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mon bonheur est dans la ville
16 juillet 2009

L'AIGLON, d'Edmond Rostand

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Mis en scène par Yves Larec pour le théâtre du Parc à Bruxelles

Quand la pièce commence, le jeune Franz, duc de Reichstadt a vingt ans ; il entre dans les salons de sa mère à Schönbrunn ; l’ex-impératrice Marie-Louise, devenue comtesse de Neipperg et veuve à nouveau s’amuse au clavecin et reçoit une nouvelle lectrice, la jeune Thérèse de Lorget accompagnée de son frère, anti-bonapartiste convaincu, royaliste acharné, déjà haineux à l’égard du jeune duc pour lequel sa sœur nourrit un tendre sentiment.

Franz est un beau jeune homme, blond, romantique à souhait et qui, sans que l’on s’en doute, se renseigne sur son père dont il s’est forgé une image idéalisée. Il rêve de lui succéder d’être digne de lui, mais hésite car il ne se sent pas prêt.

 

Pourtant dans l’ombre, des personnes complotent dans l’espoir qu’il devienne le nouvel empereur des Français, à commencer par sa cousine, la comtesse Camerata.

Sa tante, l’archiduchesse Sophie est très tendre avec lui aussi.

Franz est toujours habillé de blanc, comme le veut la tradition du grade de colonel de l’armée viennoise ; les exécuteurs testamentaires de son père ne purent jamais lui donner les objets que Napoléon dédiait à son fils « lorsqu’il aura seize ans », ainsi qu’il était stipulé dans le testament de l’ex-empereur. Jamais le fils de « l’ogre » ne doit avoir de contact avec ce qui vient de France, sauf l’ambassadeur qui est envoyé par le nouveau roi de France, Louis-Philippe.

En fait le jeune homme est très étroitement surveillé par les hommes de Metternich, geôlier sans états d’âme, homme dur qui fait en sorte que personne de suspect ne puisse parler de la France à Franz ; pour Metternich, il n’y a pas meilleur geôlier que la mère du jeune homme.

Malgré cela, la jolie danseuse Fanny Elssler n’hésite guère, dès qu’ils sont seuls, à lui parler de son père et de la France.

Plus tard, en discutant stratégie avec Prokesch, il découvre que ses petits soldats français ont été repeints en soldats autrichiens, et c’est alors que se dévoile Flambeau. Son laquais est en réalité un ancien grognard, condamné par contumace mais toujours fidèle à l’empereur et à son fils. C’est lui qui par sa force de caractère va pousser le jeune homme à accepter de se libérer de l’Autriche pour prendre en France la place qui lui revient par héritage.

Une fois de plus, le jeune homme veut tenter de parlementer avec son grand-père dont il fut le petit-fils préféré ; hélas le vieil homme hait Napoléon et lorsqu’il apprend les projets de Franz, il en appelle à Metternich ; ensemble ils étouffent la joie du prince.

Au cours d’un bal organisé par Metternich pour que se démasquent les conspirateurs, Franz déguisé doit être remplacé par la comtesse Camerata afin qu’il puisse fuir et se retrouver en France. C’est dans le petit village de Wagram, face à la plaine où son père fut vainqueur que les derniers espoirs de Franz s’envoleront définitivement et le dernier tableau de la pièce nous le montre affaibli, se rendant avec l’archiduchesse Sophie dans la chapelle où il reçoit les derniers sacrements devant la cour, comme le veut la tradition.

« Eblouie » est le terme qui convient à ce que j’ai ressenti à la vision de la pièce d’Edmond Rostand, interprétée par la troupe du théâtre du Parc à Bruxelles, avec le concours du Centre des Arts Scéniques (CAS), la pièce requérant une distribution fort importante (quasi 30 interprètes).

Oui, « éblouie » je le fus, non seulement par l’interprétation mais aussi par les costumes et décors de Thierry Bosquet. Ils sont absolument somptueux, le mot n’est pas trop fort.

 

C’est au jeune comédien Julien Vargas qu’incombe le lourd tribut de porter toute la pièce sur ses épaules, de bout en bout, il ne quitte pratiquement pas la scène.

Il a toute la grâce romantique du personnage, il est tour à tour émouvant, révolté par sa condition de prisonnier dans une cage dorée ; il est émouvant et mélancolique, touchant dans ses espoirs bien vite écrasés par Metternich.

