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mon bonheur est dans la ville
28 juin 2020

TSIPPORA, de Marek Halter

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Trilogie La Bible au Féminin

Mon nom est Tsippora, il signifie « petit oiseau » - mon père Jethro me trouva dans une barque sur la rivière, tout juste après que ma mère mourut après m’avoir mise au monde. Je devins l’une de ses nombreux enfants.
Mon père aimait mon sens de la logique et de la contestation, il me considérait comme la plus intelligente de ses enfants, et une seule - une seulement en fut jalouse.
J’avais la peau noire, j’étais plus grande que mes sœurs, souple comme une gazelle me disait-on ; mais c’était surtout pour la couleur de ma peau que Jethro craignÄt que je serais mise à l’écart, que personne ne lui demanderait ma main.

J’avais rêvé de lui, bien avant qu’il n’arriva chez nous, fuyant l’Egypte, où il avait tué un contremaître qui maltraitait un ouvrier hébreu. Il me sauva, avec mes deux sœurs, des mains d’une bande de brutes qui accaparaient notre puits et nous empêchaient d’y puiser l’eau nécessaire à la vie pendant une semaine.
Je le reconnus immédiatement, il était l’homme vu dans mes rêves. Ma sœur Orma lui fit immédiatement les yeux doux et je voyais bien qu’elle l’exaspérait avec ses gloussements pour attirer son attention.

Jethro l’accueillit à bras ouverts, mes frères également, il nous avait sauvé du déshonneur, de la souillure. Mais Jethro pressentait en lui quelqu’un d’important ; il le laissa venir à lui quand il serait prêt, pour lui conter ce qui l’avait amené. Pendant ce temps nous honorions Helon, dieu unique, que les Hébreux honorent comme YWHH. Il se « montrait » à nous sous la forme d’une montagne qui parfois crachait des flammes et des cendres.
C’est là que Moïse vit des flammes qui ne semblaient consumer un buisson, qui ne se consumait pas, c’est là que YHWH lui dit d’aller délivrer ses frères qui souffraient sous pharaon – Thoutmosis.

Je refusai de l’épouser, malgré la grande attirance entre nous deux qui nous donna nos deux enfants, jusqu’à ce qu’il décide de partir pour l’Egypte – il avait un devoir, il se devait de l’accomplir.
Il devait aller délivrer son peuple. Nous partîmes donc vers l’Egypte, afin qu’il puisse revoir une dernière fois sa mère Hatshepsout, qui l’éleva, et sa mère Yoshevet, qui l’abandonna au Nil, afin qu’il ne soit pas tué comme tous les fils premiers nés des Hébreux.
Je fus accueillie à bras ouverts par Yoshevet, mais je dus subir l’hostilité de son frère Aaron et surtout de sa sœur Miryam qui méprisait ma couleur de peau. Je fus immédiatement confrontée aux lois régnant chez les Hébreux, à savoir que les femmes devaient se taire, élever les enfants.
La parole appartenant aux hommes, et aux hommes seuls. Moise tentait de me faire prendre ma place, mais les « anciens » et Aaron, et surtout Miryam, firent en sorte que Moise n’eut pratiquement plus de temps pour moi. 

Je n’eus pas d’autre choix, après avoir perdu nos deux petits garçons, que de retourner vers mon père – mais hélas, la vieillesse avait fait son œuvre.
C’est le roi de la tribu, mari de ma sœur Orma, qui régnait désormais sur Madian. Orma la très belle et surtout la très rancunière ; c’est là que je mourus sans avoir jamais revu celui que j’aimais.  

Ce que j’en pense - bien que ce soit le tome 2, j’ai décidé de parler de « Tsippora », l’une des trois grandes figures du roman de Marek Halter.
Que l’on ne s’y trompe pas, il s’agit bien d’un roman.
J’ai toujours aimé les contes et légendes, surtout lorsque ce sont de grands conteurs et poètes qui les transmettent. Marek Halter, j’ai déjà eu l’occasion de le dire dans d’autres petites chroniques, est un conteur hors pair.
Bien que ce soit écrit, on croirait entendre  l'auteur raconter l’histoire de cette femme magnifique, hors pair, l’épouse koushite de Moïse, qui sera sacrifiée à son devoir.

Tsippora est surtout connue sous le nom de SEPHORA, fille de Jethro, le « sage » ou prêtre des Madianites.

