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mon bonheur est dans la ville
19 juillet 2009

GREEN DOLPHIN COUNTRY, d'Elizabeth Goudge

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Titre français = Le Pays du Dauphin vert


Quelque part dans l’une des îles anglo-normandes vit la famille Le Patourel, une famille aisée composée du père, de la mère et de leurs deux filles aussi dissemblables que le jour et la nuit. Marianne l’aînée, petite et maigre, brune, très intelligente et consciente de cette intelligence au point de déjà, toute jeune, contester et défier ce qu’on lui explique.

Marguerite est sa cadette de quatre années, toute en douceur et tendresse, blonde et toujours souriante, au caractère facile, acceptant toutes les règles sans jamais discuter. Etre auprès de Marguerite, c’est comme être assis dans un rayon de soleil, chaud et lumineux.

C’est dans cette quiétude bourgeoise de leur existence que surgissent les Ozanne père et fils ; immédiatement les deux sœurs se prennent d’affection pour William, qui est immédiatement attiré par la tendre Marguerite.

Cette tendresse va se muer en amour au fil des années ; c’est oublier que Marianne a elle aussi jeté son dévolu sur William ; elle est certaine que c’est d’elle dont il aura besoin pour réaliser sa destinée ; elle l’aidera toute leur jeunesse dans ses études afin qu’il travaille tant et plus pour devenir le superbe capitaine de la Royal Navy qu’il devient.

Lorsqu’il embarque avec son bateau pour la Chine, William Ozanne a fait comprendre son amour à Marguerite. Le destin va leur jeter un vilain tour. Volé et drogué quelque part à Shanghai pendant que son bateau est à quai, William rate le départ. Etant quelqu’un de peu de décision, il prend la mauvaise décision et s’embarque sur un voilier marchand pour la Nouvelle-Zélande. Le capitaine O’Hara reconnaît William, il est le capitaine du « Dauphin Vert », il a abordé à Saint-Pierre en son temps ; pris de pitié, il laisse le garçon aux soins de Ti Hairuru, nom donné par les Maoris à Timothy Haslam, qui fait désormais le commerce du bois. L’affaire est prospère et grâce à sa détermination, William Ozanne devient l’ami et l’associé de Ti Hairuru.

Grâce à cette bonne fortune, dix années après avoir quitté l’île où vit celle qu’il aime, il peut enfin écrire à Mr Le Patourel pour lui demander la main de sa fille ; hélas, William a toujours eu des difficultés à retenir les noms des gens et au lieu de demander la main de Marguerite, il écrit « Marianne ».

Marguerite a le cœur brisé, mais n’en montre rien, au contraire elle persuade ses parents de donner leur accord à cette union et Marianne s’embarque pour la Nouvelle-Zélande.

Lorsqu’il l’aperçoit de loin, William Ozanne sait qu’il s’est trompé dans sa lettre, mais il est trop tard et comme c’est un homme qui a le cœur profondément bon, il n’en montre rien et épouse Marianne.

Dire qu’ils seront heureux est très exagéré ; William ne va pas montrer à Marianne toute la chaleur qu’elle espérait et de son côté, Marianne va immédiatement prendre Ti Haruru en grippe, elle ne supporte aucune autre personne dans le cœur de son mari. Même leur petite fille Véronique deviendra sa propriété, au point qu’elle choisira un mari pour elle. Mais là, enfin, William, tiendra tête à son épouse.

Pendant ce temps, restée au pays, Marguerite dévastée par la colère et le chagrin entre au couvent ; dans ce refuge elle retrouvera la paix du cœur et peut-être la force de pardonner à sa sœur.

En Nouvelle-Zélande, la vie des pionniers ne s’avère pas facile car le peuple maori n’accepte pas de se faire voler les terres par les Blancs. Et dans cette vie de désamour et de guerre, comment William et Marianne pourront-ils survivre ?

Malgré quelques clichés et mièvreries, « Green Dolphin Country » est intéressant à lire, c’est une formidable galerie de portraits assez attachants.

C’est un rman écrit au 20ème siècle, mais qui est une sorte de miroir des romans du 19ème.

Il est « découpé » en quatre livres, quatre îles en quelque sorte : l’île de l’enfance de Marianne, Marguerite et William, l’île de la vie d’adulte, la Nouvelle-Zélande où William a refait une vie qu’il souhaite partager avec Marguerite.

Ensuite le roman de la fin d’un monde et enfin l’île des verts pâturages, celle de la quiétude revenue dans les cœurs. Je n’ai qu’un léger reproche à faire, c’est le ton parfois vieillot, mais je pense qu’il s’agit là d’un choix délibéré d’Elizabeth Goudge ayant situé son histoire un siècle précédant celui où elle vivait. 

