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mon bonheur est dans la ville
9 septembre 2009

THE SIGN OF THE CROSS, de Cecil B. DeMille

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Rome brûle ! l’empereur Néron, au balcon de sa magnifique villa regarde sa ville se consumer dans les flammes en déclamant des vers de la « Chute de Troie », pendant que Poppée prend son habituel bain de lait qui est censé la préserver des rides et du vieillissement corporel.

Alors que son favori, Tigellin, vient le prévenir qu’il faut s’en aller car la villa va bientôt être la proie des flammes, l’empereur sournoisement suggère de faire porter le chapeau de l’incendie à cette nouvelle secte, les chrétiens, qui parle d’un monde nouveau où tous seraient égaux et s’aimeraient – on n’a jamais vu ni entendu de telles inepties !

Aussitôt dit, aussitôt fait et grâce aux récompenses promises, la délation va bon train dans les rues de la ville. C’est ainsi qu’un certain Titus, ami de l’apôtre Paul, arrive chez des amis.

L’un d’eux a recueilli la jolie Mercia à la mort de ses parents ; alors que la foule veut les arrêter, arrive le préfet de Rome, le noble Marcus Superbus (le superman de l’antiquité en quelque sorte !) ; à peine a-t-il porté les yeux sur Mercia qu’il ne pense plus qu’à une seule chose, l’avoir pour lui. Du coup il fait libérer les trois chrétiens, ce qui pourrait lui valoir de gros ennuis. Ceux-ci ont l’intention de se réunir clandestinement durant la nuit et afin de connaître le lieu, Tigellin fait arrêter le jeune Stephane qui est torturé et qui avoue.

Marcus tente de s’opposer à l’arrestation, mais Tigellin lui fait comprendre qu’il sera alors un traître à Rome ; qu’importe, Marcus se rend chez Néron et tente de faire fléchir son empereur, seulement Poppée (qui est amoureuse de Superbus) fait en sorte que l’empereur refuse.

Le jeune préfet a cependant fait venir la jolie chrétienne chez lui dans l’espoir d’en faire sa concubine … quelle horreur, quelle atteinte à sa vertu, comment ose-t-il ? Elle veut absolument rejoindre les chrétiens arrêtés qui seront bientôt jetés dans le cirque. Et en plus, ils y vont en chantant … bon, peut-être pas tous, mais la plupart.

Mercia a été arrêtée chez Marcus par Tigellin, trop content à l’idée que l’on se débarrassera de cet homme que tout Rome admire. Marcus désespéré recherche l’objet de son désir dans les prisons du forum et lorsqu’il la retrouve, il lui conseille d’abjurer sa foi pour qu’elle soit libre – mais d’où il sort, ce type ? Il n’a rien compris : un chrétien se doit de mourir avec les autres et Mercia croit en la vie éternelle auprès du sauveur.

Soudain Marcus a une illumination – mais si, mais si – ok : il ne croit pas en dieu, mais si Mercia est convaincue qu’il y a une vie éternelle après la mort, ils seront donc éternellement réunis ?

Ok, du coup, il y croit aussi. Et voilà comment on transforme un philosophe athée en un martyr béni oui-oui, un gars qui réfléchissait, avec une pointe de cynisme, devient tout-à-coup quelqu’un qui croit sans se poser de questions. C’est ça le miracle de l’amour.

Que l’on se rassure, je ne suis pas dans une période mystique, ni en train de songer à me convertir ou d’envisager d’entrer dans les ordres (quoique f***** le bordel dans un couvent, ça me botterait assez …).

Le hasard a mis sur ma route plusieurs films à connotation religieuse, mais c’est parce que je suis « totally fan » du cinéma de jadis, qu’ils soient ou non des classiques de l’écran.

jaquette_95338Après avoir visionné « The Greatest Story ever told » qui mettait en scène la vie du christ, qui semble avoir été fait  pour illustrer les paroles du nouveau testament et pour réunir un maximum de vedettes dans un seul film (je vous le redis : John Wayne en jupette de centurion avec accent texan ! je n’aurais voulu raté ça pour un empire … romain évidemment !), j’ai eu le plaisir de découvrir à la médiathèque dans la section « classiques de l’écran) ce « Sign of the Cross », réalisé par Cecil B. DeMille, grand catholique devant l’éternel !

Alléchée par le fait que dans la distribution figuraient Claudette Colbert en Poppée et Charles Laughton en Néron, j’ai donc loué le film ; « figuraient » était bien le terme qui convient malheureusement car ils apparaissent assez peu dans ce film de deux heures et pourtant leurs personnalités étaient nettement plus intéressantes que les deux protagonistes principaux que l’on doit supporter pendant environ 2 heures.

Pas que Fredric Marsh – en Marcus Superbus (ça, ça ne s’invente pas !) - ait été un si mauvais choix, mais dans les années 30, son jeu était encore un peu caricatural ; il faut dire qu’on sortait du muet, où il fallait jouer d’une certaine manière pour se faire « comprendre ». En plus, il est maquillé comme Rudolph Valendino et cela donne un effet assez surprenant – genre « grande folle » jouant les mâles. Il est cependant nettement plus « naturel » en tenue de patricien qu’en tenue de soldat romain.