3_j_paul_dermont_julien_vargas__j_claude_frison_ph__s_daemsCelui-ci est interprété par Jean-Claude Frison, l’un des piliers du Parc et une fois encore, le comédien est formidable. Il rend parfaitement exécrable ce homme froid et dur, sans aucun état d’âme face à ce jeune homme dont il est devenu le geôlier. Il est tour à tour sarcastique et pratiquement torture psychologiquement le jeune homme.

Le comédien rend le personnage totalement haïssable et à chaque réplique, il donne froid dans le dos.

 

 

 

 

2_yves_claessens__julien_vargas_ph__s_daemsC’est Yves Claessens (qui fut Hector dans « la Guerre de Troie n’aura pas lieu » dans ce même théâtre face à l'Ulysse de J.C Frison) qui joue Flambeau, dit « Flambard », le loyal grognard condamné par toutes les polices de l’empire austro-hongrois, et qui espère jusqu’à son dernier souffle rendre le trône de France au fils de son idole.

Le comédien est tour à tour drôle, truculent et émouvant, figure sympathique s’opposant totalement à la froideur de Metternich.

 

 

Nicole Colchat est une impératrice Marie-Louise parfaitement telle que je me l’imaginais, frivole et assez sotte finalement, ravie d’être revenue vers l’Autriche qu’elle ne voulut paraît-il jamais quitter.

Micheline Tziamalis est une dynamique comtesse Camerata, cousine de Franz, en elle bout le sang des Bonaparte. Catherine Cornil est la douce Thérèse de Lorget et Cloé Xhauflaire une tendre archiduchesse Sophie.

Fanny Essler est interprétée par Mélanie Robin.

Jean-Paul Dermont est l’empereur d’Autriche, un véritable despote, réactionnaire qui se voudrait débonnaire et gentil avec son petit-fils mais montre bien rapidement son vrai visage, face à un Metternich manipulateur.

 

Je ne pourrai pas citer ici toute la troupe qui défend cette pièce magistralement ; que les comédiens m’en excusent, mais tous – absolument tous – sont à la hauteur de la pièce.

Edmond Rostand, disons-le, a pris quelques libertés avec la véritable histoire du jeune prince Franz de Reichstadt mais comme le dit si joliment l’auteur dans un quatrain.

 

Grand dieu ! ce n’est pas une cause
Que j’attaque ou que je défends…
Et ceci n’est pas autre chose
Que l’histoire d’un pauvre enfant

 

Le quatrain résume exactement ce qu’est la pièce.

Rostand est bien sûr l’auteur de cette pièce merveilleuse qu’est « Cyrano » et le metteur en scène Yves Larec, 7 ans après avoir mis cette pièce en scène, avait très envie de convaincre le directeur du théâtre de produire « L’Aiglon ».

 

Le rôle de « L’Aiglon » fut interprété pour la toute première fois par la grande comédienne Sarah Berhardt, qui le marquera longtemps de son empreinte.

La tradition d’avant-guerre voudra d’ailleurs que le rôle de Franz fût interprété par des femmes

La plus formidable invention de l’auteur est bien sûr ce personnage de Flambeau le grognard, déguisé en policier-laquais aux ordres de Metternich.

J’ai été un peu surprise par le fait que la pièce soit en vers, ce qui n’est plus très courant au théâtre de nos jours, mais le premier moment de surprise passé, on entre de plein pied dans ce drame romantique, pacifiste, d’autant plus que les comédiens interprètent le texte de manière impeccable et totalement naturelle, ce qui aurait pu ne pas être le cas pour un texte en vers.

 

250px_Napoleon_2On a aussi vu dans cette pièce, en 1900, lorsqu’elle fut montée pour la première fois, un pamphlet anti-germanique, alors que comme le dit Edmond Rostand, il n’a voulu que raconter l’histoire d’un infortuné jeune homme, victime de l’Histoire, de son histoire.

 

 

 

 

 

 

 

 

7_acte_i_scene_vii_ph__s_daems

 

Je suis toutefois désolée de terminer cet article que je voulais positif de part en part d'une note légèrement négative concernant le public : il faudrait tout de même une fois pour toutes que les gens sachent que lorsqu'ils sont au théâtre ILS SONT DANS UN ENDROIT PUBLIC et non dans leur salon, face à la télé, où ils peuvent papoter et commenter la pièce et les comédiens comme bon leur semble. Je voudrais leur rappeler qu'au théâtre CELA NE SE FAIT PAS. Merci à eux s'ils me lisent de s'en souvenir.

 

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