Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
mon bonheur est dans la ville
27 février 2021

HOTEL MEUBLE, de Thomas Owen

33619426

On a assassiné le vieux Oswald Stricker, expert  en vieux objets, mais surtout usurier – tout le monde est convaincu qu’il cache un gros magot dans son deux-pièces.
Pour le propriétaire, Julius De Geyter,  brocanteur (il préfère le terme « antiquaire »), l’intrusion de la police dans sa maison n’est pas un moment agréable, d’autant plus qu’il avait discuté avec Stricker pour acheter le torquetum qui se retrouve comme par hasard dans sa boutique !  il n’en faut pas plus à l’inspecteur Maudru pour le mettre en tête de liste des suspects.

Tous les habitants de cet « hôtel » figurent sur la liste des suspects = la cartomancienne, se disant voyante, Mme Vianna – le vieux photographe Maurice Wermbter – Ange Auber, laveur de cadavres, surnommé « l’ange des ténèbres » par les frères Queyrat  – les frères  Queyrat, MaX le comédien et Raoul l’artiste peintre – Paulina, la nièce de la voyante, amoureuse du peintre – une belle panoplie de bras cassés, personnages un peu minables, un peu grotesques.
Auxquels va se joindre la jolie Mme Aurelia, journaliste à ses heures,  devant sa richesse aux instituts de beauté qu’elle gère habilement.
Et surtout, ce qui met l’inspecteur de très mauvaise humeur, détective-amateure. Elle va encore lui mettre des bâtons dans les roues, il le sent l’inspecteur.

Pourtant non, elle s’est installée dans l’appartement deux-chambres d’Oswald Stricker, puisqu’il était libre, ainsi peut-elle observer de près tout ce petit monde pas très ragoûtant, à l’image de cet immeuble à la propreté douteuse. 
Bien sûr la curieuse voyante, qui n’a rien vu du tout, qui est déjà envieuse de cette charmante personne, en profite pendant son absence pour fouiller  l’appartement ; mal lui en a pris, on va l’y retrouver morte elle aussi. Seulement elle, elle a vraiment été assassinée, alors que l’autopsie a prouvé qu’en réalité Stricker est mort d’une crise cardiaque pour avoir surpris celui (ou celle) qui fouillait son appartement.
La cartomancienne ne sera pas le dernier cadavre de cette enquête où l’inspecteur Maudru piétine un peu.

Aurelia va apprendre à ses dépens que jouer les détectives-amateur.e.s peut s’avérer dangereux.

Ce que j’en pense = j’ai adoré (avec seulement un petit bémol, voir plus bas) - polar très court, mais plein d’humour caustique, d’ironie acerbe à l’égard des locataires de cet hôtel meublé. Le terme « hôtel » est celui que l’on donne à ce type de maison où chaque étage est divisé en petits appartements (très petits) meublés afin d’y loger un maximum de monde.
Ce qui m’a frappée dans la description de l’immeuble et ses habitants est l’image de crasse que l’auteur y donne.
Du coup, l’image de Madame Aurelia, bien que vêtue selon la circonstance, est tellement fraîche et propre, que l’on se dit qu’elle détonne quand même un peu. Pas étonnant que la grosse-grasse voyante ait envie de découvrir l’appartement lorsqu’Aurelia s’y est installée.

Parmi ces locataires il n’y en a pas vraiment un pour rattraper les autres, tous sont assez veules,  se méprisent mutuellement, sont assez contents lorsque l’un d’eux se fait raccourcir (on n’est pas plus sympathique !)

AVT_Thomas-Owen_5137

J’ai découvert l’auteur Thomas Owen par ce roman ; il a écrit cette histoire en 1942, mais pour moi cela n’a pas pris une ride. Il utilise un ton caustique que j’ai vraiment apprécié, mais il a l’ironie méchante lorsqu’il décrit les locataires de l’hôtel meublé, sans complaisance aucune.
Thomas Owen, pseudonyme de Gerald Bertot,  est né à Louvain (Belgiue) en 1910 et est décédé à Bruxelles en 2002.  Il a commencé sa carrière d’auteur, en 1930,  sous le pseudonyme de Stéphane Rey pour la rédaction de critiques d’art. Enseuite il s’est lancé dans l’écriture de romans policiers, de contes et nouvelles fantastiques et science-fiction.

Je suis désolée que ses romans policiers ne soient plus édités, à part cet « Hôtel Meublé » datant de 1942 – d’autant plus désolée que le personnage de Madame Aurelia apparaît dans 3 autres polars – elle est aussi amusante, ironique, que charmante physiquement, d’où le contraste évident avec les habitants du meublé.

Ce qui m’a dérangée est la description de l’usurier Stricker et du propriétaire De Geyter, tous deux ressemblent à des caricatures du Juif (nez et doigts crochus, attitude un peu veule face à l’autorité, mais légèrement menaçante vis-à-vis de leurs co-locataires) – cela m’a un peu gâché la découverte de ce polar.
Le roman ayant été écrit dans les années 1940, il était dans l’air du temps de penser ainsi la manière de voir les Juifs, mais ce n’est vraiment pas une excuse. Dans l’intéressante postface de Rossano Rosi, il fait la comparaison avec le Juif dans Tintin (l’étoile mystérieuse) ou Michel Simon dans « le jour se lève ». Mëme Jean Ray n’y a pas échappé à donner une image caricaturale à la Shylock d’un personnage juif dans ses romans.
Bon, la perfection n’étant pas de ce monde, je tenais tout de même à citer ce trait négatif dans un roman où l’ironie le dispute au suspens bien réel.

Comme je le disais, je regrette que seul cet « Hôtel Meublé » ait été ré-édité, car j’aurais aimé retrouver Aurelia.
Tout comme j'aimerais voir l'adaptation cinématographique réalisée par Marc Lobet - réalisation franco-belge, où les rôles principaux étaient tenus par Anny Duperey et Bernard Giraudeau, mais aussi quelques comédiens belges que j'ai eu l'occasion de voir au théâtre. Dans la postface (encore !) Rossano Rosi n'a guère apprécié cette adaptation.

J’ai aussi fait, grâce à ce livre, la découverte de cet instrument de mesure astronomique médiéval, dont je n’avais jamais entendu parler = le torquetum ou turquet (dixit wikipedia) –

330px-Torquetum

Publicité
Publicité
Commentaires
M
Je croyais me souvenir que Thomas Owen et Jean Ray étaient la même personne, je vois que j'arrive à l'âge où tout s'embrouille :D <br /> <br /> Peut-être pourrais-tu trouver ses autres oeuvres en bouquinerie ?
Répondre
V
polar ironique et caustique, je n'en demande pas plus :)
Répondre
A
S'il croise ma route, je n'hésiterai pas à me lancer ; j'aime bien le mordant ;-)
Répondre
T
En commençant à lire ton billet, je me demandais ce qu'était ce torquetum, et, j'aurai du le savoir, tu as assouvi ma curiosité :D<br /> <br /> J'imagine qu'ils vont en mettre un dans la fusée, avant de partir pour Mars :lol:
Répondre
H
Dommage, ce livre m'aurait vraiment tenté s'il n'y avait cette "ironie méchante" !<br /> <br /> Et comme presque toujours avec toi, j'apprends , cette fois ce qu'est un torquetum, mot qu'hélas j'aurai oublié la semaine prochaine
Répondre
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 85 192
Archives
Derniers commentaires
Publicité