JEUNE FILLE ENDORMIE, de Jean Cocteau
Dans l’un de mes petits livres sur le mouvement symboliste en littérature- et son corolaire immédiat = le surréalisme, j’ai trouvé ce joli poème de Jean Cocteau, paru dans « Opéra ». Composé en 1925, cet extrait paraîtra deux ans plus tard. Il se présente comme une réflexion sur le sommeil et le rêve. Celui que fait peut-être la charmante, mais aussi celui qu’elle suscite chez le poète en la contemplant.
Pour Jean Cocteau, l’irréel est en nous, il nous suffit pour le découvrir de dormir et rêver. Le poème, comme le sommeil, est une rupture du quotidien, la fascination, les dangers et les bienfaits des songes.
Rendez-vous derrière l’arbre à songe ;
Encore faut-il savoir auquel aller.
Souvent on embrouille les anges,
Victime du mancenillier.
Nous qui savons ce que ce geste attire :
Quitter le bal et les buveurs de vin,
A bonne distance des tirs
Nous ne dormirons pas en vain.
Dormons sous un prétexte quelconque,
Par exemple : voler ne rêve ;
Et mettons-nous en forme de quinconce,
Pour surprendre les rendez-vous.
C’est le sommeil qui fait ta poésie,
Jeune fille avec un seul grand bras paresseux ;
Déjà le rêve à grand spectacle t’a saisie
Et plus rien d’autre ne t’intéresse.
J’ai choisi d’illustrer ce joli poème par la « Belle endormie = June flamboyante », « Flaming June » du peintre Frederick Leighton, qui fit partie des pré-raphaélites.
La jeune femme du tableau est sa compagne, Dorothy Dene (née Ada Alice Pullen), actrice, connue pour sa beauté = un teint clair, des grands yeux violets, une chevelure blond vénitien, légèrement plus grande que la moyenne. A 40 ans (peu avant son décès) elle était encore considérée comme l’une des plus belles femmes d’Angleterre.