PROMENADES DANS DES JARDINS ANGLAIS - 2
SISSINHURST GARDENS & CASTLE
La pluie nous accueille pour cette première promenade dans l’un des jardins anglais qui fut à l’origine de mon envie de voyage (les voyages en groupe ne sont pas ma « cup of tea », mais on fait avec ce qu’on a dans la vie !). J’y étais déjà allée – voir ma petite chronique « Les Jardins enchanteurs et enchantés de Sissinghurst ». A l’époque, ce fut sous un très beau soleil, mais la pluie n’a pu entamer mon enthousiasme à revenir à Sissinghurst, je me sens trop d’affinités avec Vita Sackville-West & Harold Nicolson, qui transformèrent les lieux et l’habitent encore de leurs âmes.
Le terme « hurst » est un mot de l’ancien saxon, signifiant « clairière dans les bois ». Si à l’origine Sissinghurst fut surtout une forteresse, tellement bien bâtie qu’Edward Ier d’Angleterre consentit à y résider – le domaine fut acheté au 15ème siècle par un certain Thomas Baker. L’un de ses successeurs lui donna sa façade en briques rouges, très typique à l’époque d’Henri VIII dont ce successeur fut un membre de la chambre privée.
Les Baker étaient apparentés aux Sackville-West, dont le membre le plus célèbre est la romancière Vita Sackville-West, qui défraya la chronique par ses amours homosexuelles avec notamment Violet Trefusis (qui causa scandale) et qui fut aussi une amie intime de Virginia Woolf, une autre romancière que j’apprécie particulièrement.
Lorsqu’en 1930 Vita Sackville-West, mariée à Harold Nicolson, décida d’acheter le domaine, leur fils Nigel (le gentleman de Sissinghurst) alors tout jeune et ayant accompagné sa mère, lui dit d’un ton très inquiet « on ne va tout de même pas vivre ici n’est ce pas ? ».
Sissinghurst au moment où Vita & Harold le sauvèrent n’était plus que ruines et champs de pommes de terre.
Les Jardins de Sissinghurst furent inspirés par les jardins de Gertrude Jekyll et Edwin Lutyens ; Vita et Harold qui conçurent eux-mêmes les plans de ce que les Jardins sont actuellement – ce qui fait parfois dire aux jardiniers professionnels que « ce jardin ne peut pas être considéré comme un modèle ».
Ce n’était d’ailleurs pas le but de Vita Sackville-West, ce qu’elle voulait c’était SON jardin à elle, comme elle le concevait.
La propriété est divisée par des murets et des haies en plusieurs petits jardins isolés, dont le bijou est le « White Garden », où tout ce qui est planté doit fleurir en blanc. Tout y est intime, romantique à souhait, bien étudié pour inspiré la sérénité et l’envie de s’installer sur un banc et rêver. Moi dans ce jardin, c’est comme « Alice au Pays des Merveilles », même sous la pluie !
La roseraie n’avait pas encore beaucoup de fleurs (sauf dans le White Garden) – tout a fleuri plus tard cette année, par contre il y avait tant d’autres fleurs.
Ce qui est aussi très frappant dans tous les jardins visités sont les « prairies sauvages », à savoir des coins où l’herbe n’est pas tondue, afin de laisser proliférer ce que l’on appelle souvent « mauvaises herbes », mais aussi les fleurs sauvages et simples (comme certaines orchidées) afin que les abeilles puissent butiner autres choses que des fleurs cultivées.
Visiter la « porte » d’entrée – le bâtiment central en briques rouges – est un moment émouvant car on y découvre son bureau, sa bibliothèque .
Cela me frappera aussi lorsque je visiterai « Bateman’s House », la résidence de Rudyard Kipling – de ressentir cette « présence » dans leurs lieux de vie de tous ces écrivains que j’apprécie.
Le National Trust prit le domaine en charge dans les années 60 – Nigel Nicolson (si vous cliquez sur le nom, vous pourrez lire ce que j'ai eu le plaisir d'écrire à son sujet) et à présent son fils Adam, y sont « Residents Donors » - ils résident là et gèrent le domaine avec le N.T., en souvenir de la donation que fit la famille. Cette donation fut faite par Nigel Nicolson afin d’éviter les très lourdes taxes d’héritage.
Adam Nicolson et son épouse ont d’ailleurs l’intention de restaurer l’agriculture traditionnelle de la région dans la ferme attenant au domaine, les ingrédients de la ferme servent à alimenter le sympathique petite restaurant du lieu (à l’éxtérieur) afin que les produits servis soient toujours frais et de saison.
Comme l’a écrit Adam Nicolson dans son autobiographie = Sissinghurst est une histoire jamais finie.
Quant à moi je ne regrette qu’une chose = c’est ne pouvoir partager avec vous les senteurs merveilleuses qu’exhalaient tous les lieux où je me promenais, parfums accentués par la pluie.
A Sissinghurst, le temps s'arrêt et le bonheur de vivre s'installe.