THE RAIN BEFORE IT FALLS, de Jonathan Coe
Titre français = La Pluie avant qu’elle tombe
Rosamond, la tante de Gill, vient de mourir ; après les funérailles, Gill décide de s’occuper de la succession de sa tante – il lui faut notamment retrouver la trace d’une certaine « Imogen » afin de lui remettre une série de cassettes – une sorte de « testament affectif » qu’elle lègue à Imogen, en plus d’une somme d’argent.
N’étant pas arrivée à localiser Imogen, Gill se décide – en compagnie de ses deux filles – à écouter les cassettes qui sont accompagnées d’une série de photographies – chacune représentant une page de la vie de Rosamond, Beatrix, Thea et finalement Imogen.
Pourquoi me suis-je sentie aussi peu « touchée » par cette histoire contée sur un ton froid et détaché ? est-ce parce que l’on se retrouve dans un schéma classique de filles blessées devenant à leur tour des mères toxiques ? Je crois que c’est le détachement du ton qui m’a finalement éloignée de ce que le roman apportait.
Parallèlement à l’histoire de Rosamond et de trois générations de femmes, le lecteur découvre un peu de la vie de Gill, peu heureuse dans un mariage où elle n’a cependant rien à reprocher à son époux, sauf d’être totalement différent d’elle et de ne pas vraiment la comprendre. Ses relations avec ses filles ne sont pas mauvaises par contre.
On y aborde aussi de manière très discrète et d’autant plus intéressante, le problème de l’homosexualité féminine, mal reçue par l’entourage même immédiat. Préjugés, rancoeurs, indifférence et haine, toute la gamme de ce que les êtres humains éprouvent ou n’éprouvent pas, famille disloquée – et la tendresse dans tout cela ? seule Rosamond semble capable de l’éprouver.
Le roman de Jonathan Coe n’a pas été sans me rappeler « Va’ dove ti porta il cuore » de Susanna Tamaro, mais en beaucoup moins larmoyant ; dans le roman de Tamaro, une narratrice âgée souhaite raconter à sa petite-fille, partie aux Etats-Unis, leur histoire familiale, leurs secrets qui les menèrent où elles en sont. Là on tombe, par contre, dans l’effet contraire du détachement de Coe.
Néanmoins, le livre de Jonathan Coe est à lire, c’est incontestable et indéniable, c’est fort joliment écrit, simple et clair, mais il y manque quelque chose ; si le livre de Susanna Tamaro est trop mélodramatique, celui de Coe est froid et distant, purement analytique.
La narration est froide, sans émotion et du coup je n’ai pas ressenti beaucoup d’émotion moi-même. Même la complicité enfantine entre Rosamond et Beatrix m’a peu touchée. En fait toute cette histoire m’a donné une sensation de superficialité et détachement ; je n’ai même pas été touchée par la cruauté de certains personnages. Peut-être ce ton détaché de Rosamond est dû au fait qu’elle se sait mourante, donc ne faisant déjà plus partie de ce monde dont elle parle.
Comment raconter des secrets de famille sans tomber soit dans l’excès de sentimentalisme, soit dans la froideur calme d’une narration qui décortique les cœurs comme un médecin-légiste analyse la victime d’un crime ?
Un homme écrivant une vie de femme, est-ce là que le bât blesse ? pas nécessairement, bien des hommes ont raconté des histoires de femmes avec une certaine réussite. Et puis, si c’est pour en arriver au pathos de Tamaro, je ne suis guère plus positive.
L’auteur Jonathan Coe – que l’on connaît plutôt pour ses romans politico-sarcastiques – a voulu avec cette histoire rendre hommage à la romancière Rosamond Lehmann, auteure britannique, amie du groupe de Bloomsbury.
C’est à elle qu’il pensa – paraît-il – en créant le personnage de Rosamond, la narratrice du roman « The Rain before it falls » et je ne peux m'empêcher de voir dans son livre une sorte de pastiche des romans mélancoliques de Ms. Lehmann. Dont la soeur s'appelait aussi "Beatrix" et était comédienne - je ne crois pas totalement au hasard.
Je pense que c’est le titre – ce qu’il représente pour la Rosamond du roman – qui m’a finalement le plus charmée.
Je le répète, le livre de Jonathan Coe doit être lu, mais je ne peux m’empêcher de me dire que l’on a porté ce livre aux nues parce que Coe est un écrivain à la mode et je n’aurais pas acheté son livre, s’il n’avait pas été mis à la une dans l’un de mes multiples « antres de perdition » mais aussi parce que j'avais assisté à une conférence de Jonathan Coe qui m’avait littéralement emballée – et je pensais naïvement retrouver ce ton dans le roman. Personnellement, je vais relire Rosamond Lehmann que j'avais découverte très jeune et dont j'ai un peu oublié les romans, je dois l'avouer.
Ce livre était une lecture commune avec Manu, GeorgeSand, Restling, Karine :) et quelques autres, dont les avis sont non seulement plus positifs, mais nettement plus intéressants que le mien.
(Si vous pouviez ne pas trop me haïr après cet avis, cela me ferait bien plaisir.)