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mon bonheur est dans la ville
2 juin 2018

LA NUIT DES BEGUINES, d'Aline Kiner

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La France, sous le règne de Philippe le Bel, monarque dur, impitoyable, dévot intégriste, grand admirateur de son ancêtre Louis IX (saint Louis) – c’est pour cela qu’il poursuit le patronage du grand béguinage de Paris, où vit une communauté de femmes instruites, comme Ysabel l’intendante, qui connaît les simples et les remèdes pour soulager les indigents, ne ménageant pas ses soins à l’hôpital, assistée (un peu à contre-coeur)  par la béguine Agnès, une femme au cœur envieux et jaloux, qui prouvera sa duplicité dans le courant de l’histoire qui les occupe.

Il y a là aussi dame Ade, une très jeune veuve, belle comme un lys et froide comme la neige, qui ne désire jamais se mêler aux autres, si ce n’est contrainte.
Un jour arrive sur le pas de porte du béguinage la jeune Maheut, la rousse et révoltée, ayant fuit la brutalité d’un mari qu’on lui a imposé, rendue temporairement muette par la douleur dont son corps garde les traces.
Ysabel, toujours prompte à aider, va imposer la présence de la jeune femme à Ade, bien qu’elles n’aient rien en commun – pour Maheut, Ade est une bigote, pour Ade, Maheut est rousse, donc fille du diable ; sentiment qui sera renforcé lorsqu’on découvre que la jeune femme est enceinte.

En toile de fond à ces événements, il y a le procès des templiers, mais aussi de Marguerite Porete, béguine de Valenciennes, ayant rédigé un livre décrété hérésie par le clergé, un livre qui pourtant ne parle que de l’amour pour dieu, mais où l’âme de celui est croyant  est seul juge. Pas étonnant qu’elle risque d’être brûlée comme hérétique.
Le chemin des béguines va croiser celui d’un moine franciscain, un certain Humbert, qui cache un secret qui coûtera cher au béguinage lorsqu’il sera découvert.

Mon avis = excellent roman, belle fresque historique qui mêle les personnages du roman à ceux de leur époque, tels le pape Clément, le roi de France Philippe le Bel, ses fils, ses brus.  A travers le destin des béguines du grand béguinage de Paris, fondé par saint Louis (Louis IX), on suit la lutte pour le pouvoir, surtout pour l’abrogation des privilèges des béguines, privilèges que ne supporte guère le clergé – des femmes échappant à la loi de dieu et des hommes, des femmes  souhaitant rester libres, sans obéir à un mari ou à un prêtre, autorisées à conserver et gérer leur fortune si elles en ont. 

Des femmes désireuses de prier à leur manière, vivant en communauté, certaines fort instruites et partageant ce savoir, de tous âges et tous milieux, désireuses se rendre utiles par les soins qu’elles dispensent aux démunis, aux malades et vivant dans leur petite maison du béguinage, suscitant l’envie, la jalousie sans oublier les calomnies car de telles femmes ne peuvent donc être que des suppôts du diable. 

On en revient toujours à la même chose = l’indépendance des femmes, très mal vue par les hommes qui estiment que leur pouvoir est supérieur.
Les béguines étaient des femmes « hors normes », parmi lesquelles, on retrouve  des jeunes veuves, soulagées de ne plus devoir répondre aux exigences d’un époux souvent brutal ; certaines d’entre elles ont été littéralement « vendues » par leur famille, où la vie d’une fille ne compte que dans la mesure où elle peut être offerte en alliance pour régler des dettes ou un litige.
Personne ne tient compte de l’âge et on marie les filles, certaines à peine pubères, à 13 ou 14 ans. Et tant pis si elles sont trop étroites pour donner naissance à un héritier.

A travers de nombreux  détails, l’autrice partage la vie non seulement de ces béguines mais aussi de ce Paris médiéval, sous la coupe d’un roi rigide, avec les finances d’un royaume totalement appauvri.
La « nuit » s’est certes abattue sur les béguines, dont l’ordre a été dissous au 15ème siècle, mais elle s’est aussi abattue sur le royaume de France, qui bientôt connaîtra non seulement la peste, mais aussi la guerre de cent ans.

Je ne peux que recommander cette lecture à celles et ceux qui apprécient l’histoire, la grande histoire et celle des petites gens qui s’y trouvent mêlées.

le billet de joelle-labibliothèquedudolmen qui m'a donné envie de lire ce livre

l'ancien béguinage à Bruges (photo de ma collection nov 2011)

Bruges Nov 2011 136

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Commentaires
D
Bonjour sheherazade2000, merci pour ce billet. J'ai aussi beaucoup aimé ce livre et grâce auquel j'ai appris l'existence d'un béguinage en plein coeur de Paris. http://dasola.canalblog.com/archives/2017/10/26/35802593.html Bonne après-midi.
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M
Il me semble l'avoir vu chroniqué. C'est tentant. Mais pas pour tout de suite !
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T
Je connais peu cette vie des béguines, je note le titre. (Sais-tu que le lien sous ton pseudo renvoie maintenant à canalblog en général ?)
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B
Je l'ai déjà noté car le souvenir du béguinage de Bruges est pour moi inoubliable. Mais il est assez loin dans ma liste.<br /> <br /> Bonne journée.
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A
J'ai l'intention de le lire ; pour l'instant, il y en a plein d'autres qui lui passent devant ;-)
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