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mon bonheur est dans la ville
24 avril 2010

FEMMES PEINTRES & SALONS AU TEMPS DE PROUST

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De Madeleine Lemaire à Berthe Morisot

Exposition temporaire au Musée Marmottan-Monet

Un parcours d’exposition particulièrement gracieux et même sophistiqué s’ouvre aux visiteurs dans les salles du rez-de-chaussée du musée, un ravissant hôtel particlier qui se prête merveilleusement bien à cette reconstitution. C’est là que j’en apprendrai plein sur les salons du 19ème siècle, tellement à la mode et si joliment décrits dans « La Recherche du Temps perdu » de Marcel Proust. 

Cette mode des salons est aujourd’hui totalement révolue, l’ambiance y était à la fois brillante et feutrée. En dehors des tableaux, des vitrines contiennent des témoignages d’époque, des partitions musicales, des lettres, des aquarelles bien sûr, mais aussi de très beaux objets d’art.

C’est donc par la salle à manger et la rotonde que commence ce parcours rempli de très jolis fantômes et d’un brin de nostalgie qui nous emmène à travers quatre des plus célèbres salons du 19ème siècle.   Voici donc cez rendez-vous incontournables =

Dès la rotonde, à l’entrée, on y trouve un superbe horloge de la manufacture de Sèvres, le cadran étant constitué de 12 sujets historiques – le dessus représente à la fois Diane et Apollon – Apollon, le jour/Diane, la nuit – le buste pivote au changement de l’heure dans la journée, soit à 4 h et à 16 heures.

Les mercredis – chez Madame Marguerite de Saint-Marceau, Salon de musique et discussions = « Meg » de St-Marceau était issue d’une famille de drapiers du côté de son père et d’une dynastie d’entrepreneurs en maçonnerie du côté maternel. Elle tint salon pendant plus de 50 ans. Chacun y était libre d’écouter de la musique et/ou de discuter et lire. La simplicité vestimentaire y est de mise, Meg refuse les habits mondains puisque chacun était supposé produire une œuvre d’art ou de le faire découvrir aux autres. La musique prédomine ce salon ; Debussy, Fauré, Dukas y jouent du piano. Isadora Duncan y danse accompagnée de Maurice Ravel.  En dehors de ces musiciens, on y trouve aussi Dumas fils, Willy & Colette, d’Annunzio ou Victorien Sardou.

D’autres mercredis – chez la princesse Mathilde, Salon littéraire et refuge de la noblesse d’Empire =

La princesse Mathilde est la cousine de Napoléon III – son salon est le plus important de Paris, les frères Goncourt le considèrent comme le vrai salon littéraire du 19ème siècle ; ils disent aussi que la princesse est l’image même de la « femme moderne » !!. C’est un salon sans étiquette politique, on y discute avec une certaine liberté d’expression. La princesse sera un grand mécène grâce à son mariage avec le richissime prince Demidoff. A la chute de l’empire, la princesse – après un détour par Bruxelles – revient dans la capitale et  son salon reprend ; les écrivains dominent : Anatole France, Maurice Barrès, de Heredia, etc. Raynaldo Hahn y fait ses débuts, il s’accompagne au piano sur des airs de Jacques Offenbach.

Le salon est meublé à la mode napoléonnienne, que Boni de Castellane qualifie de « peluche » et trouve hideuse. Le jeune Marcel Proust note la verdeur quasi populaire du langage de ceux qui le fréquentent.

35Dans cette salle se trouvent quelques jolies peintures de Louise Abbema, tel le joli portrait de Sarah Bernhardt mais aussi des aquarelles de Madeleine Lemaire – des fleurs surtout – et un joli paysage de Rosa Bonheur, ainsi qu’une allégorie d’anniversaire de mariage également de la main de cette artiste. De Madeleine Lemaire toujours, des aquarelles reflétant à la perfection la mode de l’époque.

Un amusant dessin et gouache de Gustave Geoffrey (un ami de Claude Monet) propose sa « Scène de la vie mondaine », situé probablement à Monte-Carlo, dans lequel se retrouvent légèrement caricaturées de nombreuses personnalités célèbres de son temps, comme Leopold II roi des Belges, Camille Saint-Saens, etc.

