PRANZO DI FERRAGOSTO, de Gianni di Gregorio

16 septembre 2011

Titre français = Le Déjeuner du 15 août
Titre anglais = Mid-August Lunch

Scénario de Gianni di Gregorio & Simone Riccardini

Gianni, sans emploi, vit avec sa mère très âgée, qui a constamment besoin de lui. Gianni a une ardoise à peu près partout – mais c’est surtout le loyer de l’appartement et autres frais comme l’électricité qui sont la grosse facture.
Arrive Alfonso, le syndic de l’immeuble, avec une liste de revendications des propriétaires de l’immeuble désireux de mettre à la porte ce locataire impécunieux. On est à la veille de « ferragosto », l’un des week-ends les plus importants en Italie – dîners familiaux, transhumance vers la côte ou la campagne, bref les villes sont totalement vides.
Tout le monde veut en profiter, y compris Alfonso. Sachant que son locataire sera de toute façon « coincé » par en ville, s’il acceptait de garder aussi Marina, sa mère à lui, il pourrait rejoindre sa famille dans une ville thermale – ceci en échange d’apurer absolument toutes les dettes de Gianni. Devant une telle offre, celui-ci accepte et arrive aisément à convaincre sa mère.

Lorsqu’arrive Marina, elle est accompagnée de sa sœur, zia Maria, un peu effacée, qui commence à taper sur les nerfs de la mère de Gianni. Mais la mère de Gianni est une brave femme et bien vite elle fait amende honorable et ces dames se retrouvent dans sa chambre pour papoter.
Arrive alors le médecin de Gianni, qui sous promesse de soins gratuits, lui demande de garder sa maman à lui, avec une longue liste de médicaments à ne pas oublier de prendre et surtout de respecter son alimentation (légumes, surtout légumes et surtout pas de laitages).

Le premier soir, Gianni parvient à raisonner ces dames, mais bien vite elles vont se comporter comme des gamines indisciplinées.

Grazia, la maman du médecin, la plus douce et la plus sage, va dire « m**** » à son régime de légumes/eau minérale, et Marina, la mère du syndic, va partir faire la fête au bal populaire, où elle va boire et fumer comme bon lui semble, na !
Inutile d’ajouter qu’aucune d’elles n’aura envie que se termine ce week-end le lendemain, lorsque leurs fils respectifs viendront les rechercher.

Histoire touchante et drôle à la fois que ce « Pranzo di Ferragosto », basée sur les souvenirs personnels du scénariste-réalisateur. On s’émeut sans verser des larmes et on sourit beaucoup. On ne rit pas aux éclats car c’est assez poignant de réaliser à quel point ces vieilles dames se sentent généralement fort seules et sont tout à coup tellement contentes de se découvrir entre « bonnes copines ».

Le réalisateur a – tout comme son personnage – vécu pendant un certain nombre d’années auprès de sa mère veuve âgée après son divorce. C’est alors qu’il a pu se rendre compte de la vulnérabilité mais aussi de la vitalité des « vieux », c’est cela qu’il a tenté de faire passer dans son film et croyez-moi, il y arrive très bien. Pas facile à partir d’un certain âge de vivre dans un monde où le jeunisme prime sur tout.
Le film est d’autant plus personnel que le syndic de son immeuble lui a réellement demandé de garder sa mère à lui pendant les vacances du 15 août afin d’apurer une dette !

C’est parce qu’il ne trouvait personne pour réaliser son histoire que Gianni di Gregorio décida de réaliser son film lui-même, et je pense qu’il a très bien fait car on a un peu une impression de « film de famille », de ces films que l’on tourne lors des fêtes familiales afin d’avoir de bons souvenirs.

Gianni di Gregorio a décidé de quitter le théâtre et se lancer dans l’écriture cinématographique après avoir vu « Mean Streets » de Martin Scorsese ; après des débuts d’assistant-réalisateur, il s’est mis à l’écriture de scénarios dont certains furent primés. Il a notamment remporté le grand prix du festival de Cannes pour « Gomorra » de Matteo Garrone (qui produit ce film-ci). « Pranzo di Ferragosto » a remporté le « Luigi di Laurentis » pour première réalisation au festival de Venise 2008.

Côté distribution, le réalisateur s’est octroyé le rôle de Gianni, et les 4 « actrices » interprétant ces dames n’étaient pas du tout des professionnelles du théâtre ou du cinéma, je pense – comme le réalisateur – que l’effet de vérité de l’histoire vient aussi de cela.

Grazia Cesarini Sforza, qui interprète Grazia la mère de Gianni, a été ravie de l’expérience, surtout de ne rien savoir à propos de l’histoire et de la manière dont tout se termine ; Marina Cacciotti, mère du syndic, a déclaré avec beaucoup d’humour « espérer une longue carrière cinématographique après ce coup d’essai ». Les 2 autres « actrices », Valeria De Franciscis et Maria Cali espèrent également réitérer l’expérience.

Alfonso Santagata interprète Alfonso, le syndic qui amène à la fois sa mère et sa tante chez son locataire, Marcello Ottolenghi interprète le médecin qui confie aussi sa maman à son patient en échange de soins gratuits. Quant à Luigi Marchetti, il interprète « Vichingo », le copain de Gianni, grâce à qui il pourra offrir un superbe repas de « Ferragosto » à ces/ses dames.

Un film court – ce n’est pas le moindre de ses qualités car en une heure et quart tout est dit et le réalisateur n’a pas jugé nécessaire de tirer tout cela en longueur, bravo !
C’est plaisant à voir, cela louche du côté du social sans en avoir le côté barbant, voire moralisateur, cela fait aussi réfléchir sur la condition d’être âgé et souvent « mis au rencart » par des fils ou des filles plus désireux de se distraire que de se coltiner un parent âgé.

Posté par sheherazade2000 à 08:30 - Commentaires […] - Permalien [#]