Même si le personnage de Tsippora est magnifique, celui que j’ai adoré dans ce roman est le personnage de Jethro, patriarche, sage-prêtre du pays de Madian – considéré par les Hébreux comme un peuple sacrilège (alors qu’ils adorent pourtant le même dieu unique, sauf qu’ils lui donnent un autre nom – quand je vous le disais que toute religion entretient les hostilités).
Jethro est un homme intelligent, foncièrement bon, capable d’aimer de manière inconditionnelle ; il a adopté le bébé venant de naître, n’a pas hésité à lui donner la même éducation qu’à ses frères adoptifs – ses sœurs adoptives lui enseignèrent ce que les femmes doivent savoir = filer la laine, tisser, surveiller les troupeaux, veiller au bien-être de la tribu.
Sage, autant que prêtre, il conseille tous ceux qui vivent au pays de Madian, tous l’écoutent car ils le savent de bon conseil. Il est un homme aimé et respecté à juste titre et n’a pas à l’égard des femmes, la même attitude que les hommes de l’orient.
C'est lui qui conseillera Moise et Tsippora.
J’aurais aimé avoir un tel père.

Quant à l’épisode du buisson ardent, il est intelligemment amené, sous la forme de feu derrière un buisson d’épines – en fait sur les bords d’un petit volcan.

Anecdotes dites historiques = je spécifie « dites historiques », car on le sait, la bible, comme l’Iliade  ou les légendes arthuriennes, est un recueil des contes que l’on se passait par voie orale le soir autour des feux.

Différente du portrait dans le film de Cecil B. DeMille « Ten Commandments », cette Sephora est bien la fille de Jethro, aidée par Moise au puits où des bergers hostiles les empêchaient ses sœurs et elle de faire boire leur troupeau.

Dans un chapitre de la bible (Nombres), la sœur de Moise est punie pour avoir méprisé le mariage de son frère avec une koushite. Cet événement est repris par Marek Halter dans son roman.
Dans le film de B. DeMille, Moise (Charlton Heston =^-^=) a une épouse koushite, avant de rencontrer Sephora dans sa fuite d’Egypte. 
En fait Moise avait bien une autre épouse avant Sephora, la Madianite – elle se nommait Tharbis, et était effectivement noire de peau. Celle-ci demanda à Moise de l’épouser – à l’époque où il vivait encore en Egypte, en échange de la reddition de la capitale de son pays, ceci n’est pas évoqué dans le roman d’Halter, mais dans la superproduction hollywoodienne.
N'oublions pas non plus qu'à cette époque ancienne, lla polygamie existait.

Marek Halter situe aussi la vie en Egypte de Moise au temps de Hatshepsout, la femme-pharaon, qui régna conjointement avec Thoutmosis III, premier fils d’une autre épouse de son mari.
Comme on ne sait vraiment pas grand-chose de manière exacte sur le personnage de Moise, certains l’ont même fait vivre à l’époque d’Akhenaton, considérant que l’idée du dieu unique, développée par Akhenaton, venait des enseignements que lui donna Moise. Donc, comme je le disais plus haut, ce personnage de la bible n’est pas véritablement avéré.

les épreuves de moise par sandro botticelli
avec les filles de jethro au puits

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détail, montrant l'une des filles de jethro (sephora ?)

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Commentaires
H
Chaque fois que je te lis, avec un plaisir égal à celui du chocolat, je mesure l'immensité de mon ignorance et je sombre dans un gouffre de honte 🥺<br /> <br /> Et dire que le grand Proust a transformé cette femme magnifique en une petite gourgandine ! Il me déçoit vraiment le bonhomme ☹️
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C
Je n'ai jamais été tenté de lire Marek Halter. Pourtant, j'en ai un dans ma bibliothèque que ma mère avait lu, mais je n'arrive pas à l'ouvrir. Ce livre me fait le même effet ; ses histoires ne doivent pas être pour moi.<br /> <br /> Quand j'ai lu la première phrase, je me suis demandée pourquoi tu avais changé de prénom ... Je vais aller me coucher.
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T
Un conte des mille et une nuits ;)
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T
Ah, qu'il y en a des choses à méditer dans cette vie racontée, les préjugés, les destinées féminines au bon plaisir des volontés masculines... <br /> <br /> Je ne m'attendais pas à retrouver ici la Zephora de Botticelli que Swann retrouve dans les traits d'Odette de Crécy - mystère de la peau noire devenue rose pâle !
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