où ils étaient joué live sur une scène quasi théâtrale, ceci 7 ans avant que Peter Falk ne devienne le légendaire lieutenant.

220px_Stephen_McNally_in_Split_Second_trailerLe sympathique Dr Daniel Wharton est interprété par Stephen McNally, qui après quelques rôles dans des films noirs, devint acteur de télévision.

L’histoire dont le scénario est tiré a été écrit dans les années 40 par un certain Lesser Samuels, un scénariste hollywoodien. Il collabora à l’adaptation avec Joseph Mankiewicz. Lesser Samuels reçut une nomination aux oscars pour ce scénario.

J’ai vu dans ma longue vie de cinéphile pas mal de films de Joseph Mankiewicz, mais jamais ce « No Way Out » - grâce à une rétrospective à la cinémathèque, c’est désormais chose faite, mais ce film est fort dur à encaisser, surtout au niveau de l’expression de la haine raciale – et dire que c’est du cinéma. On est effrayé à l’idée de ce que cela devait être dans la réalité, cependant le film rend parfaitement cet état de choses !

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Commentaires
S
c'est vrai sourifleur, je suis dans une période "cinémathèque", donc rétrospectives cinématographiques.<br /> C'est mon grand plaisir grâce à la cinémathèque de découvrir ces rétrospectives et des films dont je n'avais jamais entendu parler.<br /> <br /> Curieusement j'arrive à mieux parler des films que j'ai vus que des livres que j'ai lus; de ce côté là j'ai vraiment un blocage; il est vrai que je suis de nouveau atteinte de ce que mon petit mari appelait mon "zapping littéraire" = j'en suis à environ 5 livres à la fois, en fonction de mes goûts du jour ou du soir (essais sur l'art et les religions, polars, etc)<br /> :)
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S
Eh bien, sheherazade, je m'aperçois que tu es dans une grande période "films"! Je t'avoue que je n'en connais pas beaucoup parmi ceux que tu viens de présenter. En tout cas, ils ont l'air intéressant!
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