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mon bonheur est dans la ville
19 octobre 2012

L'ETERNEL RETOUR, de Jean Delannoy

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Titre anglais = The Eternal return (mais aussi Love Eternal)
Titre allemand = Der ewige Bann
Titre italien = l’immortale leggenda

Scénario et dialogues de Jean Cocteau

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Quelque part en Bretagne, Patrice vit chez son oncle Marc, un veuf très riche, qui lui porte une grande affection.
Dans ce même château vivent les Frossin, le père Amédée, la mère Gertrude et leur abominable rejeton, Achille, qui se pose sans arrêt en victime du fait qu’il est nain. Il profite de cet état de chose, surprotégé par sa mère, et est ignoble avec tous, et surtout avec son beau cousin, qui n'hésite pas à le taquiner, tant il le trouve désagréable.
Gertrude, la belle-sœur de Marc, estime que son fils doit être l’héritier de la fortune de son frère. Elle hait littéralement le jeune Patrice, non seulement parce qu’il est le neveu préféré, mais aussi pour sa beauté alors que son malheureux fils à elle est né nain.
Un jour, en se promenant dans une île, Patrice rencontre une jeune femme, Nathalie, douce et blonde et maltraitée par un homme nommé Morolt qu'elle doit épouser ; Patrice la sauve des griffes de son tourmenteur et voit en elle une épouse parfaite pour briser la solitude de son oncle Marc. Nathalie est d'abord choquée par ce qu'il lui dit, en fait, c'est Patrice qu'elle aime. Au chateau, leur complicité est évidente, et même Marc en prend ombrage.
Inutile de dire qu’immédiatement la jeune femme est détestée par les Frossin ; Achille vole la fiole d'un breuvage "vin d'amour", que la mère adoptive de Nathalie a mis dans un flacon marqué "poison". Il espère les   empoisonner, mais  leur fait boire au contraire un philtre d’amour.

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Les effets du philtre vont se faire sentir et les jeunes gens sont irrémédiablement attirés l’un vers l’autre, au point qu’un jour Patrice est découvert dans la chambre de Nathalie par Marc, qui le chasse. Inutile de dire que ce sont les médisances d’Achille qui l’ont amené là.

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Nathalie fuit également, mais Marc la reprend lors d’une absence de Patrice. Qui accepte un emploi chez Lionel, le garagiste dont la sœur, une brune Nathalie, s’éprend de lui.
Après quelque temps, Patrice accepte d’épouser la jeune femme, mais souhaite d’abord revoir Nathalie la blonde qui  semble dépérir d’amour.
Achille blesse Patrice qui est soigné par la brune Nathalie, elle devine aussi son amour pour l’autre jeune femme au même prénom.
Patrice étant fort malade, la blessure s’étant infectée, Lionel  demande à Marc qu’il soit permis à la blonde Nathalie de le revoir une dernière fois, ce à quoi il consent. Lorsque le bateau de la blonde jeune femme est en vue, la brune, jalouse,  ment à propos du signal convenu et Patrice meurt. Nathalie la blonde mourra auprès de lui.

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Jean Cocteau est scénariste dans ce film qui lui est cependant souvent attribué comme réalisateur aussi. Il a retravaillé – avec habileté – le mythe de « Tristan & Iseult » des légendes arthuriennes, tout en nous expliquant, au début du film, que les histoires se répètent sans cesse à travers le temps, les protagonistes n’en étant même pas conscients ; il dit avoir "emprunté" le titre du film  à Nietzche qui a  développé un concept d’ « éternel retour ». Le mythologue-historien d'art, spécialiste des religions,  Mircea Eliade a aussi développé cette théorie.

C’est l’un des films les plus sombres du réalisateur Jean Delannoy, tourné – comme « Les Visiteurs du soir  - durant l’occupation nazie.
Certains y ont vu le triomphe des symboles nazis = la blondeur des protagonistes principaux, d’autres par contre ont affirmé qu’au contraire le film est un immense symbole anti-nazi, rempli de messages subliminaux = un mariage forcé, sans amour, des amants tourmentés par un être abject qui veut leur perte – carrément une allégorie de la France occupée, un pays tourmenté par la bassesse de la police et des collaborateurs, mais l’amour triomphant à travers la mort,  c'est-à-dire le pays qui pourrait entrevoir l’espoir.
Je ne suis pas suffisamment au fait de la situation, ni des intentions du réalisateur et de son scénariste  pour juger. 

