Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
mon bonheur est dans la ville
14 juillet 2009

CENDRILLON, CE MACHO ! de Sébastien Ministru

cendrillon_copie

Au Theâtre de la Toison d'Or à Bruxelles

Cendrillon, tout le monde connaît … non ? il y en a qui ne connaissent pas l’histoire de cette pauvre petite fille riche d’abord, dont le papa est ruiné par sa deuxième femme, très méchante avec deux sales pestes de filles, et finalement grâce à une marraine-fée elle va au bal, rencontre LE prince charmant, le sortilège cesse mais grâce à sa jolie chaussure, le prince la retrouve. Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants ?

Je suis sûre que cela vous dit quelque chose. Dans la version de Walt Disney, elle chante en nettoyant, ça c’est du pur conte de fée. Personne ne chante en nettoyant, ou alors c’est un ou une masochiste grave et je connais l’adresse d’un bon psy !

Dans la version de Sebastien Ministru, Cendrillon est gay ; bref c’est un charmant jeune homme qui préfère les garçons, et ça tombe bien, parce que le prince est homo lui aussi ! d’accord ce sera plus difficile d’avoir beaucoup d’enfants, mais se marier c’est gérable.

La marâtre de Cendrillon est une bonne femme terriblement raciste, pas vraiment moche physiquement, mais moche par le caractère. Vraiment moche.

Ces deux filles sont en fait des fils travelos, qui sont moins méchants finalement avec Cendrillon que dans le dessin animé.

Il y aurait même une petite complicité entre Cendrillon et ces Anastasie et Javotte d’un autre genre.

Mais il y a aussi une Marraine ici ; elle n’est peut-être pas vraiment une fée, dans le sens où elle agite une baguette magique ; elle se serait plutôt une bouteille de J&B qu’elle agite sans arrêt, parce que pour être une soiffarde, c’est une soiffarde notre Marraine. Mais qu’est ce qu’elle est sympa ! et drôle !

Au palais du roi, le prince n’est pas très gai (mais si mais si il est « gay » mais pas « gai ») ; il doit se préparer pour un bal où il lui faudra choisir une épouse. Vous pensez si c’est marrant, non seulement il faut supporter de visiter des lieux désespérément déprimants comme des maisons de retraite, mais en plus il faut se choisir une épouse. Quelle vie que celle des princes ! En plus, il doit choisir une tenue princière, évidemment, et son styliste Oliver n’est vraiment pas simple. Et dictatorial avec ça.

Heureusement pour le prince, sa fée à lui est son attachée de presse-secrétaire, boulimique et un peu obsédée sexuelle du fait qu’elle n’a personne dans sa vie. En fait, si elle a quelqu’un : le charmant vendeur d’olives à qui elle donne une invitation pour le bal. Elle est persuadée qu’il plaira beaucoup à son jeune patron, ils sont du même bord, si vous voyez ce que je veux dire. Elle espère aussi que pour une fois le prince ne fera pas ses habituelles bourdes.<

 

Le jour J arrive, Cendrillon arrive, sa marâtre aussi avec Anastasie et Javotte, même si elles n’ont pas été invitées (en fait la Marâtre avait volé l’invitation de Cendrillon !).

Coup de foudre ! moments idylliques, chaussure qui sied parfaitement à Cendrillon malgré les efforts des trois autres pour la lui piquer.

Et puis voilà que Cendrillon prend la mouche pour une peccadille – une bête histoire de protocole, et il part faire un petit tour chez les Grecs.<

 

Mais c’est un conte, n’oubliez pas. Il va donc revenir et c’est le Happy End.

 

J’aime beaucoup les pièces de Sebastien Ministru, surnommé « le roi des bons mots » - qui est également rédac-chef d’un magazine télé belge et directeur de son supplément culturel, sans oublier ses fonctions à Pure F.M. J’avais déjà vu « La fête des mères », « Excit » et surtout « Fever » , conte de Noël totalement farfelu, avec l’équipe de « Chez Maman », une boîte dans le centre de Bruxelles (pour plus de détails voir dans la rubrique « théâtre ».), dans lequel la musique d’Abba faisait merveille.

Avant « Fever » je m’imaginais que les spectacles de travestis n’étaient que de la grosse rigolade, pour adolescents attardés, mais heureusement j’ai eu l’occasion de revoir ce jugement un peu arbitraire. Mes zygomatiques m’en remercient encore !