L’époque napoléonienne s’est découvert une passion pour les Etrusques et de « faux objets » étrusques font partie, avec le mobilier inspiré de cette civilisation antique, de la décoration.

Et toujours, dans les vitrines, de jolis objets d’art comme cette gourde de Gallé, maître verrier, ou ailleurs un joli vase à long col, du même Gallé.

Mardis, les rendez-vous des Polignac – Salon musical – Winaretta Singer, héritière des machines à coudre bien connues, a épousé le prince Edmond de Polignac ; chez ce couple, c’est la musique d’avant-garde qui domine. La princesse et son mari soutiennent bon nombre de musiciens notamment ; elle veillera de près à la création musicale, aidera les Ballets Russe et l’Opéra de Paris. Maurice Ravel, Gabriel Fauré, Emmanuel Chabrier, Manuel de Falla sont parmi les familiers – elle commandera aussi des pièces à Erik Satie et à Igor Stravinski. Parmi les fidèles du salon, on trouve encore Colette, Jean Cocteau, et bien sûr Marcel Proust.

Devenue veuve, la princesse de Polignac poursuivra son mécénat et créera la fondation Singer-Polignac.

Le salon de Madeleine Lemaire, femme peintre, libre et indépendante (ainsi qu’elle se définissait elle-même). C’est l’un des salons les plus fréquentés de la belle époque. Proust le surnomme « la cour aux lilas et l’atelier des roses ». Madeleine Jeanne Lemaire est issue de la noblesse d’Empire, elle fut l’égérie d’Alexandre Dumas fils. Dans les « Plaisirs et les Jours », Anatole France la décrit comme « la main divine qui répand les roses avec leur rosée », et croyez-moi sur parole, cette image est réelle, car les aquarelles des roses de Madeleine Lemaire sont un véritable bonheur à regarder.

Chez elle, le théâtre occupe une place privilégiée : une scène est installée dans l’atelier, où se produisent Réjane – un joli portrait d’elle y figure – mais aussi Sarah Bernhardt, Jane Hading, etc. Toutefois, la musique a aussi sa place dans son salon ; Raynaldo Hahn s’y produit, ainsi que Saint-Saens ou Massenet.

Durant l’été, la « saison » continue et Madeleine Lemaire se déplace à Dieppe où Proust lui rend souvent visite.

Dans son salon, on trouve encore Victorien Sardou, Paul Deschanel ou le peintre Jean Béraud. Dans cette pièce consacrée au « salon Lemaire », on trouve un « Champ de Tulipes » de Claude Monet, un portrait du jeune Cocteau, et un beau buste en terre cuite de la main du sculpteur Jean-Baptiste Carpeaux.

Après ces jolis salons, d’intérêt tant artistique que  historique – dont certains détails m’ont irrémédiablement fait penser aux descriptions vestimentaires dans les romans d’Anne Perry ou dans le Paris du 19ème peint par Jean Béraud, que l’on retrouve dans les romans de Claude Izner -  il est temps de passer à la petite pièce réservée aux Femmes Peintres qui avaient pour nom Madeleine Lemaire, Rosa Bonheur, Berthe Morisot.

Pour y accéder, on passe par un long couloir où se trouve un tableau à l’huile de grande dimension, peint par Madeleine Lemaire et intitulé « Le Char aux Fées » - vous dire ce que j’ai ressenti devant ces fées pleines de vie, d’humour, de drôlerie, serait plutôt plat et je n’ai hélas pas d’illustration.

children_at_the_basBerthe Morisot = était l’arrière-petite-fille de Fragonard. Elle prend ses premiers cours de peinture et dessin à 16 ans, chez Corot.  Elle rencontre ensuite Edouard Manet dont elle épouse le frère, Eugène. Sa première exposition personnelle sera en 1892. Avec Camille Pissarro, elle sera la seule artiste dont les tableaux auront été présentés à TOUTES les expositions impressionnistes, sauf en 1870, année où naît Julie, sa fille. Berthe Morisot aimait peindre les femmes, les enfants, les scènes de famille.

