RETROSPECTIVE CONSTANT PERMEKE
(ma chronique est due en partie au « Guide du Visiteur » - les illustrations ont été pêchées dans la photothèque google, prendre des photos m’ayant été interdit par les surveillants de salles – je suis toujours un peu désobéissante, je sors l’appareil de cet air innocent que je prends très aisément, mais pas de chance, personne ne fut dupe)
J’en ai fait mon credo, même lorsque je n’apprécie pas vraiment un certain type de peinture, de découvrir certaines œuvres – je n’ai jamais été une grande amatrice de la peinture expressionniste, que ce soit Otto Dix, Anto Carte, Egon Schiele, Soutine, etc.
Cela ne signifie pas que je n’aime RIEN dans ce style-là, c’est simplement que certaines œuvres me prennent aux tripes et développent un sentiment de malaise – trop de réalisme sans doute, trop de violence et de force, parfois même me suis-je sentie agressée – l’expressionnisme ne fut pas à proprement parler un mouvement, mais une réaction contre l’académisme et, ce qui ne m’a pas vraiment surprises, contre l’impressionnisme français qui, bien que peinture de la réalité et opposition à l'académisme, était encore trop académique pour les expressionnistes.
Je connaissais en partie l’œuvre de Constant Permeke, parce que c’est un enfant d’Ostende (ville balnéaire belge), et que j’avais souvent eu l’occasion, au fil de mes « balades dans l’art » de le croiser – à chaque fois, je me disais « non vraiment, ce n’est pas pour moi ».
C’est pourtant sur les conseils de l’historienne d’art-guide Sarah Cordier que je me suis décidée - pratiquement à la dernière minute puisque l’exposition se termine bientôt – de retourner « à la rencontre de Constant Permeke » qui disait si joliment et modestement =
je ne peins pas ce que je vois, mais ce que je pense avoir vu
L’exposition réunit 130 œuvres du peintre-sculpteur flamand, considéré comme le représentant le plus original de l’expressionnisme flamand, selon le curateur de l’exposition.
Permeke n’aimait pas s’enfermer dans un genre, préférant écouter sa propre voix et suivre sa voie personnelle. On l’a surtout classé dans le peintre des paysans et pêcheurs, ce qui constitue une majeure partie de l’œuvre, mais on découvre d’autres aspects, qui m’ont bien plus interpelée.
De grandes salles pour des peintures monumentales et quelques magnifiques sculptures, le tout divisé en 8 thèmes, avec parfois une citation du peintre.
C’est la magnifique « Niobé », tant en dessin au fusain qu’en sculpture qui accueille le visiteur – elles sont bien plus attrayantes à mes yeux que « La Grand Marine », la plus grande marine réalisée par le peintre et dont il était très fier.
« Niobé », figure de la mythologie greco-romaine fascinait Permeke (pour rappel = l’orgueilleuse Niobé se moqua de Leto qui n’avait eu que 2 enfants – Artemis et Apollon – alors qu’elle-même avait mis au monde 7 garçons et 7 filles – les 2 prétentieux enfants de Leto estimèrent que Niobé s’était attaquée aux dieux et massacrèrent les enfants de Nobé à coups de flèches – Niobé fut pétrifiée d’horreur et Zeus, dans son immense bonté hem hem, la changea en roche, dont les larmes qui s’écoulaient toujours devinrent une source).
Il développa le thème de cette belle femme dans plusieurs dessins et statues monumentales ; par les statues il désirait montrer des « émotions dans la pierre ».
Thème par salle =
De l’impressionnisme à l’expression – transition vers un expressionnisme propre
Après l’accueil par la somptueuse « Niobé », c’est « Marietje avec châle » et une fenâtre qui captent mon regard, je ne peux m’empêcher d’y voir une certaine influence de Van Gogh, mais sans doute mon attrait pour celui-ci m’influence-t-il beaucoup. D'après mon petit guide, il s'agirait plutôt d'une influence postimpressionniste, un peu à la manière d'Emile Claus
Maria Delaere est « Marietje » la fiancée qui deviendra la femme de sa vie, ils auront 6 enfants, dont 2 mourront jeunes, ce qui fut la plus grande tragédie de la vie du couple.
