LA PISCINE, de Jacques Deray

Dans le sud de la France, dans les collines près de St-Tropez, Marianne et Jean-Paul passent leurs vacances dans une superbe villa d’amis. Les jours d’été sont torrides et se passent paresseusement au bord de la piscine.

Un coup de téléphone interrompt les jeux des deux amants ; c’est Harry qui annonce son passage dans la région ; il vient les saluer et leur présenter sa fille.

Imperceptiblement, l’atmosphère entre Marianne et Jean-Paul se tend. Avant elle vivait avec Harry qui est un ami de longue date de Jean-Paul. Ce dernier semble devenir jaloux, ce qui amuse sa compagne qui du coup jouera un petit jeu dangereux.

Débarquent donc dans le fracas de son nouveau bolide, le jovial Harry et la nettement moins joviale Pénélope, 18 ans, absolument ravissante et manifestement pas réjouie d’être là.

Marianne spontanément leur propose de rester quelques jours ; elle ne réalise pas encore qu’elle vient de commettre une erreur irréparable dont non seulement son couple ne se relèvera pas ou alors très mal, mais qui coûtera la vie à Harry.

Harry a subtilement manipulé l’entente entre Marianne et Jean-Pierre ; sa complicité avec la jeune femme choque d’ailleurs profondément Pénélope qui ne porte pas son père dans son cœur. Il est vrai que pendant 17 ans, il l’a ignorée et puis là, c’est le tour d’Italie, de France, bref le tour de tout le monde pour la montrer comme un petit animal de foire. On comprend que l’adolescente ne soit pas vraiment heureuse dans cette situation. Sa grâce et son petit air perdu attirent de plus en plus Jean-Paul.

Et puis, un soir où l’on boit trop et c’est le drame.

L’inspecteur chargé de l’enquête est convaincu que la mort d’Harry n’est pas accidentelle, seulement il n’y a guère de preuve du contraire. Affaire classée… ou non.

« La Piscine » de Deray signe les retrouvailles à l’écran du couple mythique Delon-Schneider, après 5 ans de séparation. (En 1964 Alain Delon et Romy Schneider se séparent ; un peu après, Romy épouse Harry Meyen, Alain Delon épousa Nathalie, mère de son fils Anthony.)

Le film signe également les retrouvailles entre Alain Delon et Maurice Ronet, neuf ans après « Plein Soleil » de René Clément. Ici aussi, ils sont un duo de charme qui à leur manière perverse se battent en duel pour les femmes.

« La Piscine » marque aussi la rencontre entre le réalisateur Jacques Deray et l’acteur Alain Delon ; ils ne tourneront pas moins de 9 films ensemble, dont les célèbres « Borsalino », « Flic Story », « Un crime », pour ne citer que les plus connus avec « Trois hommes à abattre ».

Ceux-là sont les détails « petite histoire people », mais ce qui ressort de cette rencontre et de ces retrouvailles est une histoire particulièrement forte, un huis-clos entre quatre personnes, dans une ambiance rendue lourde par un soleil de plomb mais aussi par les secrets que les personnages ont les uns pour les autres, ou les uns avec les autres.

Et puis, il y a ce jeu de séduction, latent, présent, qui fait que les rapports de force glissent de l’un à l’autre.

« La Piscine » est une histoire troublante, avec un mur qui se dresse peu à peu entre les deux personnages principaux, une incommunicabilité qui va conduire au drame.

C’est une histoire sur l’amour et la mort, comme si ces deux là étaient irrémédiablement liées.

Que dire de Romy Schneider, en Marianne, sinon qu’elle crève l’écran par sa beauté et son talent ; elle est tour à tour frivole, émouvante, manipulatrice, car que l’on ne s’y trompe pas, sous ses belles paroles de liberté à respecter, Marianne aussi sait manipuler son monde.

Alain Delon interprète à merveille un homme amoureux d’une femme mais qui par jalousie va s’intéresser à l’autre, celle qui ne sait pas encore mentir et jouer, celle qui de toute évidence est tombée amoureuse de lui, semble avoir besoin de lui. Les hommes aiment tant se sentir indispensables, tant que cela les arrange bien sûr.

Maurice Ronet est un Harry qui éclate de bonne humeur, mais qu’on ne s’y trompe pas, cette bonne humeur est calculée ; il distribue ses flèches de manière régulière, entraîne Marianne dans ses déplacements, lui apporte un regain de vie que Jean-Paul ne lui apporte déjà plus. Il paiera ses petites manigances au prix de sa vie.

Maurice Ronet était un acteur talentueux qui a disparu un peu trop tôt.

L’inspecteur de police est interprété par Paul Crauchet, un acteur que l’on vit surtout dans des rôles secondaires ; il a travaillé au TNP avec Jean Vilar. C’est le film de Robert Enrico « Les Grandes Gueules » qui lui ouvrira les portes du cinéma.

Jane Birkin – Pénélope - vient de débarquer dans le cinéma français, deux ans après sa figuration dans « Blow Up », elle est depuis un an la compagne de Serge Gainsbourg et sa grâce de gazelle, ainsi que son petit accent, la rende assez craquante. Pour la preuve de son talent d’actrice, il faudra tout de même attendre encore un peu.

« La Piscine » me fait penser à une pièce de théâtre en deux actes : le premier, l’insouciance. Le second acte, le drame.

Avec en prime la très belle musique de Michel Legrand.