9780789209320_interior03 berthe_morisot Berthe_Morisot_1885_XX_Self_Portrait

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41_00102545__madeleine_lemaire_musikalische_unterhaltung_um_1830Madeleine Lemaire = femme importante dans le domaine culturel de la fin du 19ème siècle, elle est une aquarelliste qui réussira bien sa vie de peintre. Elle fut formée par Mathilde Herbelin, une miniaturiste connue. A 33 ans, elle fonde la société des aquarellistes français, puis la société des pastellistes et devient membre du Femina. Elle sera aussi pendant 25 ans professeur au muséum d’histoire naturelle. Féministe aussi, elle luttera pour que les femmes peintres soient reconnues au même titre que leurs collègues masculins.

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Rosa Bonheur = de son vrai nom Marie Rosalie Bonheur est une peintre animalière et aussi une figure du féministe. Autodidacte, elle a appris les rudiments du métier de peintre auprès de son père et de Léon Coignet. Comme Sarah Bernhardt, elle fut considérée comme l’un des « monstres sacrés » du 19ème siècle.

Louise Breslau = née à Munich et élevée à Zurich, elle débute sa formation chez Edouard Pfyffer. En 1876, elle s’installe définitivement à Paris où elle fréquente l’académie Julian, l’un des rares endroits qui autorise les jeunes fille à étudier. Elle a été la seule étudiante de l’atelier des femmes de Julian à faire ses débuts au Salon de Paris.

Bernhardt_Sarah__Abbema_Louise1Louise Abbéma = c’est son père qui l’oriente vers le dessin ; elle suit l’enseignement de Chaplin où elle côtoie Madeleine Lemaire ; elle sera aussi l’élève de Henner et Carolus-Duran. Elle est peintre, graveur et sculpteur ; elle devient l’amie intime de Sarah Bernhardt grâce à laquelle elle est lancée dans la société. Son œuvre est très variée, Louise Abbéma n’a jamais vraiment voulu se cantonner dans un seul genre  même si elle affectionne les sujets floraux. Elle a travaillé pour des revues, a effectué des portraits de personnages de la haute société, des éventails et des dessins publicitaires notamment.

11002526_1Toujours dans le couloir, avant d’accéder à la pièce des « dames »,  on découvre un portrait d’Yvette Guilbert qui semble sorti tout droit des pinceaux de Toulouse-Lautrec, mais il s’agit d’une peinture de Jules Chéret, qui servira ultérieurement à une affiche pour le Concert Parisien ;

En dehors de Rosa Bonheur, Berthe Morisot et Madeleine Lemaire, la salle "Femmes Peintres" offre aussi au regard des visiteurs de jolis portraits peints par Louise Abbéma.

Ici encore deux portraits de fées par Mme Lemaire, plus rêveuses cette fois. Personnellement, bien que ces fées-ci soient superbes, tant dans leur beauté naturelle que dans leur habillement, ce sont les Fées du « Char » que j’ai préféré tant il y avait d’humour et de gaîté dans cette peinture.

Il est temps de quitter ce rez-de-chaussée rempli de charme – non sans avoir découvert dans une vitrine quelques souvenirs concernant la princesse Marguerite de Savoir, dans le salon Madeleine Lemaire – un joli portrait d’abord, ensuite un carnet personnels.

J’y apprends que cette reine était une protectrice des arts et des lettres, passionnée d’alpinisme – elle fut la première femme alpiniste à escalader le Mont Rose dans les Alpes. C’est aussi en son honneur que fut créée la « Pizza Margherita », aux trois couleurs de l’Italie = le rouge (tomates), le blanc (mozzarella), le vert (pesto au basilic).