L’objet de son désir (et ensuite de son amour très pur, oui bon c’est du cinéma) est une jeune actrice italienne – Elissa Landi - qui serait une descendante, paraît-il, de l’empereur François-Joseph ! Elle aussi interprète le rôle de la jolie Mercia avec de nettes attitudes, reliquats du muet ; son maquillage est « au naturel », en contraste avec la très belle Claudette Colbert en Poppée.

jaquette_95341Celle-ci, dans un rôle moins long, lui vole complètement la vedette et on se dit que March/Superbus a du mérite de lui résister car elle a de ces attitudes et regards lascifs qui en disent long. Elle est une Poppée plus vraie que nature et on sent déjà sa « Cléopâtre » qui pointe à l’horizon, rôle qu’elle interprétera pour ce même B. DeMille deux ans plus tard.

Le célèbre scène du bain de lait de Poppée sera un signe non pas de croix mais de décadence aux yeux des bien-pensants qui voteront avec plaisir le fameux code de censure Hays, au travers duquel Cecil B.DeMille qui en était l’instigateur passera tout de même afin de réaliser sa séduisante reine d’Egypte (comme quoi : faites ce que je dis mais pas ce que je fais !)

Il faut dire que cette scène du bain est particulièrement osée puisque Poppée invite une amie à la rejoindre dans son bain. Elle-même joue avec le lait du bain de manière plus que provocante, pendant qu’à l’extérieur, de malheureux serviteurs passent leur temps à traire les ânesses et transbahuter le lait sur des escaliers difficiles à monter. Contraste entre la douleur des humbles pour satisfaire le plaisir des riches, selon DeMille.

A propos de ce lait : ce n’était évidemment pas du lait d’ânesse que les studios utilisèrent mais du lait en poudre, qui caillera tout de même pendant la nuit après avoir été exposé toute la journée sous les spots très chauds ; il paraît que l’odeur était telle que les acteurs faillirent s’évanouir.

Au tour de Charles Laughton à présent (tout de même l’une des deux raisons de cette location) : comme l’explique un historien du cinéma (que j’ai quelque part dans un bouquin sur Hollywood), il était courant à Hollywood d’engager un Anglais pour interpréter un rôle antipathique. Comme cela, les acteurs américains n’interprétaient que des types sympas !

Laughton était ravi de jouer ce Néron et même si sa performance n’égale pas celle de Peter Ustinov dans « Quo Vadis ? » 20 ans après,  il donne tout de même un savoureux portrait de l’empereur décadent ; loin d’être un canon de beauté selon les normes hollywoodiennes, l’acteur joue de son côté un peu grassouillet pour en faire un Néron lascif et vicieux. Excellente performance, mais trop courte à mes yeux.

Pour en revenir au sujet même de ce « Signe de la Croix » - que soit dit en passant on retrouve de multiples fois dans le film, pour bien nous le faire entrer dans le crâne, de quoi virer définitivement mécréant - il fait bien entendu complètement penser au « Quo Vadis ? » d’Henryk Sienkiewicz.

On s’est d’ailleurs toujours demandé si Wilson Barrett, auteur de la pièce en 1895, n’aurait pas écrit une adaptation du roman de Sienkiewicz qui était son contemporain. « Quo Vadis » sera adapté au début des années 50 mais se terminera de manière quelque peu moins sombre (pas pour les lions privés de breakfast).

Dans l’esprit de Cecil B. DeMille, son film devait aussi dénoncer la cruauté innée chez les humains, c’est pour cela qu’au milieu de la barbarie romaine vis-à-vis des chrétiens, on trouve des scènes de la vie de tous les jours : un jeune couple qui se regarde les yeux dans les yeux pendant que les gladiateurs se saignent à blanc, un autre couple plus âgé se disputant parce que le mari n’a pas obtenu de bonnes places pour voir l’arène, des commentaires sur les soirées mondaines, etc.

jaquette_95335La 2ème partie du film, complètement consacrée au martyre des chrétiens, foisonne de détails de ce genre ; j’avoue avoir été sidérée par la cruauté de certaines scènes : un gamin que l’on torture au fer chauffé à blanc pour le faire parler, des alligators qui viennent déchiqueter une ravissante créature (à ce propos, les alligators ne sont dangereux que dans l’eau !), des éléphants qui marchent sur des corps attachés au sol, un gorille libidineux qui se dirige vers une jeune vierge, et quelques autres de ce style – ceux qui n’avaient d’ailleurs pas du tout l’air d’aimer cette histoire étaient les lions, ils étaient particulièrement agressifs entre eux. Pauvres bêtes.

Quant aux dates, je crois que les scénaristes ont eu un problème : Rome n’a pas été incendiée par Néron en l’an 61, mais en l’an 64 – bon, à quelques jours près, on ne va pas faire des difficultés (on le sait, les Américains adorent « jouer » avec l’Histoire, il suffit de voir ce qu’ils ont fait de la vérité historique dans « The other Boley girl » ou dans la série télé « The Tudors » qui cartonne).

Pour ce qui est de l’incendiaire, on n’est même plus sûr que cela ait été le fait de Néron qui rêvait de construire sa « Neropolis » parce que Rome lui était devenue sale et laide.

Quant au fameux signe de la croix qui aurait été le signe de reconnaissance des chrétiens alors qu’ils n’avaient pas le droit d’exercer leur religion, c’est complètement erroné également puisque ce signe de reconnaissance était un poisson stylisé.

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