QUARTIER LOINTAIN, de Sam Garbarski
Scénario de Sam Garbarski, Jérôme Tonnerre, Philippe Blasband, d’après le manga éponyme de Jirô Taniguchi
Thomas Verniaz, dessinateur de bandes dessinées, doit se rendre en province pour un festival de BD. Cet homme de 50 ans est fort mélancolique, il ne s’est apparemment pas remis du départ de son père, un soir de fête d’anniversaire, et qui ne revint jamais, qui ne donna plus jamais de ses nouvelles.
Pour le retour à Paris, Thomas se trompe de train et se retrouve dans la ville de son enfance. Où il revoit un ancien copain, ayant repris le garage de son père, son ancienne maison, laissée à l’abandon.
Thomas décide de se rendre sur la tombe de sa mère, qui est selon lui morte de chagrin après le départ de son mari. En suivant un papillon des yeux, en tournoyant, Verniaz s’évanouit … et se retrouve dans les années 1960, lorsqu’il était adolescent. Il retrouve son père, sa mère, sa petite sœur tels qu’ils étaient dans son souvenir.
Dès lors, le jeune garçon (avec son bagage d’adulte) va tenter de comprendre ce qui s’est produit avant le départ de son père, et avec l’espoir de changer le cours des choses.
Thomas essaie d’établir un dialogue avec ses parents, il demande à son père de lui parler, à sa mère de se confier – il prend soin de sa petite sœur.
Avant tout, l’adolescent espère pouvoir comprendre pourquoi son père voulait partir et peut-être éviter ce départ.
Avec des moments pleins d’humour, lorsque notre « héros » réalise qu’il doit retourner au bahut, garçons et filles de chaque côté du petit mur – mais avec la jolie Sylvie, son premier amour d’adolescent.
J’aime énormément entendre parler Sam Garbarski de ses projets – son enthousiasme est communicatif et j’avais envie de voir ce film, avant d’en lire le manga qui est dans ma bibliothèque (je ne vais pas tarder à l’en sortir).
J’ai beaucoup aimé cette histoire pleine de tendresse, d’émotion, de mélancolie – certains d’entre nous, je le sais, aimeraient se retrouver dans le temps et tenter de mieux comprendre nos parents, d’établir un autre lieu, une meilleure communication.
Personnellement, je ne pense pas que l’on puisse changer quoique ce soit aux relations que l’on a eues, dire « si c’était à refaire … » - si c’était à refaire on referait exactement la même chose – il n’y a qu’en allant de l’avant, en rencontrant d’autres personnes que l’on peut modifier le ressenti et le comportement. C’est du moins ce que je pense, et mon avis ne se modifie pas après avoir visionné le film de Garbarski.
De plus, dans les sixties, les enfants et les parents ne communiquaient pas de la même manière, on ne demandait pas à ses parents s’ils étaient heureux – cet anachronisme vient de l’écart entre la jeunesse de Thomas et son double adulte, revenu avec son bagage « moderne ».
Dans les rapports de Thomas avec ses parents, il y a des silences et de la pudeur, que Thomas-ado tente de briser, avec son vécu d'adulte des années 2000 - comme inviter sa maman à "profiter un peu de la vie".
J’ai vu les deux longs métrages précédents de ce réalisateur, ancien directeur d’agence de publicité, qui s’est tourné vers le cinéma en commençant par de courts-métrages.
Chaque film, que ce soit « le Tango des Rashevski » ou « Irina Palm » parlait aussi de la famille, avec ses moments critiques et ses moments de joie.
Je les ai adorés tous les deux, et ce « Quartier Lointain » n’a pas dérogé à la règle. Cela fait du bien dans un monde où les gens deviennent indifférents à bien des choses, enfermés dans leur monde, de voir un film où la famille a de l’importance.
Dans le rôle du jeune Thomas, Léo Legrand est totalement crédible, très naturel– ce qui est un compliment de ma part car je ne suis pas fan de jeunes acteurs. Thomas adulte est joué par Pascal Greggory, acteur que j’apprécie, que l’on voit peu dans le film, mais dont la voix off conte l’histoire.
Les parents Verniaz sont interprétés par Jonathan Zaccaï (le père) et Alexandra Maria Lara (la mère). J’ai aussi apprécié leur interprétation = le père tout en introspection, taiseux, mal dans sa vie et elle, la mère, tendre, attentive, mais si triste.
L’ensemble de la distribution est parfaite bien que ce soit surtout une distribution de jeunes acteurs.
Sam Garbarski s’est adressé au dessinateur de bandes dessinées Frank Pé pour les dessins dans le film, ceux que Thomas Verniaz, l’ado et l’adulte, ont créés.
Quant à l’auteur du manga « Quartier Lointain », Jirô Taniguchi, il dit avoir apprécié cette adaptation, transposée dans les Alpes françaises, loin de son Japon initial.
Belle et émouvante découverte que je n'oublierai pas de sitôt.