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mon bonheur est dans la ville
17 juillet 2009

THE BRITISH ROYAL COLLECTION

engelandDe Bruegel à Rubens

L’événement de l’été artistique bruxellois, tant pour les touristes que pour les habitants de la Belgique, est la venue dans les musées des Beaux-Arts, de la collection de la reine Elisabeth II d’Angleterre. Il s’agit d’une sélection de peintures flamandes et hollandaises. Certaines de ces œuvres traversent le Channel pour la première fois.

Après Bruxelles, l’exposition pourra se visiter à Londres dans la Queen’s Gallery de Buckingham Palace.

Tous les tableaux de cette exposition ne m’ont pas intéressées ; même si Pierre Paul Rubens reste l’un de nos plus grands peintres, personnellement je ne suis guère attirée par ses portraits, ou par ses nus dont l’étalage de cellulite m’ôte désormais tout complexe.

Par contre, je savais – logique, c’est dans le titre – qu’il y avait aussi des tableaux de Peter Bruegel l’Ancien, que l’on pourrait comparer à ceux de son fils, Peter Bruegel le Jeune faisant partie de la collection permanente du Musée d’Art Ancien.

Dès l’entrée, une ligne du temps accueille le visiteur, énumérant les souverains du 15ème au 20ème siècles, indiquant ceux qui gouvernèrent les Pays-Bas Méridionaux.

Contexte historique de l’exposition 

Tous les tableaux sont nés dans les Pays-Bas Méridionaux, de 1500 à 1665, période particulièrement mouvementée dans ces régions.

Ces Pays-Bas comportent alors le territoire actuel des Pays-Bas, ainsi que ce qui est devenu la Belgique et une bande du Nord-Est français, formant une confédération de 17 provinces.

Sous Charles Quint, fils de Philippe Ier de Castille, dit le Beau et de Jeanne le Folle, le peuple des Pays-Bas se révoltera. Cette révolte va s’accentuer sous son fils Philippe II d’Espagne, catholique intolérant qui désire mater les provinces protestantes où catholiques et protestants vivaient pourtant en relativement bonne entente.

Cette révolte est connue sous le nom de la « Révolte des Gueux », qui est au centre du roman de Charles de Coster « Tijl l’Espiègle ».

Il s’en suivra alors une guerre de 80 ans qui mena à une scission définitive du Nord, devant la République (indépendante) des Provinces Unies, et du Sud  qui reste sous domination espagnole.

En 1600 le pire de la lutte est terminé et la trève de Douze Ans sera signée en 1609.

Un portrait de Charles V, jeune, est exposé ; il était destiné à Marie Tudor, sœur d’Henri VIII d’Angleterre (à ne pas confondre avec la fille du souverain qui portera le même nom). Dans le portrait, Charles Quint tient un brin de romarin à la main, symbole d’amour et d’amitié.

Le moins que l’on puisse dire à la vue de ce portrait, est que le jeune prince n’avait pas hérité de la beauté de son père ; son menton prognate lui causera bien des problèmes au fil du temps, notamment des problèmes dentaires ; il sera aussi affublé d’une salivation intensive qui le fera baver légèrement, sans oublier le défaut de prononciation.

Plus loin on découvre un émouvant portrait peint par Jan Gossart, celui des trois enfants de Christian II de Danemark après le décès de leur mère Isabelle.

La pâleur du teint des enfants contraste fortement avec les vêtements et le fond très sombres du tableau. L'intense mélancolie des petits visages contraste très fort aussi avec la richesse de leurs vêtements. Le peintre a fait magnifique travail de réalisme, les petits visages étant vraiment pathétiques; on a envie de serrer ces petits dans les bras afin de les consoler.

Parmi les peintres représentés, beaucoup de noms que je ne connais pas, tel Maarten van Heemskerck – le tableau exposé représente un homme sur son lit de mort ; le tableau représente la « parabole des 4 fins dernières » (mort, jugement divin, paradis et enfer).  La bouche de l’enfer est peinte sous la forme d’une énorme gueule de poisson béante, comme ce fut bien souvent le cas dans les peintures du moyen-âge ou fin du moyen-âge.

Je découvre avec émerveillement une minuscule huile sur cuivre, un paysage avec bergers de la main de Paulus Bril.

Enfin, j’arrive auprès des Bruegel tant « convoités » (en tout bien tout honneur).

« Le Dénombrement de Bethléem » et le « Massacre des Innocents », de la main de Peter Bruegel l’Ancien d’abord, ainsi que les copies réalisées environ 45 ou 50 ans plus tard par l’un de ses fils, Peter Bruegel le Jeune.

Dans les toiles peintes par le fils dominent les teintes brunes, foncées ; dans le « Dénombrement », sur ces couleurs hivernales tranche le manteau bleu de la vierge.

Selon la légende de Jésus racontée par Matthieu, le roi Hérode a fait massacrer tous les enfants de moins de trois ans, car on lui avait prédit l’arrivée du nouveau roi des Juifs.

Pieter Bruegel a toujours inséré les légendes bibliques dans ses tableaux représentant la vie des villages flamands.

Ainsi le « Massacre des Innocents » représente tout d’abord l’hiver particulièrement rigoureux de l’an 1564-65 dans les provinces du nord.

Le personnage central du groupe des soldats au centre du tableau est probablement le sadique duc d’Albe, gouverneur des Pays-Bas, envoyé par Philippe II pour mater les rebelles du nord ; il arriva chez nous à la tête de l’armée espagnole renforcée par des mercenaires allemands.

