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mon bonheur est dans la ville
21 septembre 2013

UN REVENANT, de Christian Jaque

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Scénario  d’Henri Jeanson – inspiré par l’affaire Gillet à Lyon

Dialogues d'Henri Jeanson

Musique originale d’Arthur Honegger

Avec la participation du corps de ballet de l’opéra de Paris – chorégraphie de Victor Gsovsky 

Un homme marche dans une ville, on ne voit pas son visage, on ne sait pas qui il est. Il arrive dans un joli petit appartement sous les toits et là on le découvre = Jean-Jacques Sauvage revient à Lyon, une ville où il fut blessé tant dans sa chair que dans son cœur. 20 années auparavant, il aimait Geneviève Nisard, jeune fille d’un milieu des soyeux lyonnais, donc bien au-dessus de sa condition à lui. Un complot entre Jérôme Nisard et Edmond Gonin, deux hommes qui se disaient ses amis, faillit lui coûter la vie et lui coûta de toute façon Geneviève qui épousa Edmond, sans un seul mot de regret.

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A présent, Jean-Jacques est devenu un homme célèbre, directeur d’une troupe de ballet connue dans le monde entier. Il a préparé un nouveau spectacle et il vient le tester dans sa ville natale. Avec la ferme intention de se venger en se moquant de ceux qui l’ont malmenés, en les faisant trembler dans leurs mentalités étriquées de gros bourgeois, inquiets du qu’en dira-t-on, soucieux de leur façade.
Il va commencer par retrouver Geneviève, lui demander de quitter cet Edmond faux-jeton qui lui a fait croire qu’elle était morte afin de l’empêcher de la voir.
Geneviève, du coup, reprend un coup de jeune, change de coiffure, de manière de s’habiller, mais pas d’intelligence hélas.

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Ensuite, jeter François, le naïf fils de Jérôme, dans les bras de sa danseuse-étoile, la toute belle mais capricieuse Karina.

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Or Jérôme Nisard a d’autres projets pour son fils = il a fait de mauvais placements, plus personne dans la famille ne veut l’aider – et certainement pas la vieille tante Jeanne qui n’a pas sa langue en poche et a toujours bien aimé Jean-Jacques. Du coup, le père sacrifie le fils en exigeant qu’il épouse une riche héritière.
François refuse, il se veut artiste et n’a pas l’intention de devenir un homme d’affaires. Lorsqu’il réalise que Karina ne veut pas vraiment de lui, il tente de se suicider, acte qui attendrit Jean-Jacques – d’ailleurs tout dans ce garçon l’attendrit, il se retrouve en lui, tel qu’il l’était 20 ans auparavant. Il éprouve à nouveau une véritable affection pour quelqu’un et, alors qu’il laisse Geneviève éplorée sur le quai de la gare, il emmène le jeune homme.

Voilà une histoire de vengeance qui m’a bien mise mal à l’aise par tout le cynisme qui s’en dégage.
Basée sur un fait véridique s’étant produit dans les années 1920, dans la région lyonnaise, il paraîtrait que le film ait choqué à sa sortie car tout le monde y a reconnu les principaux protagonistes.
Ce fut probablement encore l’une de ces tempêtes dans un verre d’eau, car j’ai trouvé un article (ici) où il est mentionné que cette affaire fut étouffée. Le film sortit en 1946, les habitants du quartier d’Ainay, celui des riches bourgeois où l’hypocrisie règne en maître, on pense que le « scandale » provoqué par le film fut un habile coup de publicité.

Par contre, ce qui est beaucoup moins élégant, je trouve, est que l’on parle de scénario original d’Henri Jeanson – or tout le monde est d’accord pour confirmer que la trame de cette histoire est celle du livre d’un certain Henri Béraud « Ciel de Suie ».
Jeanson était un ami de Béraud avant la 2ème G.M., il ne pouvait donc pas ignorer ce roman – qu’il s’est approprié sans élégance – même si Henri Béraud fut hélas un collaborateur, participant actif du torchon « Je suis partout ».

Inutile de dire que Louis Jouvet est une fois de plus parfait (je sais, je ne suis pas objective lorsqu’il s’agit de Louis Jouvet) – les rôles de cyniques sont faits pour lui (mais je l’aime bien tendre aussi). Ici, il se trimballe tout le long du film avec un petit air goguenard, surtout lorsqu’il rencontre ses anciens « amis », qui n’hésitèrent pas à essayer de se débarrasser de lui, 20 ans auparavant,  en prétendant avoir surpris un cambrioleur – un coup de feu faillit mettre fin aux jours de Jouvet, mais ce qui l’a le plus blessé, est la manière dont son amour d’alors le traita.

Geneviève est interprétée par Gaby Morlay et hélas, voilà une comédienne que je n’ai jamais beaucoup appréciée – elle n’est crédible qu’en bourgeoise, lorsqu’elle joue l’amoureuse elle est crispante, comme sa voix, comme ses minauderies de gamine.

Ses odieux mari et frère sont interprétés respectivement par Louis Seigner (jeune et presque séduisant) et Jean Brochard.
Ils sont parfaitement infects en bourgeois avares et cyniques. On comprend que Jean-Jacques/Jouvet riposte au cynisme par encore plus de sarcasme, les échanges verbaux sont savoureux !

François Périer interprète le naïf et tendre François – on est un peu fâché sur Jean-Jacques de lui faire subir un chagrin d’amour à cause de la belle Karina.
Celle-ci est jouée par la superbe Ludmilla Tcherina, qui nous offre un magnifique numéro de danse sur la musique d’Arthur Honneger.
Ce dernier admirait énormément Igor Stravinsky et cela se sent dans la musique qu’il a composé pour le ballet du film, qui sert de leitmotiv.

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Leo Lapara, régisseur et secrétaire de Louis Jouvet dans le privé, interprète ici un rôle similaire dans le film.

J’ai gardé ma préférée dans cette histoire pour la fin = la formidable Marguerite Moreno, une tante Jeanne encore plus cynique que ses neveux réunis et qui a bien vite vu clair dans le jeu de Jean-Jacques qu’elle a toujours apprécié depuis l’enfance.
Dans un dialogue, qui tourne rapidement au monologue, elle lui dit ce qu’elle pense avec gentillesse – mais c’est d’un drôle car chaque fois que Jouvet tente de lui répondre, elle lui dit « attends, je n’ai pas fini » et elle repart.
C’est du grand art, à la manière de Marguerite Moreno, grande dame du théâtre et du cinéma français, celle dont le poète Valéry disait qu’elle était la seule à réciter ses vers correctement.
Il paraît qu’elle fut sublime dans « La Folle de Chaillot », alors ça j’en suis convaincue.

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Filmé en noir et blanc, le début du film a un petit côté onirique que j’aime beaucoup = personnage flou, brouillard, petit vent dans les voilages aux fenêtres … qui est cette ombre, que veut-elle ....

Question costumes, pour Gaby Morlay, par contre, j'ai fort ri aux chapeaux qu'on lui a fait porter dans le film.
Paraît que c'était la mode dans les années 40, heureusement que j'ai échappé à ça !

Le ballet moderne  interprété par la lumineuse Tcherina est un pur moment de bonheur.

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