LA MASCHERA DEL DEMONIO, de Mario Bava
Titre français = Le Masque du démon
Titre anglais = Black Sunday
Scénario d’Ennio De Concini & Mario Sarandrei, d’après la nouvelle « Viy » de Nicolas Gogol (qui avait plus que probablement lu « Dracula » de Bram Stoker).
Dans la steppe russe, au 19ème siècle, deux voyageurs imprudents ramènent à la vie Asa Vajda. Celle-ci fut suppliciée 2 siècles auparavant en compagnie de son amant pour cause de sorcellerie. C’est le frère même d’Asa qui mèna la lutte contre les sorciers et alors qu’elle était sur le bûchere Asa promit de se venger et maudit toute la descendance de son frérot.
Les voyageurs – le docteur Kruvajan et son assistant Andrei Gorobec – étaient en route en Moldavie afin d’assister à une conférence médicale lorsqu’une roue de leur voiture se brisa. Pendant que le cocher réparait, nos deux petits curieux découvrirent une crypte où se trouve la tombe d’Asa. Alors qu’ils observent le masque mortuaire au travers du cercueil en verre, le docteur parvient à casser le panneau de verre et la croix s’y trouvant en tentant d’éloigner une chauve-souris ; il ne peut s’empêcher d’ôter le masque de mort de la jeune femme qui restait fort belle malgré ce masque – ses yeux ouverts sur l’éternité et d’une réelle méchanceté. Kruvajan se blesse au panneau de verre et une goutte de son sang tombe sur le visage d’Asa – les « festivités » vont pouvoir commencer.
Sortant de la tombe, les deux hommes rencontrent Katia, la descendante des Vajda et vivant portrait de la morte ; ils apprennent ainsi qu’elle vit au château voisin en compagnie de son père et son frère, château considéré comme hanté par les villageois.
Asa, que le sang de Kruvajan a ramené à la vie, contacte télépathiquement son amant mort et lui ordonne de sortir de son tombeau. Il se rend au château où le prince lui met un crucifix sous le nez, mais est tellement effrayé qu’il en reste paralysé. Katia et Constantin chargent un serviteur de rejoindre le médecin mais il est tué par le ressuscité, qui mène le docteur à la crypte où Asa est en pleine forme – et même en pleines formes, puisqu’elle boit tout le sang du toubib après une nuit de plaisirs multiples.
Désormais le docteur Kruvajan est un vampire et prêt à tout pour les beaux yeux (maléfiques) de la superbe créature démoniaque. L'innocente Katia sera la victime privilégiée des démons Asa et Javuto
Voilà quelque temps déjà que je n’avais pas « joué à me faire peur » le soir avant d’aller au lit !
Avec ce « Masque du démon », j’ai été servie (rires démoniaques, hurlements, ululements étranges, regards hallucinés) et pourtant j’ai déjà regardé pas mal de films de vampires – surtout ceux tournant autour du mythe de Dracula, néanmoins le réalisateur Mario Bava a voulu traiter le sujet de manière légèrement inusitée – je dis « légèrement », car il suffit tout de même d’une seule petite goutte de sang pour raviver la morte assoiffée de sang humain.
On y aborde toutefois des thèmes supplémentaires à celui du vampirisme pur et dur, entre autres celui du « double démoniaque » et de nécrophilie. Mario Bava appréciait particulièrement les romans gothiques anglais et leurs thèmes de sexualité réprimée, d’apparitions fantastiques, de malédictions; il a préféré développer ces thèmes dans son film, plutôt que de respecter à la lettre la nouvelle de Gogol.
Côté technique, Bava s’est inspiré de celle de Rouben Mamoulian dans « Jekyll & Hyde », afin de modifier les traits de l’actrice Barbara Steele. Il paraîtrait que cet effet d’altération des traits fut longtemps un secret – tout ce que l’on savait était que l’effet n’était possible qu’en noir&blanc.
Ce noir et blanc qui comme toujours – avec ses jeux d’ombres et de lumières – vous flanque une trouille pas possible.
Pour l’interprétation, on trouve Barbara Steele, dans le double rôle de la princesse Asa Vajda et Katja Vajda. J’ajouterais presque « évidemment » après « on trouve », car cette actrice anglaise a surtout joué dans des films d’épouvante, et plus particulièrement en Italie après qu’elle claqua la porte d’ Hollywood, n’hésitant pas à rompre un contrat pour un film avec Elvis Presley.
Ses rôles dans les films d’épouvante lui valurent une renommée mondiale, qu’elle n’apprécia guère, estimant que son talent méritait mieux que ça – elle tourna des petits rôles dans des films de Fellini, Louis Malle, Mario Monicelli, Volker Schlöndorf. Désormais, l’actrice est réconciliée avec son statut d’ « icône de l’épouvante », d’autant plus qu’elle tourna assez bien pour les Hammer studios, qui sont tout de même devenus « culte ».
Anton Pierfederici interprète le pope du village et franchement son maquillage m’a presque plus effrayée que tout le film (on dirait Raspoutine !)
Le jeune assistant Andrei Gorobec, amoureux de la jolie Katia, mais un peu perturbé par sa ressemblance avec Asa, est joué par John Richardson.
Je cite encore Andrea Checchi, dans le rôle du médecin qui tombe aux mains de la superbe vampire. Arturo Dominici est Javuto, l’amant d’Asa.
Ce film fut le premier entièrement réalisé par Mario Bava, qui auparavant avait déjà assisté Roberto Rossellini.
On dit aussi que son travail de cinématographe aidera des acteurs comme Gina Lollobrigida, Aldo Fabrizi et même Steve Reeves, à développer leur talent et devenir des personnalités tant à la ville qu’à l’écran.
C’est aussi Bava qui tourna le premier film policier italien « La ragazza che sapeva troppo ». Son influence sur le cinéma d’horreur et sci-fi est énorme, on dit qu’il inspira le premier « Alien » et « Friday the 13th », tout un programme ! Martin Scorsese le considère comme un génie dans le domaine du film d’horreur et Quentin Tarantino ne tarit pas d’éloges non plus.
Bref il est le maître incontesté du cinéma fantastique/horreur italien et le créateur du polar italien au cinéma (« il giallo »). Lorsque l’engouement pour le film d’horreur faiblira, Mario Bava s’essaiera au genre Western, mais sans succès malheureusement.
le réalisateur dans un clin d'oeil humoristique