BRENDAN ET LE SECRET DE KELLS, de Tomm Moore & Nora Twomey

Brendan et le secret de Kells
envoyé par asblCinergie

Scénario et dessins de Tomm Moore.

Au 9^ème siècle de notre ère, Brendan est un jeune moine un peu rêveur, d’environ 12-13 ans. Son oncle, l’abbé Cellach, est un homme sévère, parfois dur avec le jeune garçon qu’il veut à tout prix protéger des païens et des barbares vikings qui ont envahi et saccagé la grande Bretagne et s’avancent désormais vers l’Irlande.

Brendan rêve de devenir enlumineur, comme les moines venus des quatre coins du monde, hélas pour l’instant la priorité de l’abbé est la construction d’un mur de protection autour du village et de l’abbaye de Kells. Et si Brendan désobéit, point de scriptorium ! pourtant aux dires des autres enlumineurs, le jeune garçon est réellement très doué, mais l’oncle ne veut rien entendre ; si Brendan doit lui succéder un jour à la tête de l’abbaye, il a des responsabilités à apprendre. Et le jeune garçon qui aime son oncle n’ose guère désobéir malgré cette forêt hors près de l’abbaye qui le fait rêver.

Un jour arrive d’Iona, l’île du grand Colomba (le saint qui christianisa l’Irlande et l’Angleterre) le non moins célèbre et âgé frère Aidan, l’un des plus grands enlumineurs de son époque, gardien du « livre » (et accompagné de son joli et coquin chat blanc). A Iona tout a été brûlé et détruit par les vikings. Le temps presse donc pour la muraille de protection, mais pour Brendan, la rencontre avec frère Aidan est décisive et lorsqu’il regarde les pages du livre, il est ébloui par les merveilles qu’il y voit.

Aidan lui demande d’aller en forêt afin de ramener des baies pour en faire de l’encre ; malgré la défense de l’abbé de sortir de l’abbaye, le jeune garçon s’avance dans la forêt où il est sauvé par d’une horde de loups par une belle louve blanche.

Peu après, il rencontre Aisling, une sylphe aux jolis yeux verts. D’abord rétive et se moquant de ce garçon qui ne sait rien de la nature, la petite fée des bois lui fait ouvrir les yeux sur les beautés qui l’entourent et finalement lui montre l’arbre dont elle a besoin. A deux pas, il y a des pierres, très sombres, qui font très peur à Aisling. Là vit un dieu-serpent, un dieu-démon qui a détruit toute sa famille.

Hélas, les pires prévisions de Cellach vont se concrétiser et les vikings vont tout détruire y compris le mur de protection. L’abbé est grièvement blessé en protégeant la fuite de ce neveu qu’il aime mais à qui il n’a pas su le montrer. Brendan et Aidan fuient, emportant le livre de Kells. Arrivés dans un lieu protégé, Brendan va pouvoir finir le livre merveilleux et, si possible, le ramener à l’abbaye.

Enfin ! un VRAI dessin animé, comme je les aime, en 2D avec non seulement une histoire intelligente mais aussi et surtout de très beaux dessins, de très jolies images.

Le style est proche des enluminures (un peu comme le firent en leur temps les studios Disney avec « Mulan » et « Hercule » - en respectant un peu l’ « origine et le style d’époque »). Les dessins, les couleurs, sont véritablement formidables, on dirait presque un vitrail par instants.

L’histoire n’est pas du tout prêchi-prêcha bien qu’il s’agisse d’une histoire tirée de l’Histoire de l’Irlande chrétienne, mais avec des restes de légendes celtiques représentées par Aisling, petite figure mystérieuse et attachante.

Avec des images qui pourraient effrayer lorsqu’il s’agit de montrer les barbares car le réalisateur n’a pas eu envie de faire un film où toute méchanceté, toutes peurs, sont exclues.

Et je suis d’autant plus heureuse qu’il s’agit là d’une co-production européenne = irlandaise, française, polonaise et BELGE – oui oui, je sais là je suis en plein chauvinisme primaire, mais faire un pied de nez aux studios Disney me plaît beaucoup depuis que ceux-ci ont carrément licenciés les dessinateurs de la 2D parce que les directeurs des studios veulent mettre l’accent sur la 3D.

Je ne suis nullement opposée aux films d’animation en 3D, je sais que c’est « l’avenir » du cinéma, mais était-ce bien nécessaire pour cela de ne plus garder des spécialistes du dessin animé ?

oui, je sais vous allez m’argumenter que je ne comprends rien au progrès, à la demande du marché et blablabla et blablabla.

