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mon bonheur est dans la ville
9 juillet 2009

SUFFER THE LITTLE CHILDREN, de Donna Leon

dl16bigUKUn matin tôt, à trois heures, le commissaire Guido Brunetti est appelé à l’hôpital de Venise parce qu’un homme blessé par coups y a été amené. Il s’agit du pédiatre de l’hôpital, un homme apprécié de tous, qui est momentanément dans le coma pour s’être interposé entre des carabinieri (gendarmes) s’étant violemment introduits dans son domicile. Ces hommes sont depuis un certain temps sur la piste de trafiquants d’enfants, au départ de leur juridiction de Verona ; ils sont donc hors de leur juridiction et sur celle de Brunetti qui ne l’entend vraiment pas de cette oreille.-

Chez lui, c’est lui qui décide et on ne s’introduit pas de nuit chez les gens pour les agressr et leur prendre leur bébé sous prétexte qu’il a été adopté par une filière illégale.

Car le petit enfant des Pedrolli a été emmené chez les services sociaux, avec tous les autres bébés illégalement adoptés. Le pédiatre a commis l’erreur de signer un certificat de complaisance ; à la suite d’un coup de fil anonyme, les gendarmes de Verona sont remontés jusqu’à lui. Avec les conséquences que constate le commissaire vénitien.

Cette affaire le préoccupe énormément, même si le capitaine de gendarmerie lui a bien fait comprendre qu’il n’avait pas à s’en mêler. L’attitude des gendarmes déplaît profondément à Brunetti et il va commencer une enquête personnelle afin de savoir qui a donné ce coup de fil anonyme ayant brisé la vie du pédiatre, mais surtout de cet petit enfant qui après 18 mois de bonheur dans une famille d’adoption va désormais affronter les orphelinats.

Lorsqu’une pharmacie est saccagée, sans cambriolage, grâce aux talents de Vianello et d’Elettra, Brunetti va découvrir que c’est surtout l’ordinateur du pharmacien qui a subi la plus grande rage du ou des vandales.

Il va donc poursuivre avec entêtement une enquête « parallèle » puisque l’affaire ne lui a pas été confiée. Dans le disque dur de l’ordinateur, Vianello va expliquer à son supérieur ce qu’il a découvert (il en est très fier parce que Brunetti n’y connaît rien).

Au bout d’une procédure un peu fastidieuse mais nécessaire, ce que le commissaire va découvrir lui laissera un sentiment d’amertume et de tristesse.

Tout comme Ian Rankin a voulu faire connaître la face cachée de son Edimbourg, Donna Leon a voulu faire connaître la « vraie » Venise à ses lecteurs ; pas la ville de papier glacé, qui s’enfonce très doucement dans l’eau, entre autres à cause du nombre considérable de touristes qui y débarquent quotidiennement – le poids de la densité humaine aura raison de siècles de culture et de beauté !

La romancière nous décrit les « calli », allées étroites et mystérieuses, les charmants « campielli » ou petites places où siroter un cappuccino, les barques apportant les fruits et légumes destinés aux vrais résidents de Venise, pas à ces millions de touristes annuels dont déjà l’écrivain anglais Henry James disait il y a plus d’un siècle que « la chose la plus déplaisante à Venise, sont ses visiteurs » ! Et toc !

Donna Leon insiste sur le fait que ces touristes se limitent à un triangle, celui formé par la cathédrale San Marco-l’Accademia et le Rialto, et cette foule se retrouve dans ce même triangle durant la période de l’ « Acqua Alta », les eaux montantes qui inondent Venise en hiver. L’invasion humaine se chiffre parfois jusqu’à 150.000 touristes par jour en saison vacancière !

Tout comme ses personnages, la créatrice du sympathique commissaire Brunetti évite soigneusement le fameux triangle et se limite aux alentours, dans la vraie Venise ; lorsqu’on y fait ses courses, on rencontre toujours un ami, Venise étant pédestre, on ne peut pas ne pas y croiser quelqu’un que l’on connaît lorsqu’on y réside.

Ce sont tous ces gens simples qui peuplent les romans policiers mettant en scène Guido Brunetti et sa famille.

Car contrairement à ses collègues britannique, écossais ou suédois, le commissaire Brunetti est très heureux en ménage, il a deux enfants, Raffi et Chiara – désormais ados puisque la série a commencé en 1992 lorsqu’ils étaient encore jeunes – et une épouse, féministe convaincue (enragée prétendraient certains que je connais), elle est professeur de lettres dans un collège public, elle est d’origine aristocratique et a épousé Brunetti contre l’avis de son comte de pappà (et ne parlons même pas de la comtesse, sa mère).

La complicité entre les époux est grande, d’autant plus que tous deux sont des gens de gauche convaincus ; Paola encore plus radicale que son époux, ce qui cause parfois des frictions qu’un délicieux verre de chianti finit par réconcilier, car Paola n’est pas seulement une érudite en littérature, elle est également un merveilleux chef !

On retrouve ici encore les personnages récurrents que sont son adjoint, l’inspecteur Vianello et de la Signora Elettra, l’efficace secrétaire du commissaire principal (Vice-Questore) Patta, avec qui Brunetti ne s’entend pas vraiment bien, mais c’est le chef !

dl16big« Suffer the little children » est un bon thriller, le long déroulement d’un fil sur les conséquences dramatiques du non-respect de la vie privée, conséquence directe d’internet et des banques de données médicales notamment.

C’est une lente descente aux enfers d’un homme foncièrement bon, qui a commis une petite erreur mais qui va dramatiquement en payer les conséquences, toutes les conséquences jusqu’à la vengeance.

Il me reste un certain sentiment de tristesse après avoir lu le livre, parce qu’il aborde le problème très profond de « l’enfant à tout prix », du racisme et de ceux qui s’érigent en moralisateurs sous prétexte de religion. Je ne le dirai jamais assez, méfiez-vous des gens qui  érigent leurs principes religieux en lois, car sous prétexte de respecter la morale, ils n’ont aucun respect des autres.

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