Le tableau peint par le père représente le massacre sous la forme d’une scène de pillage du village par la soldatesque. Pour atténuer l’horreur de la scène (et éviter d’être emprisonné pour sédition), Bruegel l’Ancien a modifié son tableau initial et représenté tous les enfants par des animaux de la ferme (oies, chèvres, agneaux).

Ces modifications retrouvées en analysant le tableau par les moyens modernes dont  disposent les musées et les experts d’art, font partie de l’histoire du tableau.

Les copies exécutées par Pieter Bruegel le Jeune, faites sur base des originaux avant que son père ne les modifie, montrent bien tous les détails des tableaux préalables, dénonçant l’oppression  dont souffrait le peuple sous Charles V et surtout sous son fils Philippe II.

Pieter Bruegel l’ancien appuyant la résistance.

Au visiteur est proposé un travail de « détective », soit tenter de retrouver les différences entre les tableaux peints par le père et les copies faites par le fils, trouver par exemple quel animal a remplacé un petit enfant égorgé ou poignardé.

Par ailleurs, les deux originaux du « Dénombrement » et du « Massacre », peints par Bruegel l’Ancien, sont nettement plus colorés, plus vifs que ceux peints par son fils.

Pieter Bruegel adorait peindre des kermesses, des manifestations populaires que Philippe II d’Espagne essaiera d’interdire, considérant qu’elles constituaient des foyers de rebellion.

Une très belle fête de village peinte par un autre fils Bruegel, Jan, est également exposé.

Un autre peintre flamand, Frans Pourbos, est à l’honneur avec ses portraits en pied des archiducs Albert et Isabelle ; elle était infante d’Espagne, fille de Philippe II d’Espagne, petite-fille de Charles V.

Albert et Isabelle seront co-régents des Pays-Bas Méridionaux. Lorsque son époux meurt, Isabelle continue à gouverner seule ; elle romp avec le régime espagnol oppressif.

Les archiducs apporteront la stabilité à la région et signeront la fameuse trêve de Douze Ans, période qui apportera à la région un espoir de paix, qui se retrouve dans la peinture de l’époque.

150px_Rubens_self_portraitA côté de portraits et autoportraits, Pieter Paul Rubens honore l’exposition avec deux magnifiques grands tableaux, généralement associés bien que ce n’ait pas été le but du peintre. Cela permet de découvrir le talent de paysagiste de ce peintre qui sera surtout connu pour ses portraits, pour la magistrale Assomption de la Vierge, dont l’esquisse se trouve dans l’exposition, et surtout pour les tableaux à la gloire de Marie de Medicis (qui se trouvent au Louvre).

« L’été » propose un matin, jour de marché, où de très beaux contrastes de lumière pour figurer l’aube du jour qui pointe. « L’hiver » montre le quotidien d’une ferme alors que le paysage enneigé contraste avec les tâches dans la grange et la famille réunie autour d’un feu.

12_20Peter_20Paul_20RubensDe la collection personnelle du peintre, on trouve aussi « La ferme à Laeken », très joli tableau, plein de sérénité. A l’époque de Rubens, Laeken était un hameau rural proche de Bruxelles et la paix du tableau évoque bien l'espoir de paix que constitue la trêve.

Avec beaucoup d’humour, Frans Francken II, peintre du 17ème siècle représente une scène d’objets d’art détruits par des iconoclastes protestants représentés avec des têtes d’ânes pour figurer leur bêtise.

Les iconoclastes protestants encouragés par leurs chefs, notamment Calvin, détruiront des représentations religieuses, en se basant sur le troisième commandement : « tu ne feras pas d’image taillée ».

Finalement une salle est consacrée aux trois grands noms de la peinture flamande : Rubens, Van Dyck et Jordaens ; les œuvres de jeunesse d’Antoon van Dyck et Jakob Jordaens témoignent de l’influence que leur maître, Rubens, aura sur ses deux élèves.

J’ai encore apprécié la sympathique et truculente kermesse de St-Joris, peinte par David Teniers II, le Jeune, mais je l’avoue, j’ai surtout apprécié les Bruegel père et fils qui étaient le but principal de ma visite. Je suis peu sensible aux scènes religieuses et aux portraits. Toutefois j’apprécie le fait que cette exposition m’ait permis de découvrir quelques intéressantes œuvres de paysages peintes par des maîtres flamands des 15ème, 16ème et 17ème siècle.

Toutefois, j’ai toujours trouvé assez indécent les collections de peinture privées ; j’estime que toutes les œuvres devraient figurer dans les musées, afin d’être découvertes et admirées par tout le monde.

Acheter des tableaux pour investir et puis laisser dormir dans des coffres, c’est carrément obscène ! Que ce soit une collection royale ou une autre. L'art appartient au peuple.

Une dernière chose, j’aimerais signaler aux visiteurs d’une exposition quelle qu’elle soit, qu’on ne fait pas marche arrière sans avoir préalablement regardé si personne n’était derrière soi – mes orteils les en remercient à l’avance. Ils ont eu à souffrir particulièrement au cours de cette visite en raison de visiteurs ne jugeant pas nécessaire de vérifier s’il n’y avait pas quelqu’un derrière eux.

15_20Anthony_20Van_20Dyck   Brill_Paul    engeland

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