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mon bonheur est dans la ville
18 juillet 2009

LES ANGES DECHUS, de Gunnar Staalesen

51FOlAPBCoL__SL500_AA240_On dit que les meilleurs s’en vont les premiers, mais on dit tant de choses !
Varg Veum retrouve quelques vieilles connaissances lors des obsèques de leur copain Jan Petter Olsen. Il renoue pour quelques heures d’une tournée dans les bars de la ville les moments privilégiés de sa jeunesse, lorsqu’avec les copains de l’école et de la rue, ils s’amusaient à jouer aux billes, aux cowboys et aux indiens, à regarder les filles. Pour Veum surtout penser aux filles lui fait évoquer Rebecca, son amour de jeunesse. A présent, l’épouse de Jakob, celui qui fut son meilleur ami. Le ménage bat de l’aile, Varg Veum se prend à rêver que Rebecca, cette fois, pourrait enfin être à lui … Mais le détective privé sait bien que les gens changent, que les choses changent et tant d’années ont passé.

En retrouvant son copain toujours musicien, Varg Veum se met à évoquer le groupe de rock qu’il avait fondé avec le « beau » Johnny Solheim, qui se prenait pour Elvis.  Tout en discustant, Veum va réaliser que des quatre membres du groupe, il ne reste plus que Johnny et Jakob, qui semblent réellement se haïr désormais ; deux membres du groupe sont déjà morts assez récemment. En y réfléchissant bien, même la mort de  leur copain Olsen qui est tombé de son échaffaudage, semble suspecte puisqu’il était copain du groupe.

Lorsque le chanteur Johnny « Elvis-sur-le-retour » Solheim  se fait également poignarder à la sortie d’une boîte, et ceci seulement trois jours après l’enterrement de l’autre copain, Varg Veum ne croit plus aux coïncidences ; le seul des Harpers encore en vie désormais est Jakob ; le « privé » est persuadé qu’il sera le prochain sur la liste et puisque Jakob lui a demandé de rechercher Rebecca qui a quitté le domicile conjugal, Veum va commencer d’autres recherches pour son propre compte – il veut savoir pourquoi Solheim est mort poignardé, pourquoi l’un des membres du groupe fut retrouvé littéralement ivre mort dans la neige et le troisième renversé dans un bus, dans l’absolu un banal accident de la circulation, mais pour Veum le hasard n’existe pas. D’autant plus qu’il finit par découvrir qu’avant chaque mort, une lettre anonyme représentant les Harpers avec des ailes d’ange et une croix au-dessus de leur tête est arrivée au domicile du futur défunt. Aucun ne prit cela au sérieux, même pas Jakob qui vient d’en recevoir une également.

Il s’est passé quelque chose dans la vie du groupe de rock plus de 10 ans auparavant, qui a occasionné la rupture immédiate du groupe, le divorce du chanteur. Ses recherches le mènent vers l’ex-épouse de Solheim, qui a élevé leurs deux filles seule, l’une d’entre elles hélas a disparu également, après avoir sombré dans la drogue. Pour Varg Veum, la clé du mystère est là, seulement il n’y a plus aucune trace de Ruth, même sa jeune sœur qu’elle adorait ignore où elle se trouve.

Varg Veum n’est pas le type qui lâche une piste. Il ira jusqu’au bout, malgré les demandes répétées de son copain de « laisser tomber ». Trop de silences, trop de volonté de ne pas chercher à savoir. Vraiment pas le genre de Veum.

J’ai découvert le privé norvégien lors de sa première enquête « Le Loup dans la Bergerie », lancée dans ce courant d’auteurs du Nord, que je venais de découvrir avec Henning Mankell, Maj Sjöwall, Karin Fossum et quelques autres.

Varg Veum, dont le nom est un jeu de mots sur une légende nordique signifie « le loup dans la sacristie », m’avait aussitôt séduite ; les critiques littéraires ont immédiatement enfoncé la porte des  comparaisons avec le Wallander d’Henning Mankell ; les deux hommes ont, il est vrai, quelques similitudes à commencer par le goût prononcé pour l’alcool ; Veum consomme des quantités affolantes de vodka, d’aquavit, mais aussi de bières – j’ai failli avoir la cuite rien qu’à certains passages. Ils se nourrissent tous deux fort mal, ils sont tous deux divorcés, ils ont tous les deux un enfant qui grandit vite et loin d’eux.

Ils partagent un profond désenchantement quant à l’humanité en général et leur pays en particulier.

Tant chez Mankell que chez Gunnar Staalesen le modèle nordique de démocratie et de société modèle en prend un sacré coup, vous pouvez m’en croire.  La Norvège de Staalesen est aussi malheureuse que la Suède de Mankell.

Personnellement, je préfèrerais la comparaison avec John Rebus, l’inspecteur de l’Ecossais Ian Rankin et ses enquêtes dans l’Edimbourg sombre et pas très touristique elle non plus ; je leur trouve plus de similitudes. Une chose est certaine, tous ces gens ont une vision totalement désenchantée du monde, ils sont sans illusions sur leurs compatriotes, sur la nature humaine. Ils sont sans espoir et sans rédemption.
Pourtant chez Veum, il y a un élément qui le rapproche de Rebus justement, c’est son humour cynique, l’ironie désabusée qui manquent un peu à Wallander qui aime bien s'apitoyer sur soi. 
Varg Veum comme John Rebus ont  des sentiments très humains, plus évidents que chez Wallander qui semble surtout être intéressé par lui-même et ses propres problèmes.

Le polar, c’est bien connu, est une manière détournée de parler de la société et de ses manquements, c’est quelque chose que j’essaie toujours d’expliquer aux personnes qui me demandent ce que je peux bien trouver d’intéressant à lire autant de romans policiers ; j’ai déjà eu quelques critiques à ce sujet, du genre « mais tu ne lis vraiment que ça ! » - ces mêmes personnes considèrent que les grands classiques comme Hugo, Balzac, Flaubert, George Sand, Zola, sont seuls dignes d’être consultés lorsqu’il s’agit de parler des aspects les plus sombres de l’âme humaine.
Mais pour ce qui est de parler de notre quotidien, celui des villes, celui des laissés-pour-compte de la société, rien de tel que les polars, c’est ce que je tente de leur faire comprendre.

Il n’y a pas que Jack London qui parlait des « condamnés à vivre ».
Chez Gunnar Staalesen aussi,  ils sont bien présents aussi ; on est loin là des « armchair detectives » que j’adore, ce qui ne signifie pas qu’il ne faille pas s’intéresser aux autres.

41Q0D9E2WJL__SL500_AA240_Je recommande vivement les enquêtes de Varg Veum ; elles sont fameusement bien ficelées, très réalistes, avec une surprise en guise de chute qui surprend le lecteur. Elles ne sont malheureusement qu’au nombre de 6.

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