Ostende est partout présente dans la peinture de Permeke – dont l’autoportrait sculpté dans le bois montre un visage hiératique.
(déjà je le sais que je vais plus aimer le sculpteur et le dessinateur que le peintre, même si l’un est forcément l’autre et inversement)
Autres œuvres = Le port d’Ostende, un homme et son chat, énormément de peintures très sombres, mais aussi de très beaux dessins au fusain.
Citation = les pêcheurs, des gens magnifiques, je me suis réincarné en eux.
La réalité quotidienne du pêcheur et du paysan
Toujours ces paysages sombres, où mer et ciel se rejoignent et se fondent l’un dans l’autre (comment ne pas penser à Brel et son plat pays).
La nudité, la grossesse, la maternité rendues de manière organique
Les nus féminins constituent une importante partie des peintures de Permeke, cela deviendra le thème principal de sa créativité à partir de 1937.
Nombreux dessins au fusain, superbes, montrant la beauté et la puissance des corps ainsi que la force des visages.
La vie du paysan
Citation = j’ai découvert les gens de chez nous, leur âme, leur caractère immuable, leur simplicité
La puissance des archétypes
Citation = les découvertes les plus profondes résident dans les choses les plus simples
Vers le milieu des années 1920, les œuvres de Constant Permeke font l’objet d’un intérêt accru même à l’étranger. Il se rend régulièrement au petit village de Jabbeke et s’intéresse de plus en plus à la vie campagnarde.
J' ai découvert une sculpture de semeur, aussi vivante que si le personnage était réel.
Deci-delà, soudain dans toute cette soimbre mélancolie éclatent quelques toiles d'un dimanche ou d'un printemps pleins de lumières.
Le nu féminin comme source d’inspiration pour la sculpture
Permeke a 50 ans, en 1936 – il expose, surtout des paysages (notamment un champ de tir à l’arc, sport dont on l’a couronné empereur à Jabbeke).
Son travail rencontre de plus en plus de critiques = sa peinture aurait perdu sa vivacité sa force d’expression n’est plus ce qu’elle était.
Le peintre décide alors d’aborder une nouvelle voie, en se concentrant encore plus sur les dessins de nus – il se met aussi à la sculpture, essentiellement de nus féminins. Cela commence par de l’argile, de petites sculptures, et aussi des expériences en plâtre. Ce seront pourtant au niveau des grandes sculptures que se situe son ambition.
Et quelles sculptures ! – sa « Marie-Lou » est magnifique, sur l’illustration vous ne la voyez que de face, mais j’ai eu le bonheur de la regarder de tous les côtés, et dans son dos sa longue chevelure tombe comme une vivante cascade.
Grands dessins de nus, paysages et personnages
Des paysages de neige, d’été, printaniers – des marines – parfois des verts vifs, des paysages dorés.
L’adieu
Citation = tu vois à quel point ma vie a été ordinaire
Pourtant rien d’ordinaire dans cette œuvre ! Les années d’après-guerre furent dédiées à de grandes expositions – d’autant plus bienvenues au peintre, j’imagine, qu’il fut interdit de peinture par les nazis, pour cause de peinture dégénérée.
En 1951, il part en Bretagne, sur les conseils de Maurice Vlaminck – Constant Permeke réalisera surtout des croquis durant son séjour et c’est dans son atelier de Jabbeke qu’en peu de temps il peindra la Bretagne, avec ses côtes et sa mer grise, les pêcheurs, leurs bateaux, églises et calvaires.
« L’adieu » est une toile de 1948, montrant l’épouse de Permeke sur son lit de mort. Elle était restée alitée durant plusieurs semaines au cours desquelles son époux ne quittera pas son chevet. Constant Permeke ne montrera cette toile qu’à des amis intimes.
Ma conclusion = je ne suis certes pas totalement réconciliée avec toute la peinture de Constant Permeke, mais j’ai pu découvrir un autre aspect de son talent d’artiste, cela valait vraiment le déplacement.
Un article très intéressant sur « Permeke monumental » sur le blog textes&prétextes.