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mon bonheur est dans la ville
8 juillet 2009

EAST LYNNE ou THE EARL'S DAUGHTER, d'Ellen Price Wood

arton1739La ravissante et superficielle Miss Isabel Vane, dont le père n’est pas un homme très honnête, a toujours eu l’intention d’épouser Archibald Carlyle ; lui seul peut lui apporter la position sociale qu’elle désire et tant pis pour Barbara Hare qui l’aime en secret. Et qui va passer la première moitié du livre a être terriblement envieuse, malgré ses bonnes manières. Lorsqu’apparaît Francis Levison, aristocrate bel homme, séducteur impénitent, dispensateur de compliments doucereux, véritable prédateur ; il n’aura pas trop à faire à séduire la belle Isabel, devenue Lady Carlyle, mère de deux enfants, mais qui s’ennuie profondément dans son joli manoir.

Elle rêvait de fêtes et bals perpétuels et se retrouve maîtresse d’un domaine, peut être, mais sans aucun autre divertissement. Le terrain est donc propice aux manœuvres sournoises de Levison. De plus, elle est persuadée que son mari la trompe avec la douce Barbara et c’est cette jalousie que l’aristocrate séducteur va exploiter pour la faire choir dans ses bras. Elle s’enfuit donc avec lui, sur le « continent », là où il est courant d’être infidèle et sans scrupule ni morale. Après quelque temps, il l’abandonne ainsi que leur enfant illégitime.

Envers et contre tous les commérages et les conventions de l’époque, Archibald Carlyle va divorcer et après quelque temps, épouser Barbara, dont le frère est recherché par la police pour un crime qu’il n’a pas commis.

A la recherche d’une gouvernante pour leur enfants, ils engagent une jeune veuve vivant dans la misère, qui n’est autre que Lady Isabel ne pouvant plus supporter d’être loin de ses enfants légitimes. Lorsque meurt l’un d’entre eux de tuberculose, la malheureuse n’arrive pas à cacher son chagrin à la surprise de tous. Pourtant ce ne sera que lorsqu’elle-même sera à l’article de la mort que toute la vérité apparaîtra. Seule la mort permet le vrai repentir.

« East Lynne » est l’un des plus typiques romans victoriens, écrit par une Américaine, Ellen PRICE, qui fut obligée de le publier sous son nom d’épouse, Mrs. Henry Wood, ce qui fut pour elle un réel tourment, une négation totale à ses yeux de sa propre personnalité mais c’était aussi le seul moyen de se faire publier. Souvenons-nous des Sœurs Brontë obligées d’adopter des pseudonymes masculins pour être éditées. Il  est l’archétype du roman victorien : fausses accusations, jalousie, sexualité étouffée, contraintes sociales. Tous les personnages ont un secret plus ou moins bien dissimulés. C’est un roman où chacun observe chacun : le prédateur pour prendre la femme convoitée, la jeune épouse qui inteprète mal l’amitié entre son époux et son amie, la nouvelle épouse qui recherche le vrai criminel, le frère de cette dernière observant la maison afin de découvrir le vrai criminel.

La dramatisation du personnage féminin principal est typique aussi, la femme qui a fautée ne peut que se racheter par la mort, un peu comme dans un opéra en somme. Lady Isabel, elle est réellement l’ « ange déchu » tel qu’on aimait à voir certaines femmes à l’époque du roman, interditiction formelle d’essayer d’avoir une personnalité, c’est là le vrai danger, le vrai péché.

Archibald Carlyle lui est l’homme noble dans tous les sens du terme - à côté de l’aristocrate déchu qu’est Levinson - il est travailleur négligeant par là même son épouse, il sera grugé par une femme considérée comme frivole par les critères de l’époque. Il n’hésite pas à compromettre sa réputation pour abriter un soi-disant criminel, bref il est presque un saint ce qui a beaucoup fait rire la jeune femme à l’esprit caustique que je suis, car tant de grandeur n’est plus de mise dans un roman actuellement. Il est l’image même du bon sens anglais, de l’homme plein de noblesse et de pardon, mais aussi et surtout l’image patriarcale de la société dans laquelle il évolue. C’est pour cela que Barbara Hare, plus modeste, lui convient mieux, elle correspond nettement mieux aux conventions de leur société.

L’histoire fut extrêmement populaire à sa sortie et sa génération de lecteurs attendaient avidement la sortie des prochains romans de la jeune romancière considérée comme une extraordinaire conteuse, ayant un sens précis du détail ; elle n’y gagna cependant pas la richesse, malgré la célébrité. Son style considéré comme désuet au début du 20ème siècle la fit tomber dans l’oubli, il ne pouvait convenir au Modernisme, à l’avant-gardiste romancière. Il est cependant un intéressant condensé sur ce que sont l’amour et le mariage, une fois que les premiers feux amoureux s’atténuent face à la routine quotidienne.

Le roman a été redécouvert grâce partiellement à la télévision mais également grâce à la remise à la mode des romans de Jane Austen, qui permit de redécouvrir toute une sélection de romans anglais classiques. Car désormais "East Lynne" d’Ellen Price fait partie des grands classiques anglais, il est étudié à côté des romans des Soeurs Brontë, d’Elizabeth Gaskell, de George Eliot, sans oublier Jane Austen  et Thackeray, leurs grands précurseurs. Et elle peut enfin être lue sous son patronyme véritable et non plus sous celui de son époux.

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