Tout comme cette fois, on n’arrête pas de rire du début à la fin de cette version totalement déjantée de « Cendrillon ».

Ici aussi, musique, chansons et danses sont au programme.

Les chorégraphies sont d’Antoine Guillaume, Marla et Bruno, qui interprètent respectivement le Prince, Anastasie et Javotte, toutes deux particulièrement « bécasses ».

Leur maman, la Marâtre est jouée par Maman, avec son habituel talent. Elle est aussi peste ici, qu’elle était sympa dans « Fever ». Elle donnerait froid dans le dos à un boa constrictor, j’aime beaucoup !

Cendrillon est interprété par Frédéric Nyssen ; il ne fait pas dans le mièvre dans le rôle de la servante privilégiée de la méchante deuxième épouse. Ce n’est pas une Cendrillon qui se laisse réellement mal traiter ; au contraire, il remet le chameau vertement à sa place, mais elle a toujours le dernier mot.

Je vais à présent parler des trois personnages qui m’ont le plus plu, mais cela n’enlève strictement rien aux autres interprétations, talentueuses et fort drôles ; simplement ces trois-ci m’ont donné des crampes de rire à l’abdomen pendant toute la soirée, et une bonne partie de la nuit.

cendrillon_ce_macho_rdax_230x160Primo : Marraine, interprétée par une Laurence Bibot au mieux de sa forme. Avec perruque rousse flamboyante, qui n’est pas sans rappeler Sonia Rykiel, juchée sur des hauts talons tout au long de la pièce (mais comment fait-elle ?), elle joue une marraine totalement éméchée, sans cesse à la recherche d’un verre de whisky, gentille comme tout, adorant son filleul et toute prête à faire son bonheur, bien qu’elle trouve qu’il ferait mieux de la suivre à une partouze plutôt que de se contenter d’un seul homme.

 

Secundo, Marie France, interprétée par Julie Duroisin. Elle en fait une attachée de presse absolument hilarante, avec un accent tantinet bruxellois, mais juste ce qu’il faut pour que ce ne soit pas exagéré. Marie France se sent bien seule, même qu’il n’y a personne pour l’arrêter de manger les olives qu’elle achète chez Cendrillon.

Et la perruque qu’elle se coltine tout au long de la pièce vaut le détour également !

Tertio, Oliver le styliste. Alors là, chapeau ! (oui bon, il est styliste, pas modiste) ; le comédien Jean-François Breuer le joue hautain, poseur, totalement snob, méprisant le commun des mortels qui s’habille n’importe comment. A la limite du dictateur, bref c’est un génie. Enfin, c’est lui qui le dit.

Il est tout aussi hilarant que Marraine et Marie-France.

C’est le véritable trio infernal de la pièce, pour sa drôlerie dans l’interprétation du texte de l’auteur. Il peut les en remercier.

Les numéros dansés et chantés interviennent pour les personnages, lorsqu’ils ont des sentiments à exprimer, mais l’ensemble même de toute cette pièce donne une impression magique de joie et de bonne humeur. L’hilarité n’est jamais loin.

Et puis, il faut tout de même reconnaître que les homosexuels ont une auto-dérision particulièrement réjouissante, que certains trouvent parfois choquantes en raison du maniérisme outrancier, mais lorsqu’on est systématiquement marginalisé il est normal d’être outrancier.

Il ne faudrait pourtant pas croire que rien n’est sérieux dans la pièce, au contraire. C’est un très joli pamphlet en faveur de la tolérance vis-à-vis de l’homosexualité.

Lorsque le texte est un peu plus sérieux, sans jamais être moralisateur donc rasoir, il met l’accent sur les moments de mal-être que peuvent vivre ceux qui sont différents et qui ne s’y retrouvent pas toujours dans un monde dit « normal » (what ever !)

Les costumes, épatants aussi, sont de Xavier Delcour ; le décor est de Serge Bunoz, les jeux de lumières sont de Manu Mafféi et le décor sonore, très important dans ce type de spectacle, est de Laurent Beumier.

Et la mise en scène est due, évidemment, à Nathalie Uffner, qui est aussi parfois comédienne et toujours directrice du TTO.

Le spectacle cartonne, mais j’espère qu’il restera une petite place pendant les fêtes car j’ai vraiment envie de revoir ce spectacle déjanté, hilarant mais aussi très tendre.

Je me pose toutefois une question existentielle : pourquoi revisite-t-on toujours le conte de Cendrillon ?

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 85 253
Archives
Derniers commentaires
Publicité