CHAGALL ET LA BIBLE
Je laisse avant tout la parole à l’artiste, qui bien mieux que moi exprimera la passion de son art et de sa vie, je suis consciente que ma petite chronique sera bien imparfaite car comment bien parler d’une telle légende …
Il me semble que quelque chose m’aurait manqué si, à côté de la couleur, je ne m’étais pas occupé à un moment de ma vie de gravures et lithographies. … En tenant une pierre lithographique ou une plaque de cuivre, je croyais toucher un talisman. … En elles, il me semblait que je pouvais placer toutes mes joies, toutes mes peines.
Marc Chagall a toujours été un artiste libre et audacieux, qui aimait donner à son travail une interprétation tant poétique qu’artistique, qui se retrouve dans cette interprétation de la bible.
Le musée d’art et d’histoire du judaïsme s’est intéressé à la façon dont l’artiste considère la bible et s’en empare = Marc Chagall interprète la bible – se cantonnant particulièrement dans les sujets de l’ancien testament, la Torah.
Ce ne sont pas de simples illustrations, c’est une inspiration dans l’enseignement traditionnel = Moïse, les prophètes, les guerriers et les rois.
Les textes bibliques ont toujours inspiré l’art occidental, mais ce qui rend la bible intéressante, c’est la manière dont Chagall la lit et l’interprète avec un regard qui est non seulement celui du peintre mais aussi du poète. Sa vision mêle sa ville natale (Vitebsk en Russie) et ses multiples impressions de voyages.
Son désir évident fut de réancrer le monde juif, hérité de la bible, dans ses lieux d’origine. Il plante un décor qui se retrouve d’ailleurs dans les premières gouaches qui forment l’étude préalable à l’œuvre.
Ce projet d’illustration naquit de l’amitié entre Chagall et l’éditeur Ambroise Vollard dès 1923. Son élaboration commencera en 1930 et prendra corps après un long séjour du peintre en Palestine, en 1931, sur invitation du maire de Tel Aviv. Il ramena de ce séjour des vues des lieux saints et peindra des paysages qu’il considère comme des « croquis de voyages ».
Le travail sera interrompu pendant la guerre, Marc Chagall le reprendra avec le successeur de Vollard. Le résultat en sera une bible illustrée de 105 gravures à l’eau-forte, accompagnées de versets choisis par l’artiste. Une centaine d’exemplaires sont rehaussés à la gouache de la main même de Chagall ; le musée expose l’exemplaire réalisé pour son épouse Vava.
« Il est intéressant de découvrir comment Marc Chagall a contourné à sa manière, sans pour cela l’enfreindre, l’interdit dans le judaïsme de la représentation divine.
Cette exposition est une invitation à découvrir Chagall, au-delà des évidences (Benoît de Sagazan). »
J’ai donc ouvert les yeux et le cœur pour découvrir plusieurs eaux-fortes, à la pointe sèche, sur le même sujet avec juste une très subtile pointe de couleur (gouache).
Marc Chagall propose un langage pictural qui prend sa source dans le judaïsme - Chaque peinture, chaque dessin, sont riches de détails à côté d’une apparente simplicité =
Les filles de Lot
Noé libérant la colombe
Abraham pleurant Sarah
La parabole de Jacob et sa lutte avec l’ange
L’histoire de Moïse
L’histoire de Joseph en Egypte
Les chariots de feu de la vision d’Ezechiel
Samson et Delila
Et tant d’autres sujets.
Après la salle où l’on peut admirer cette vaste collection d’ eaux-fortes et gravures, quelques belles huiles nous sont proposées, concernant le voyage de Chagall à Jerusalem en 1931. La visite se termine sur les maquettes destinées aux vitraux de l’hôpital Hadassah de Jerusalem.
Marc Chagall, je l’aime depuis de très longues années – depuis que je l’ai découvert dans mes cours d’histoire de l’art et que mon mari me le fit découvrir plus en détail.
Par ailleurs, j’avais eu, il y a un certain temps déjà, le grand plaisir de visiter une rétrospective de l’œuvre de ce peintre et j’avais été particulièrement touchée par la plupart des sujets (le cirque, les femmes…).
Ici j’ai découvert un aspect qui pourrait passer, chez le profane, pour de l’art religieux – ce n’est pas cela, on découvre dans ces multiples scènes de la vie d’Abraham et des autres, des réminiscences de la vie des shtetls, ces petits villages de Russie où toute la communauté se retrouve.
J’ai lu l’ancien testament et la mécréante que je suis, découvre grâce à cette exposition une autre manière de l’illustrer, qui touche bien plus au sacré que n’importe quelle peinture religieuse.
les vitraux
(ma petite chronique sur la vie de Marc Chagall par rapport à la bible, est une libre adaptation de l’article de Benoït de Sagazan dans le livret « Le Monde de la bible » - les illustrations ont été copiées de ce même livret ainsi que du programme de l’exposition).