THE HAUNTED HOTEL, de William Wilkie Collins
A mystery of modern Venice
Titre français = L’Hôtel hanté
Lord Montbarry, petite noblesse irlandaise, était sur le point d’épouser la douce Agnes Lockwood lorsqu’au cours d’un voyage, il fut subjugué par la Contessa Narona. Il lui demande de l’épouser et à son retour rompt ses fiançailles avec Agnes qui accepte la situation avec dignité, tant son amour pour lui est grand = elle le préfère heureux avec une autre que malheureux auprès d’elle (quelle abnégation !).
La famille de Montbarry désapprouvant la situation - et surtout la Contessa, dont on dit que son frère qui l’accompagne partout ne serait pas vraiment son frère – refuse d’assister à ce mariage ; le couple après un court séjour en Ecosse finit par louer un palazzo à Venise.
L’époux d’une ancienne élève d’Agnes a obtenu le poste de valet-garçon de courses auprès du couple.
Pendant ce temps, Henry Westwick, le cadet des Montbarry, tente encore et toujours de convaincre Miss Lockwood qu’il l’aime et est prêt à lui faire oublier l’ignominie causée par son frère aîné. La belle ingénue de son côté continue à se réfugier dans son rôle de victime.
Arrive alors une missive surprenante = le valet-courrier aurait disparu sans laisser d’adresse, la femme de chambre de la Contessa a également disparu (on va la retrouver ne vous inquiétez pas, totalement drapée dans sa dignité) et hélas, Lord Montbarry qui vivait littéralement en reclus dans le palazzo pour cause de mauvaise santé, a trépassé. La Contessa, pour oublier tant de chagrins, mais après avoir encaissé la prime d’assurance-vie, s’en est allée pour les Etats-Unis où son frère va faire quelques études sur de nouvelles inventions en chimie.
Entretemps le palazzo a été transformé en hôtel pour riches Anglais et Américains ; comme les Westwick ont investi dans cette transformation, ils sont invités tous, y compris Agnes, à l’inauguration. Ceux de la famille - arrivés les premiers et logeant dans les anciens appartements transformés de Lord Montbarry – sont la proie d’étranges phénomènes. Et si le fantôme de Lord Montbarry revenait pour se venger ?
J’ai ressenti avec ce court roman (novelette en anglais) la même envie de fou-rire que lorsque j’ai lu « Good Lady Ducayne » de Mary Elizabeth Braddon, dont j’avais pourtant apprécié « Le Secret de la Ferme grise », histoire qui faisait réellement frémir.
Convaincue qu’un « Hôtel Hanté » allait aussi me donner la chair de poule, je me suis décidée à sortir cette nouvelle de ma pal, un peu aussi car je n’avais pas envie de me lancer dans un long roman.
Que l’on ne se méprenne surtout pas => j’aime énormément les romans de W. W. Collins, découverts il y a déjà longtems (« Moonstone » et « Woman in White ») – ces deux romans là, oui, m’avaient fait trembler à l’époque et je suis certaine que je ressentirai la même chose en les relisant (du moins je l’espère) car j’ai bien l’intention de les relire un jour. Ce sont des parfaits petits bijoux de romans gothiques.
William Wilkie Collins est même considéré comme l’initiateur du roman policier, mais bon on attribue aussi cela à Edgar Allen Poe et son chevalier Dupin (dont on dit qu’Arthur Conan Doyle s’est inspiré pour « Sherlock Holmes »).
Ce court roman est le dernier écrit par William Wilkie Collins et à l’époque, il était déjà malade ; il souffrait de goutte depuis de longues années et utilisait du laudanum (dérivé d’opium) pour alléger ses souffrances ; je ne sais pas si ce sont les hallucinations provoquées par la dépendance à cette drogue qui a donné à certaines scènes de « Haunted Hotel », un effet de délire.
Même un excellent romancier peut se tromper un peu au cours de sa longue route d’écriture et j’ai presque eu une impression d’auto-parodie avec ce roman.
Tous les ingrédients du roman gothique par excellence y sont réunis = la belle et douce jeune femme parée de toutes les vertus, la « femme fatale », le gentleman pas si gentleman que cela puisqu’il renonce à sa promesse de mariage pour une femme considérée comme une intrigante indigne de lui et de sa famille (elle me faisait presque pitié tant elle avait tout le monde contre elle), une famille qui renonce à fréquenter son frère aîné à cause de cette iniquité, un frère cadet amoureux transi de la douce jeune fille (que j’avais envie de secouer comme un prunier = une telle « sainte » ça n’existe pas !) et finalement, Venise, jouant un rôle sombre et quasi maléfique avec cet ancien « palazzo » transformé en hôtel pour les Britanniques et les Américains en mal d’exotisme. Sans oublier le frère de la femme fatale, son âme damnée, homme à la réputation sulfureuse.
Je me suis surprise plusieurs fois à rire tout haut tant cette histoire me semblait caricaturale.
De plus, j’ai trouvé que l’écriture avait pris un sérieux coup de vieux également ; le style est mélodramatique et ampoulé, les protagonistes féminines se pâment ou se tordent les mains en ayant des crises d’hystérie, tandis que les gentlemen se redressent dans leur dignité, les servantes quittent le service de gens indignes à leurs yeux, des éléments supranaturels, bref toute la panoplie y est passée.
Le roman est également une mise en abyme, puisque notre Contessa écrit une pièce de théâtre dans laquelle elle raconte toute son histoire à Venise, dans un but de se faire comprendre – et de se faire un peu d’argent par la même occasion.
On peut dire que j’ai passé un excellent moment avec cette « novelette », mais pas dans le sens escompté. J’ai ri au lieu de frémir. Et dire que je pensais me mettre dans l'ambiance d'Halloween... So sorry Mr. Collins !
Un autre avis beaucoup plus sérieux chez Manu.