Dans le couloir qui mène au sous-sol, entièrement consacré à Claude Monet, on découvre deux de ses palettes ainsi qu’un buste du peintre par Paul Paulin.

monetparlmarmottanEt ensuite, la merveilleuse salle dans laquelle je découvre avec beaucoup d’émotion l’une des peintures préférées de mon époux = le « Parlement londonien sur les bords de la Tamise », des « Nymphéas » aussi bien sûr,  des œuvres aux couleurs nettement plus fortes que celles que l’on attribue généralement à ce peintre. Beaucoup de portraits aussi de Julie Manet, sa jeune nièce. Et surtout ce fameux « Impression de soleil levant » qui fera sourire ironiquement un critique d’art et qui baptisera du coup tout ce mouvement d’ « Impressionniste ».

nenuphar_de_claude_monet monettulipe MonetImpressionSoleilLevant

artwork_images_3275998_258025_berthe_morisotDe la collection personnelle de Manet, dans une salle plus petite, on trouve des dessins d’Eugène Delacroix, de Gauguin, Degas, Signac, Pissarro, ainsi que des pastels, des aquarelles en petits formats et ce joli croquis attribué à Berthe Morisot de sa fille Julie au petit chat – dont le portrait à l’huile sera réalisé par Renoir.

proustJ’ai terminé ma visite par l’étage où est à nouveau ouverte la salle des Enluminures – où des miniatures, des enluminures de missel, et bien d’autres œuvres d’une richesse exceptionnelle s’offrent au regard du visiteur. Avant de sortir, je n’ai pu m’empêcher de passer par la boutique, avec l’intention de n’acheter que quelques cartes – et un livre consacré à Marcel Proust m’a alors tendu les bras, en me faisant comprendre qu’il était tout petit, donc pas cher, et qu’il ne demandait qu’à être lu par moi.

Cette petite chronique est un résumé des informations figurant à la fois dans les salles d’exposition et dans le dossier de presse.

Les quelques illustrations ont été trouvées dans la bibliothèque d’images de google et ne représentent pas toutes ce qui était exposé, mais elles servent à illustrer ma petite chronique. (Je regrette particulièrement n’avoir trouvé aucune reproduction de ce merveilleux « Char aux fées » de Madeleine Lemaire.)

exterieur

un tout petit regret = l'extérieur du musée est inaccessible, pourtant il s'agit d'un bien joli jardin =

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Commentaires
N
merci pour ton commentaire si positif - je note donc le livre que recommande georgesand sur ma LAL, mais à ce rythme le nouveau petit carnet sera rapidement plein ! :lol:
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N
une bien jolie expo que j'aurais aimmée voir également, j'adore tous ces salons littéraires très rafinnées et très cultivées. j'ai lu une biographioe de la reine mathilde je crois de castelot, et c'est là que j'avais pu voir l'ampleur de son salon l'auteur du livre y fait référence. <br /> <br /> Pour berthe Morisot j'aodre cette peintre et oui le livre est très bien il existe en livre d epoche c'est celui là qui est tjrs dans ma pal et que j'avaic commencé.lelivre est trs vivant. <br /> <br /> Merci de nous faire voyager avec cette magnifique expo. L'impressionniste c'est la peinture que je préfère avec bien sûre. je pense que tu auras du beau temps en France il y a du vent par contre et l'air est froid alors bonne promenade dans notre pays cela nous permettra de lire tes impressions avec le plus grand bonheur. Tu vas arriver bien à Giverny c'est la bonne période pour aller se perdre chez lui avec le plus grand bonheur!amitiés et bonnes vacances
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N
j'étais dans mon élément pour l'admiration du travail des autres - les fleurs ne sont pas mon sujet préféré, je les peignais pour faire plaisir à mon amie et pour apprendre, mais je préfère les paysages
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N
Niki a écrit:<br /> " mais aussi des aquarelles de Madeleine Lemaire – des fleurs surtout –"<br /> Tu étais donc dans ton élément! :-)) <br /> <br /> Quand j'ai commencé à m'interesser à la peinture, c'est l'époque impressionniste qui m'a " touchée", et en découvrant les peintres qui constituaient cette " ecole" j'ai beaucoup aimé les toiles de Berthe Morisot même si effectivement la plupart d'entre elles ne représentent pas des fleurs ou la campagne, mes sujets de prédilection. <br /> Une exposition que j'aurais beaucoup aimé parcourir....
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N
c'est gentil de venir me dire un petit coucou ;)<br /> je note la biographie dont tu parles, car j'aime beaucoup berthe morisot
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