CORPUS DELICTI
Le corps du délit, au sein du corps de la justice ... une autre manière de regarder l'art contemporain
L’art contemporain ou conceptuel (comme il s’appelle désormais dans les écoles d’art) n’est vraiment pas ce que je préfère.
Ceci dit, ne pas aimer quelque chose ne signifie pas que ce soit nécessairement mauvais, simplement chacun a sa propre perception des choses et on ne peut en tout cas pas reprocher aux artistes d’art contemporain de manquer d’humour, comme le montrent certaines œuvres exposées.
Je n’avais pas l’intention d’aller voir cette exposition, sachant à quel point l’art contemporain m’intéresse peu – seulement j’ai bien aimé la démarche exprimée par les commissaires praticiens des arts actuels d’exposer les œuvres dans le palais de Justice de Bruxelles, afin que le public puisse aussi réaliser dans quel cadre travaillent ceux qui sont au service de la justice.
Le palais de Justice, pas vraiment beau de l’extérieur, a une sorte de magie intérieure tendant au mystère et au gothique, du moins à mes yeux – je ne suis pas certaine que les huissiers, avocats, juges et autres employés le voient de ce même regard ; si c’est un lieu présentant un certain attrait à la curieuse que je suis, je doute que cela soit tellement excitant d’y traîner ses chaussures tous les jours dans le cadre d’un travail qui n’est pas souvent drôle.
L’intérêt de cette exposition – à mes yeux – fut de pouvoir se promener dans tous les couloirs et méandres du palais, aux différents étages où étaient disséminées les œuvres des artistes dont certaines venaient de leur collection personnelle ou de musées d’art contemporain. Le but de l’exposition fut dont de disposer les œuvres dans un lieu « parlant » pour ladite œuvre ; c’est-à-dire placée là même où l’on juge certains cas.
Quelques-unes des images mises dans mon article sont des photos prises par moi, d’autres ont été trouvées sur le site de l’exposition. On reconnaîtra rapidement la différence de qualité entre mes travaux personnels et les photos prises par des pros, comme celle du dôme que j’aime particulièrement prise de l’intérieur.
Parmi les artistes exposés, pour n’en citer que quelques-uns : Pascal Bernier, Guillaume Bijl, Patrick Corillon, Leo Copers, Edith Dekyndt, Marie Delier, Wil Delvoye, Michel François, Sofie Muller, et parmi les plus connus : Jan Fabre, Maurice Frydman et Panamarenko. Je ne cite pas toute la liste, car elle est longue mais toutes les œuvres et tous les artistes sont dignes d’intérêt même si on n’aime pas nécessairement cette forme d’art.
A propos du palais de justice de Bruxelles
On le dit plus vaste que la basilique St-Pierre à Rome ! Il domine le centre de Bruxelles, tout comme la basilique de Koekelberg domine le nord de la ville.
Les travaux du palais débutèrent sous le roi Léopold Ier, il fut inauguré fin 19ème siècle en présence de son fils, Léopold II.
On rasa un quartier entier – mal famé paraît-il, mais je n’étais pas née pour infirmer ou confirmer cette information - afin de faire de la place pour sa construction. Les petites gens qui furent alors déplacées traitèrent l’architecte Joseph Poelart de « schieven architekt ». Inutile de me demander de traduire, il s’agit de patois marollien ; cela signifie textuellement « architecte de travers », mais en fait cela signifie quelqu’un de pas très honnête. D’ailleurs l’expression existe toujours et peut être considérée comme une insulte suprême par ceux qui connaissent encore ce patois marollien très savoureux et que j’ai le plaisir de connaître.
Une fois de plus, le palais de justice est entouré d’échafaudages car il semblerait qu’il ait à nouveau besoin qu’on lui fasse sa toilette : la pollution bruxelloise salit particulièrement les pierres blanches.
Si extérieurement, la construction est « fournie » avec ses colonnes, pilastres, entablements, l’intérieur est surtout composé de « vide » ; les prétoires ne sont pas très bien aménagés, rien n’est vraiment commode dans cet endroit.
D’ailleurs le but avoué de Poelart ne fut pas de réaliser un lieu pratique, mais bien un lieu impressionnant ; pour Poelart, la justice se doit d’être écrasante.
Ce lieu géant, ainsi que les différents symboles que l’on peut y trouver, ont inspiré de multiples artistes parmi lesquels François Schuiten.
Selon certains, ces symboles truffant le bâtiment ont une signification pour les initiés et, même à l’heure actuelle, des réunions secrètes se tiendraient encore au sein du palais ; s’agit-il d’entretenir le mystère en l’alimentant de légendes ou est-ce vrai ?
Je l’ignore mais au risque de me répéter, pour moi c’est vraiment un endroit très mystérieux, empreint d’une ambiance particulièrement gothique et je verrais bien un écrivain d’urban fantasy comme Neil Gaiman y trouver source d’inspiration pour l’un de ces romans dont il a le secret.
Bref un lieu inédit pour des œuvres originales, souvent surprenantes, parfois amusantes, dont celles-ci furent mes préférées pour leur humour (volontaire ou non) =
Je vous ajoute aussi quelques statues qui sont en permanence dans le palais et qui sont tout sauf de l’art actuel, quoique cette belle plaque de marbre a totalement sa place dans une expo d’art conceptuel – on la regarde et on en tire ce que l’on veut.
En guise de conclusion, je n’ai pu m’empêcher de constater qu’on laisse les gens circuler dans les coins et recoins du palais, sans que cela ne pose le moindre problème ; chacun a pu tout prendre en photos, pas seulement les œuvres d’art exposées, mais aussi tous les petits coins du palais sans être le moins du monde interpelé par un quelconque représentant de la surveillance. Pas étonnant que l’on s’évade si facilement de ce palais de justice si l’on a quelques complices bien entraînés !