On a dit que dans le film de Marcel Carné (les visiteurs), le diable personnifié par Jules Berry représentait l’Allemagne nazie, mais que le tandem Cocteau-Delannoy par contre montrait une sympathie aux idées de l’Allemagne en montrant ses héros d’une blondeur nordique , personnifiant un amour pur damné par la méchanceté d’un nain, laid et jaloux.
C’est là que je me rends compte que je n’en sais vraiment pas assez sur l’histoire du cinéma, mais connaîtra-t-on jamais les pensées réelles des réalisateurs-scénaristes de l’occupation – à la fin de la guerre, tout le monde se proclamait  résistant, sauf ceux qui avait vraiment pris fait et cause pour l’Allemagne nazie.
Une chose est certaine, pour beaucoup ce film est une réalisation « typique de l’occupation », tout comme « Les Visiteurs du soir » = il  est fait pour distraire, pour éloigner la triste réalité.

Côté interprétation, c’est superbe = Jean Marais est un très beau Patrice, qui s’éloigne de celle qu’il aime, damné  à cause d’un breuvage maudit.
Marais est beau comme un archange, et il paraîtrait que son pull, dans ce film, lança la mode du jacquard. On a toujours dit que Jean Marais était un « acteur assez limité », personnellement je ne trouve pas  - bien sûr, il excellera plus tard dans des films de cape et d’épée, mais il est un très plausible amant malheureux.
Madeleine Sologne est Nathalie la blonde, car comme dans la légende de Tristan & Iseult, nous avons aussi une Iseult brune = Junie Astor, en Nathalie la brune est convaincante en jeune femme amoureuse et blessée.
On ne pourrait  pas dans cette histoire ne pas y avoir de Nathalie/Iseult brune et jalouse sinon le destin des amants ne peut s'accomplir.
Ici aussi on dit que Madeleine Sologne lança la mode de la coiffure qu’elle porte dans ce film. Je la trouve, en tout cas, un peu froide dans le rôle.

Les « méchants » de l’histoire, très méchants, sont Achille, l’autre neveu de Marc, fils de sa belle-sœur, et l’image même de la jalousie, de la méchanceté gratuite. Bien sûr, Achille est en souffrance en raison de sa laideur, et outrageusement gâté par sa mère qui l’encourage dans ses laides actions.
Pierre Pieral interprète ce nain maléfique avec un immense talent ; il avait déjà tourné dans « Les Visiteurs du soir », son premier rôle à 18 ans, et 2 ans plus tard fit la connaissance de Jean Marais et Jean Cocteau dont il devint un ami.
Il jouera encore dans 2 autres réalisations de  Jean Delannoy. Il tournera aussi avec beaucoup d’autres grands réalisateurs.
Piéral était, dans la vie, aux dires de tous, un homme d’une grande gentillesse, ayant beaucoup d’humour (comme en témoigne son autobiographie = « La vie vue d’en bas ») et se désolait qu’on ne lui proposât que des rôles de « nain maléfique ».

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Ses parents, dans le film, sont Yvonne de Bray et Jean d’Yd. Si Amédée, le père, est un être falot et veule sous la coupe de sa femme, celle-ci est un être haineux qui fait peur à voir. Son fils et elle personnifient les barons jaloux de la légende.
Le « roi Marc » devenu « oncle Marc » pour les besoins de cette histoire est joué par Jean Murat.

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Si le débat reste ouvert sur contre ou pro-nazi, ce qui est avéré,  par contre, c’est que la Nouvelle Vague s’est toujours moquée des films de Jean Delannoy, les considérant comme le prototype des films à l’ancienne contre lesquels  les jeunes réalisateurs de cette nouvelle vague s’insurgeaient.

Dois-je ajouter que j’ai beaucoup aimé cette réécriture d’un mythe archi connu mais tellement romantique.

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Commentaires
S
merci de votre passage, armelle et de ce commentaire qui le complète tellement bien :)
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A
La Nouvelle Vague, pour exister, entendait tuer les pères, c'est bien connu. Il y a longtemps que j'ai vu ce film mais je sais que je l'avais aimé pour sa poésie, sa lenteur élégante, cette évocation très juste des mythes arthurien et de l'éternel retour si bien explicités par Mircéa Eliade. Je ne vois pas en quoi ce film serait pro-nazi. S'il s'agit de la blondeur de Madeleine Sologne, c'est ridicule. On a le plus souvent représenté Yseult comme une blonde et les suédoises, norvégiennes, danoises, ne le sont-elles pas ? La France a le triste privilège d'affectionner ce genre de chasse aux sorcières, alors que, comme vous le dites si bien, tout le monde après 44 était... résistant, même ceux qui, peu de temps auparavant, avaient signé le pacte germano-soviétique.
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K
Coucou Niki<br /> <br /> Quel film ! Madeleine Sologne y est sublime<br /> <br /> <br /> <br /> Bises du dimanche<br /> <br /> <br /> <br /> Béa kimcat
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V
blablablaaaa, tu es trop modeste ^-^
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V
chaque fois que je lis tes admirables billets ciné, je me dis mais qu'est-ce que j'attends pour m'y mettre? Bravo encore :-)
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