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mon bonheur est dans la ville
17 juillet 2009

LE SAUVETAGE DE LA MAISON CAUCHIE

Bruxelles, comme la Belgique, regorgeait de véritables bijoux architecturaux du style Art Nouveau. Malheureusement, certains propriétaires étaient plus soucieux de réaliser de bonnes affaires immobilières plutôt que de s’occuper à restaurer, sauver, le patrimoine architectural de la ville.


C’est ce qui faillit advenir de ce petit bijou d’Art Nouveau qu’est la maison du peintre-décorateur Paul CAUCHIE et de son épouse Lina, également artiste-peintre. Le décorateur fit construire cette maison en 1905 après son mariage avec Caroline Voet (Lina) ; la maison-atelier se devant d’être la « carte de visite » de l’artiste, c’est d’abord la superbe façade qui retient l’attention, elle est la marque originale des artistes qui occupait le petit immeuble, Paul Cauchie ayant réalisé plus de 600 sgraffites à travers Bruxelles et la Belgique.

La maison se distingue des réalisations de son époque, marquée par des architectes tels Horta, Hankar, etc., qui utilisaient le fer, le verre et d’autres matériaux de façon fonctionnelle en courbes harmonieuses.

Cauchie par ailleurs semble avoir été le seul architecte-décorateur à avoir été influencé par le célèbre Mackintosh, architecte écossais, particulièrement novateur, pratiquant le principe de l’art total, lui même influencé par la découverte des arts graphiques du Japon. Dans la pièce principale au décor des Cinq Sens, dans chaque sens se retrouve un petit clin d’œil graphique aux arts japonais, très en vogue depuis l’ouverture des relations commerciales entre l’Europe et le Japon.

A l’opposé des structures à la mode de l’époque, fortement inspirées du végétal, les bases architectoniques de la demeure Cauchie sont rigoureusement géométriques.


Heureusement, grâce à un magicien qui physiquement ressemblerait plutôt à un petit elfe malicieux, la maison des Cauchie a fêté son centenaire en 2005 et se porte merveilleusement bien. Car il faillait bien que Guy Dessicy – co-fondateur du Musée de la Bande Dessinée et ami d’Hergé - soit un magicien plein de passion pour arriver à arracher la maison à la destruction totale.

En effet, en 1971, la fille du peintre, sans doute peu consciente du bijou architectural qu’était la maison de ses parents située 5 rue des Francs à Etterbeek (Bruxelles), avait l’intention demander un permis de bâtir, impliquant la démolition des numéros 3 et 5, qui seraient réunis en un immeuble à étages. Heureusement, de vives réactions à la fois locales et officielles firent en sorte que le permis soit refusé, quatre ans plus tard suite aux démarches de l’administrateur des Archives d’Architecture Moderne (AMM), le classement de la maison accordé.

En 1979, les époux Dessicy éprouvent un véritable coup de foudre pour la maison et entrent en contact avec Suzanne Cauchie-Duvigneaud ; ils signeront l’acte d’achat un an plus tard ayant pour projet d’y aménager un musée Tintin, idée qui sera abandonnée au profit de la création du Centre de la Bande Dessinée.

Restaurer la Maison Cauchie fut vraiment un ouvrage magique, car elle était réellement à l’état d’abandon. Tout d’abord, il fallut refaire la toiture car certaines pièces de la maison étaiebt devenues un pluvinarium. On s’attaqua aussi à la superbe façade, les sgraffites représentant les Muses, allégories représentant les Arts : peinture, architecture, musique, etc.

arton1931C’est pendant ces travaux de restauration que soudain le petit miracle apparut : non seulement la façade était un chef d’œuvre, mais la pièce principale du rez-de-chaussée est un véritable bijou, caché par un revêtement de papier. Nettoyés de cette couche, les murs révélèrent toute la beauté de la pièce : des sgraffites représentant les cinq sens.

Rappelons que la technique du sgraffite se rapproche de celle de la fresque : elle consiste à appliquer sur un fond de mortier imprégné de couleurs résistant à la chaux une couche d’enduit ou de mortier à grain fin et ensuite à l’inciser, à la gratter, suivant un dessin précis de manière à révéler le mortier coloré initial. Le sgraffite polychrome comprend plusieurs couches d’enduits de couleurs différentes ; de même que pour la fresque, le travail doit s’effectuer sur mortier humide, donc en une seule séance.

Cauchie peut être considéré comme le maître incontesté de la technique ancienne du sgraffite (de l’italien « sgraffito »), technique redécouverte à la fin du 19ème siècle.

Le sous-sol de la maison, ancien atelier du peintre, a été transformé en galerie d’art où l’on peut admirer les œuvres de l’architecte-peintre-décorateur, mais aussi certaines de son épouse qui - à l’instar de beaucoup d’épouses d’artistes dans les années 20, ayant elles aussi une excellente formation artistique – assistait son époux dans ses travaux, mais restant hélas dans l’ombre de leur mari alors que bien souvent leur talent était à la hauteur de ce dernier. Au cœur de la façade on retrouve d’ailleurs la devise du couple à savoir « Par Nous, Pour Nous » ; leur demeure-atelier fut marquée de leurs créations multiples : peintures, décoration, broderies, meubles, lustrerie.

La Maison Cauchie se visite le premier week-end de chaque mois ; pour que ne meurent pas les rêves, il faut aussi accepter la réalité, aussi les époux Dessicy, ne pouvant pas assumer seuls les frais pour que vive la maison, cherchent des aides, des mécènes, des partenaires.

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