 

Bien qu’il s’agisse d’une œuvre de pure fiction, la base du roman est tirée d’une anecdote réelle, celle d’un homme ayant émigré afin de faire fortune et écrivant au pays afin de demander la main d’une jeune fille qu’il aimait, il s’est trompé dans le prénom et c’est sa sœur qui est arrivée à la place. L’homme, conscient de son erreur, se comporta en gentleman, se tut et épousa la jeune fille arrivée auprès de lui. Le couple ne fut pas malheureux.


On peut dire que la comparaison entre l’anecdote réelle et la manière dont Elizabeth Goudge la romança s’arrête là, car la méprise de William Ozanne rendit au moins deux personnes profondément malheureuses et la troisième ne fut pas plus satisfaite non plus.
C’est l’histoire d’un rendez-vous manqué avec le bonheur et l’amour, c’est aussi l’histoire d’un orgueil démesuré qui empêche les êtres de se donner corps et âme à l’autre, sans égoïsme et arrière-pensée.

 

Mais pour satisfaire Marianne Ozanne, née Le Patourel, il eût fallu être la perfection même.

Marianne est certainement l’un des caractères les plus complexes qu’il m’ait été donné de croiser dans la littérature, elle peut passer du plus profond mépris à la plus grande compassion. Elle est tellement exigente avec elle-même qu’elle ne conçoit même pas la moindre faiblesse chez les autres. Ce qu’elle souhaite le plus désespérément c’est être aimée pour elle-même, seulement son caractère entier et possessif jusqu’à la jalousie la rend manipulatrice et, du coup, très souvent profondément antipathique.

Jusqu’à ce qu’un moment de lucidité face à sa propre faiblesse fasse craquer la rigidité dans laquelle elle s’enveloppe.

J’ai eu à l’égard de ce personnage de roman une relation étrange en tant que lectrice : j’ai eu pour elle une profonde tendresse face à ce malheur qu’elle forge presque involontairement, mais je l’ai aussi détestée pour ne pas mieux comprendre les autres.
Sans arrêt, Marianne Ozanne est persuadée qu’elle a raison, rien ne la fait dévier de cette idée, ses rares moments de doute sont rapidement balayés par cette conviction qu’elle a qu’elle seule peut faire le bonheur des autres à condition qu’ils fassent ce qu’elle a décidé pour eux.
C’est fascinant et effrayant comme personnage.

J’ai trouvé cependant fort « cliché » les personnages dont la romancière entoure l’inflexible Marianne, tous sont gentils, souples, aimables, prêts à lui faire plaisir, préférant fléchir devant elle qu’entamer les hostilités éventuelles en la contrariant.

On a vraiment envie de les secouer tous, en leur disant d’arrêter de se taire et de faire son jeu. Il y a vraiment beaucoup de lâcheté dans les autres personnages du roman.
Il y en a tout de même quelques-uns qui lui tiennent tête, mais ils sont très peu nombreux.

Ce ne sera que parvenue au seuil de la vieillesse que Marianne réalisera enfin que pour être en paix avec les autres, il faut être en paix avec soi. Car ce que l’on peut dire de l’héroïne de ce roman, c’est qu’elle aura eu une vie épuisante à force de vouloir faire le bien des autres, contre leur gré.

J’ai trouvé que c’était un peu facile aussi cette différence de caractère : la sombre et calculatrice Marianne face à la radieuse et lumineuse Marguerite, aimée de tous.
C’est très manichéen : l’une a toutes les qualités, l’autre ne semble avoir que des défauts. Toute lumière et toute ténèbre ; j’imagine que le caractère très catholique de Mrs. Goudge a dû y être pour quelque chose.


J’ai mis beaucoup de temps à lire « Green Dolphin Country » car c’est tout de même un pavé de presque 800 pages, que j’ai interrompu de temps à autre pour une lecture plus légère ; lorsqu’on est face à des personnages aussi intenses, dont l’existence s’étale sur quarante années, on a besoin de prendre un peu d’air de temps en temps.

Mais c'est un livre que je recommande vivement à qui aime les fresques familiales, les belles études de caractères, avec un peu d'histoire en toile de fond.

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Commentaires
N
je suis certaine qu'il te plaira - et merci à toi de ta gentillesse à propos de mon avis
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G
Je suis heureuse de découvrir ton avis sur ce roman. Tu m'en dis plus sur l'histoire et ton impression renforce mon avis de le lire prochainement ! merci
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