Tant pis, que l’on me traite donc de dinosaure, cela m’est bien égal, j’adore les vrais dessins animés et surtout lorsqu’ils sont de la qualité de « Brendan et le secret des Kells ». D’ailleurs, par ce défi, le réalisateur a voulu s’insurger contre la dictature de la 3D justement, c’est dire si je me sens solidaire !

Il a fallu à Moore-Twomey une équipe de 200 personnes pendant deux ans pour mener à bien ce petit chef d’œuvre d’animation (je ne me lasse pas de répéter le mot chef d’œuvre).

En plus, c’est une histoire qui ne prend pas les enfants pour des arriérés profonds, comme dans le suave  « Bolt », chien-chien à sa mèmère, sans peur et sans reproche qui traverse les USA pour la revoir, et qui copie une bonne série de scénarios d’autres films.

J’aime bien la philosophie du scénario : vaincre sa peur pour franchir parfois certaines limites, il faut parfois savoir désobéir pour s’ouvrir au monde, ne pas se replier sur soi. Par instant, le film m’a fait penser à l’un des contes de Gianni Rodari, l’écrivain italien qui aimait les enfants, conte intitulé « la strada che va da nessuna parte ».

Ici aussi il s’agit d’un voyage initiatique au pays de l’imaginaire, de l’imagination et du passage de l’enfance à l’adolescence, jusqu’à ce que l’on devienne adulte.

Les studios qui ont aidé Tomm Moore & Nora Twomey à produire le film sont ceux à qui l’on doit « Les Triplettes de Belleville », « Azur & Asmar », « Kirikou ».

Les voix françaises sont celles de Fédor Atkine pour l’abbé Cellagh, Clara Poincaré donne voix à Aisling et les voix de Brendan enfant et adulte sont respectivement celles de Robin Trouffier et Emmanuel Garijo.

Le malicieux frère Aidan, l’enlumineur âgé pressé de transmettre son savoir au jeune garçon et le poussant donc à une certaine désobéissance, a la voix de Dominique Collignon-Maurin.

J’aimerais que tout le monde courre voir le film et y emmène ses enfants, quelle superbe idée ce serait.

Que du bonheur !

Pour ceux que l’histoire intéresse, celle qu’on écrit généralement avec une grande « H » (oui, il y a un jeu de mots car l’histoire s’est écrite dans le sang), le « Livre de Kells » et l’abbaye, ont réellement existé.

Le livre, aussi appelé « le Grand Evangéliaire de St-Colomba » est considéré comme le chef d’œuvre du christianisme irlandais ainsi que de l’art irlandais et saxon. Il est considéré comme l’une des plus belles pièces de l’art médiéval.

Il tient son nom de l’abbaye de Kells, dans le comté de Meath en Irlande, fondée par le même Colomba.

Le Livre de Kells se trouve désormais au Trinity College de Dublin, la plus ancienne université irlandaise, fondée par Elizabeth Ière d’Angleterre et construite sur le modèle d’Oxford et Cambridge.

   

Oh et à propos, vous savez quoi ? John Lassiter le roi de la 3D chez Disney a demandé à Tomm Moore s’il pouvait voir son dessin animé …

Comments

[maggie]

@ Niki : je savais que l'animal de "l'autre monde celtique" était blanc mais j'apprends qu'il a en plus des yeux vairons ! Je connais très mal cette culture, qu'à travers les vestiges qu'il y a dans les romans arthuriens... encore un territoire à explorer (ou plutôt une époque ! mais maintenant, j'ai bien envie d'aller Dublin :-)).

PS : avant de lire quoi que ce soit sur les celtes, je vais apprendre à écrire, j'espère que les erreurs sont dues à une écriture rapide et que l'ordinateur n'a pas pris toutes les lettres !!! :-(

PS 2 : J'ai déjà eu des commentaires avec des fautes tous les mots et ça m'horripile !

[niki]

l'abbaye fut un haut lieu de piété au moyen-âge

le livre de kells est désormais à dublin, hélas la file est bien longue pour le découvrir



les yeux de couleurs différentes chez les chats (et les humains) est un mythe celte prouvant que les "esprits bénéfiques ou maléfiques" sont parmi nous - en principe, celui qui a des yeux vairons est probablement un de ces esprits ;)

[maggie]

J'ai bien aimé même si la 2 d me faisait mal au yeux ! On n'a pas trop l'habitude de voir sur une même image sans perspective, des images frontale et vue de dessus... J'ai beaucoup apprécié le graphisme, celui qui se rapproche des vrais enluminures du grans évangéliaire de saint Colomba. PS : merci de m'apprendre que l'abbaye et le livre de Kells ont vraiment existé.... PS 2 : j'adore le chat blanc (mais avec un oeil vert et l'autre bleu ????)