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mon bonheur est dans la ville
18 juillet 2009

THE ACT OF ROGER MURGATROYD, de Gilbert Adair

31SH8BN45CL__SL500_AA180_Veille de Noel années 30; le colonel ffolkes (en minuscule SVP, il insiste) et son épouse Mary reçoivent quelques amis afin de fêter Noël : le vicaire et son épouse, le docteur du village et Madame, une amie romancière, auteure de romans policiers fort courus et une autre amie, Cora Rutherford, comédienne célèbre.

Tout le monde attend avec impatience Selina, la fille de leurs hôtes qui ramènent un copain américain, qui suit les cours à la même académie, mais hélas aussi un invité de dernière minute. Un certain Gentry qui n’a de « gentry » que le nom et que l’on retrouve le surlendemain dans le grenier, tué d’une balle, dans la poitrine.

Le surlendemain de Noël c’est « boxing day » en Angleterre, et il y a beaucoup à penser que la police ne sera pas prompte à arriver, d’autant plus que la neige tombe depuis trois jours rendant les routes presque impraticables.

Il y a cependant quelqu’un qui pourrait les aider, à la suggestion d’Evadne Mount, la reine du crime sur papier : l’inspecteur en chef à la retraite du Yard, Trubshawe, qui n’apprécie que très modérément les écrivains de romans policiers et ce n’est pas l’excentrique Evadne qui va lui donner tort.

Mêle-tout par excellence, la romancière est certaine qu’elle est beaucoup plus douée que la police pour découvrir un meurtrier, mais bon il faut une enquête « officielle », en principe.

Seulement voilà, pour l’enquête officielle il faudra attendre encore un peu ; en attendant Trubshawe veut bien procéder à une enquête préliminaire car comme l’a très justement fait remarquer (ah vous voyez bien qu’elle s’y connaît !), Miss Mount : le crime ne peut avoir été commis que par l’une des personnes présentes à ffolkes Manor. Qui plus est, on est en plein dans un mystère de chambre close à la Dickson Carr et Evadne, très modeste, reconnaît que ce n’est pas son point fort.

Il apparaît bien vite que chaque personne présente avait une excellente raison de tuer Raymond Gentry, qui s’était amusé toute la veillée de Noel et le dîner du jour de Noel à se moquer des habitudes anglaises, de ces réunions de campagne fastidieuses et stupides, mais surtout il semblait connaître tous les petits secrets des invités et de leur hôte. Non seulement il se montra odieux et vulgaire (forcément, il était d’origine étrangère), mais il a fait comprendre à chacun présent que son journal serait ravi de publier leurs petites histoires sordides, à moins qu’ils acceptent de payer pour qu’il se taise.

Vous parlez d’un Noël gâché ! Même la ravissante Selina a ouvert les yeux avec horreur sur ce type qui l’éblouissait au point d’en négliger Donald (celui dont les parents se nomment Duckworth  malin comme choix de prénom, un peu comme les Balle  qui nomment leur fils Jean !)

Et d’ailleurs, même Don avait une bonne raison et pas uniquement la jalousie ; amoureux transi de Selina, il menaça Gentry de le tuer parce que celui-ci se moquait très méchamment de la manière dont la jeune fille jouait du piano.

Bref, celui qui a tué Raymond Genty a fait œuvre de bienfaisance, mais cela reste tout de même un crime et un crime ne peut pas rester impuni ; le coupable doit être remis à la justice qui fera, on l’espère, son travail correctement.

Evadne Mount se mêle évidemment de tout, inutile de dire que l’ex-chef du Yard grince des dents à chacune de ses interventions, même si quelques-unes sont judicieuses.

Vous prenez un colonel à la retraite, son épouse et leur fille unique, un amoureux transi d’origine américaine, un vicaire de village et son épouse, un médecin de campagne également avec épouse, des amies de la famille, un secrétaire/gérant de domaine, un invité de dernière minute, un grenier fermé de partout, clé sur porte de l’intérieur, barres à l’unique fenêtre et, évidemment, le typique Noël anglais.

Une écrivaine de romans policiers mêle-tout et un brillant policier du Yard à la retraite…

Cela vous rappelle quelqu’un ? Bravo ! = Dame Agatha.

L’auteur écossais, Gilbert Adair, critique cinématographique,  journaliste et scénariste, s’est lancé avec délectation dans une trilogie mettant en scène « Evadne Mount », pastichant avec bonheur et infiniment d’humour les romans d’Agatha Christie dont il est un grand admirateur (tiens donc, lui aussi ?).

Parodiant les « whodunit » des années d’or du polar britannique, c’est-à-dire la période d’un genre littéraire classique, construit sur le même canevas, dans le même style d’écriture, le romancier a cependant écrit un roman avec intrigue originale, mais dans le style si particulier qui rendit Agatha Christie célèbre, avec même cette petite touche de xénophobie que l’on retrouvait dans ses romans.

Sans oublier le titre évidemment qui est une référence directe au livre « The Murder of Roger Ackroyd » et à un personnage d’un autre roman (Amy Murgatroyd, que l’on retrouve dans « A Murder is announced »).

Par ailleurs j’ai retrouvé avec beaucoup de plaisir la phrase du critique littéraire Edmund Wilson « who cares who killed Roger Ackroyd » ! – ce qui peut se traduire par : « on s’en fout de qui a tué Roger Ackroyd » ! – lui peut-être, mais certainement pas tous les lecteurs du roman. – Mr Wilson râlait sec en raison du succès du roman d’Agatha Christie et de l’engouement du public pour le genre policier. Vous comprenez : Edmund Wilson était un intellectuel.)

De plus, les références à d’autres écrivains de romans policiers sont nombreuses et je me suis beaucoup amusée à les retrouver.

Quant à « Evadne Mount », quel personnage ! elle semble directement copiée d’ « Ariadne Oliver » que les lecteurs de Lady Christie connaissent bien. Elle partage avec Miss Oliver l’habitude de se mêler de tout, de couper la parole au policier, de poser les questions à sa place et, de plus, se lance toujours dans des descriptions des crimes commis dans ses bouquins.

Bref Trubshawe a beaucoup de patience, mais aussi de l’humour face à la formidable vieille fille, dont les chapeaux sont aussi célèbres que ceux de son alter ego.

41QU4weLCxL__SL500_AA240_J’ai toujours un peu peur lorsqu’on m’annonce un « pastiche », tous ne sont pas réussis, mais là c’est du grand art, une espèce de « cliché » du genre du début à la fin. C’est bourré de clins d’œil, de bons mots anglais. C’est souvent hilarant, je me suis surprise à souvent rire tout haut, mes voisins de table à la brasserie avaient l’air un peu inquiet.

C’est tellement épatant que j’ai lu ce bouquin (assez court) en un jour et une nuit tant il était divertissant.

Dommage, ce n’est pas traduit en français, mais j'espère qu'un éditeur y songera, car réellement cela vaut d'être découvert.

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